Mlle Aline
Lahoud s’est demandé dans son article de “La Revue du Liban” du
20 février 2000, sous le titre: “Le piège du retrait”, si
j’entends ce que je dis à la télévision.
Je suppose que Mlle Lahoud entend très bien ce que je dis, mais
lit-elle bien les leçons de l’Histoire?
Je dépasserai sans aucune amertume les qualificatifs utilisés
par Mlle Lahoud contre ma personne pour aller, sans hésitation,
au fond du sujet.
Il est clair qu’Aline Lahoud ne croit pas en l’utilité de la
Résistance libanaise contre Israël. Quelle solution propose-t-elle
donc pour mettre fin à l’occupation israélienne? C’est, tout
simplement, l’application de la résolution 425. Non pas seulement
cela, mais le choix d’un “ministre des Affaires étrangères
qui ait du punch, une politique nettement articulée et dynamisée”.
Fort bien. Nous réclamons l’application de la résolution
425 depuis vingt ans; avons-nous progressé d’un pas? Nos ministres
des Affaires étrangères avaient du punch et une politique
dynamisée: ont-ils pu entreprendre, effectivement, une action meilleure
que celle du président Hoss?
Mlle Aline Lahoud ne semble pas avoir tiré les leçons
de l’Histoire, celle des peuples ayant opté pour la résistance.
Elle ne se rappelle pas ce qui s’est passé au Vietnam; nous permet-elle
de lui rafraîchir un peu la mémoire?
Le conflit au Vietnam vers la moitié du siècle dernier,
opposait la résistance nationale vietnamienne (le Vietcong) dans
la partie méridionale du pays à la plus grande puissance
de l’Histoire contemporaine: les Etats-Unis d’Amérique. Le Vietnam
Nord, Etat pauvre à la direction sage et courageuse a, il est vrai,
offert un soutien logistique au Vietcong, mais l’équilibre des forces
entre les deux parties a toujours été dans l’intérêt
des Américains.
Les habitants du Sud Vietnam ont payé un prix très cher
du fait de la résistance, ainsi que ceux du Nord; que s’est-il passé?
Les Vietcongs ont pu à force de courage, de patience et de sagesse,
infliger de lourdes pertes en vies humaines aux Américains, ce qui
a provoqué une grande secousse à l’intérieur des Etats-Unis.
La société riche n’a pu supporter les coups de la société
pauvre: les mères se sont révoltées, les intellectuels
ont protesté, les différentes franges de la société
ont bougé sous forme de manifestations et de sit-in; les hommes
politiques ont interrogé le gouvernement sur l’utilité de
cette aventure coûteuse dans les brousses d’Asie... Et il y a eu
le retrait américain du Vietnam.
En transposant la guerre au sein de la société américaine,
la résistance vietnamienne a pu triompher. N’est-ce pas ce que fait
la Résistance chez nous?
Aline Lahoud peut avoir entendu parler de l’action du “comité
des quatre mères” en Israël; détecte-t-elle, ne serait-ce
que peu, le rejet par l’opinion publique israélienne, de la perpétuation
de l’occupation et du coût humain exorbitant que la société
civile est en train de payer?
Peut-être a-t-elle lu les interrogations des écrivains
et des journalistes israéliens concernant le coût onéreux
de cette occupation? Se souvient-elle très bien de ce que Barak
a été contraint de s’engager devant son peuple à retirer
ses forces du Liban-Sud avant le 7 juillet prochain? Afin qu’il n’oublie
pas cette date à l’instar de ses prédécesseurs qui
ont ignoré des engagements similaires durant plus de vingt ans,
la Résistance libanaise persiste à asséner, avec courage
et sagesse, des coups étudiés à l’armée israélienne,
dans le cadre d’une coordination avec la direction politique au Liban et
en Syrie.
Est-il permis à Aline Lahoud de juger l’option de la Résistance
en écrivant: “Du point de vue romantique, l’idée est très
belle, mais sur le plan militaire, c’est plutôt naïf pour ne
pas dire demeuré”.
J’aime me remémorer avec joie un mot frappant de Moussa Sadr:
“Ils (les Israéliens) ne sont pas plus forts que l’Amérique
et nous ne sommes pas plus faibles que le Vietnam”.
Je voudrais rappeler, aussi, avec fierté un autre mot historique
prononcé il y a quelques jours, par un autre Lahoud d’une autre
trempe qu’Aline Lahoud: “Si Israël faisait tomber l’immunité
de nos citoyens et nos installations civiles, il ferait tomber en même
temps l’immunité de ses citoyens, ses installations et ses intérêts.
Nous croyons que nos coups seront plus douloureux dans ce cas, à
la lumière de l’enchevêtrement des intérêts israéliens
connus.”
Telle est la leçon du Vietnam et sa malédiction éternelle
sur les agresseurs.