ENVIRONNEMENT ET SÉCURITÉ DE L’HABITAT
BYAKOUT, AU BORD DE L’ABÎME
Depuis plus de dix-sept ans, les “Comités populaires du Metn”,  ont étudié en détail le problème très grave de la prolifération des carrières urbaines proches des zones habitées. En particulier, leurs retombées nocives sur la santé publique et la sécurité des habitations mitoyennes.
 

La route et le mur de soutènement 
profondément effondrés, entraînent 
avec eux toute la façade du troisième
immeuble encore debout 
mais penché vers la droite.

Au début de février, d’immenses et de
profondes mares d’eaux de pluies et de
vannes des immeubles, noient les maisons
et les véhicules sous-jacents. Tout en minant 
gravement la base des falaises dont l’épaisseur
est gravement amoindrie par le dynamitage des carrières.

La partie la plus dangereuse et la plus destructrice concernait encore la zone moyenne sud-ouest de la vallée de Nahr el-Mot (ce nom est explicite).
C’est là depuis presque trente ans, comme l’a dit un ministre reconverti, “qu’une énorme excavation a été progressivement creusée dans le sol rocheux”. Avec un système prohibé, de trous de mines horizontaux bourrés de centaines de kilos de TNT. Leur explosion simultanée au-dessous d’une montagne habitée comme celle de Byakout, causait des secousses simili-sismiques qui se propageaient à plusieurs kilomètres à la ronde comme à Bsalim, Bkennaya et même Roumieh.
Ces ondes massives fragmentaient et déstabilisaient le sol en pente de la montagne et fissuraient les murs, plafonds et fondations des maisons plus ou moins proches.
Si bien qu’en quelques années, s’est formée une longue falaise haute de cinquante à cent mètres, saturée de failles horizontales et, surtout, verticales. Dont les effondrements et éboulements fréquents ont causé pas mal d’accidents mortels parmi les ouvriers des carrières.
Evidemment, cette ambiance volcanique de secousses perpétuelles, de poussières et odeurs âcres ont indisposé les habitants proches et arrêté les demandes de terrains à bas prix pour la construction.
 

Les deux immeubles, évacués à 
temps, complètement aplatis, glissent 
inexorablement cent mètres plus bas.

Au-dessous de Bsalim mais au Nord, 
un énorme immeuble est en construction
au-dessus de carrières plusieurs fois éboulées.

RECOMMANDATIONS ET MENACES
Les “Comités populaires du Metn” ont publié une série de recommandations insistant “grosso modo” d’abord, sur un arrêt progressif des carrières du littoral du Metn, dont celles de Byakout, Roumieh, Bsalim et d’Antélias... Avec la prohibition de l’usage d’explosifs massifs avec une interdiction spéciale de l’usage des trous de mines profonds bourrés de centaines de kilos de TNT.
Si bien que les carrières déjà “soutenues” par de fortes personnalités politiques et formant déjà un “Etat dans l’Etat”, ont passé à l’action après des menaces vaines. Parallèlement, les comités ont fortement déconseillé de construire dans le voisinage immédiat de la falaise branlante de Byakout et, surtout, de la région de Hay al-Aïn où le collège Saint-Jacques des Révérendes sœurs de La Croix devait être prolongé. Dernièrement, ces bonnes sœurs m’ont remercié de cet avis judicieux. Pour ma part, j’ai continué à œuvrer contre “vents et marées”, jusqu’à la fermeture définitive des carrières de Nahr el-Mot menaçant Byakout et Bsalim; ainsi que celles d’Antélias surplombées par Rabieh qui se développe, paradoxalement, sur les hautes falaises sous-jacentes où les carrières ont plus ou moins arrêté leurs travaux.
 

Il faudrait encore étudier les immeubles
de Rabieh dominant les carrières sous
-jacentes d’Antélias qui semblent produire
à nouveau des montagnes de gravier blanc.

De hautes cascades d’eaux d’égouts 
malodorantes et de caniveaux, longent
et humidifient les parois d’une centaine
de mètres de haut des falaises de
Byakout. L’ensemble, roches fissurées
et masses argileuses sont saturées et
érodées sans arrêt, créant un danger 
permanent d’effondrement.

PREMIER AVERTISSEMENT ILLUSTRÉ À PARTIR DU 16-2-2000
Depuis 1995-1996, les habitants de Byakout et les promoteurs immobiliers sont encouragés par l’arrêt visible des carrières avec leurs effondrements et éboulements. Ils recommencent à acquérir des terrains encore à bon marché au voisinage des falaises artificielles et même à construire des immeubles de rapport, lourds et à plusieurs étages. Consulté, j’ai demandé seulement beaucoup de prudence, avec un avis nettement défavorable pour une construction massive dans une zone instable et marginale. Ces arguments se retrouvent dans un reportage illustré en sixtableaux documentaires tracés sur place depuis le mercredi 16 février, premier jour de la catastrophe. Cette étude représente un premier avertissement nettement visible à l’œil nu.
Nous avons d’excellents ingénieurs géologues au Liban plus efficients; c’est pourquoi, ils auraient pu régler ce problème. S’ils ne l’ont pas fait pour éviter des avanies, cela les regarde.
Je leur demande seulement de ne pas tranquilliser les habitants d’immeubles situés trop près d’une falaise artificielle instable qui risque de s’effondrer à tout moment. Non seulement à cause de pluies violentes mais, aussi, des eaux d’égouts et de caniveaux rejetés en pleine nature. Qui s’écoulent massivement en cascades le long d’un bouclier amoindri et fissuré rocheux retenant à peine des masses énormes d’argiles saturées d’eau qui risquent de provoquer un glissement de terrain gigantesque. Et, surtout, ne pas oublier que le Liban est situé entre deux plaques tectoniques ayant provoqué quatre secousses sismiques entre mars 1956 (Amplitude 6) et mars 1992 (Amplitude 4). Qui risquent de provoquer une catastrophe majeure dans une région gravement déstabilisée comme Byakout.
En attendant, un grand responsable a promis 200 millions de livres libanaises pour consolider une falaise fragilisée haute de 50 à 100 mètres et longue de presque deux mille mètres. Cette somme sera très inférieure à la technologie nécessaire pour bloquer cette catastrophe en gestation permanente. En attendant, il vaudrait mieux utiliser cette somme pour trouver un logement décent à cent familles qui ont dû évacuer leurs immeubles en danger et assurer leurs droits pour les indemniser, légalement et au plus vite. Seule solution valable actuellement. Au lieu de l’idée stupide de leur offrir de grandes tentes pour s’abriter à proximité de leurs anciens logements effondrés. Ou bien de souffrir comme des réfugiés dans leur propre pays. Comme ces malheureux tchétchènes et kosovars qui se trouvent dans la même situation pénible.
Que Dieu leur vienne en aide.

PIERRE MALYCHEF - Ecologiste
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