LE CHEF DU DÉPARTEMENT FÉDÉRAL HELVÉTIQUE
EN TOURNÉE AU P.-O. JOSEPH DEISS:
“LA SUISSE CONDAMNE TOUTE RESURGENCE DE LA VIOLENCE
ET S’INQUIÈTE DU SORT DES POPULATIONS CIVILES AU LIBAN-SUD”
Le 1er août 1291, sur la prairie du Grütli, au bord du lac des Quatre-Cantons, trois hommes des cantons montagnards d’Uri, de Schwyz et d’Unterwald se jurèrent assistance mutuelle, afin de sauvegarder leur autonomie de juridiction et de gestion contre la politique d’hégémonie des Habsbourg. Ils formèrent le “noyau” d’un Etat helvétique fédéral, neutre depuis le XVIème siècle, célèbre par la coexistence de ses minorités et ethnies sur un espace géographique restreint, son quadrilinguisme, sa démocratie directe, sa place financière, sa diversité et son tourisme.

Pays pacifique, la Suisse a réussi là où beaucoup d’autres ont échoué. Mandatée au processus de paix multilatéral de Moscou pour discuter des droits de l’homme, la Confédération helvétique tient à jouer son rôle auprès des autres acteurs de ce processus. Après quinze ans d’absence, elle dépêche son ministre des Affaires étrangères, M. Joseph Deiss au Proche-Orient pour renouer les relations économiques, offrir ses bons offices, afin de trouver un terrain d’entente permettant de redresser la situation humanitaire découlant du conflit israélo-arabe.
... “La Confédération suisse contribue, notam-ment, à soulager les populations dans le besoin et à lutter contre la pauvreté, ainsi qu’à promouvoir le respect des droits de l’homme, la démocratie, la coexistence pacifique des peuples et la préser-vation des ressources naturelles”... (art. 54- 2- Affaires étrangères. Chapitre 2- Titre 3 - Nouvelle Constitution fédérale).
Cet article résume clairement le cadre dans lequel s’inscrivent les relations extérieures de la Confédération helvétique. Des relations qui seront d’autant plus accentuées au Proche-Orient à travers le mandat accordé à la Suisse dans le processus multilatéral de paix en matière de droit humanitaire. Ce rôle sera renforcé par la visite officielle de M. Joseph Deiss, chef du Département fédéral des Affaires étrangères suisse, dans la région qui survient après quinze ans d’absence et englobera l’Egypte, la Syrie et le Liban.


M. Joseph Deiss, Conseiller fédéral,
chef du Département fédéral des
Affaires étrangères suisse.

AGENDA CHARGÉ
En guise de préparation pour cette visite, le Département fédéral des Affaires étrangères a organisé une visite groupée en Suisse de journalistes égyptiens et libanais. Ces derniers ont pu tout au long d’une semaine, rencontrer et discuter avec des responsables suisses des différentes questions concernant les relations bilatérales entre leurs pays respectifs, du rôle de la Suisse dans le processus de paix, de ses relations avec l’Union européenne avec M. José Bessard du Bureau de l’intégration (DFAE); de la neutralité, avec M. Emmanuel Bichet, de la Direction du droit international public; du tourisme, avec M. Andreas Mehr; de la place financière suisse avec MM. James Nason et Markus Staub, de l’Association Suisse des Banquiers.
Ils ont, aussi, discuté du fédéralisme et de la coexistence entre différentes communautés linguistiques à l’Institut du fédéralisme à l’Université de Fribourg, avec MM. Pascal Arnold et Urs Thalmann; de la coopération commerciale, avec M. Rudolf Kummer, chef de la Division Afrique et Moyen-Orient au secrétariat d’Etat à l’économie. A l’ordre du jour figurait, aussi, une rencontre au siège central à Genève du CICR avec M. Jean Delesmilliers, chef-adjoint des opérations pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord et Mme Dominique Borgeat, responsable des opérations au Proche-Orient. Cette rencontre fut précédée d’une autre à l’Organisation Mondiale du Commerce avec Mme Lucie Giraud. Les journalistes ont assisté aussi à une présentation du Centre de politique de sécurité par M. Ulrich Lehner.
Ils ont eu, également, l’occasion de s’entretenir avec leurs collègues suisses et de visiter avec M. Jean-Louis Bernier, attaché de direction d’Edipresse Suisse, les rédactions des quotidiens “24 Heures” et “Le Matin”. A Chesaux-sur-Lausanne, ils ont visité la Société Nagravision S.A. du Groupe Kudelski, une société qui traite les technologies de pointe, alors qu’à “Birr” ils se sont rendus à la société ABB.
 

Le Jardin de Brunswick à Genève.

“Les Pétrifiés”, une sculpture 
de Carl Bucher au Musée international 
de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.

ENGAGEMENT HUMANITAIRE
Ces rencontres furent couronnées par un entretien informel accordé par le Conseiller fédéral, M. Joseph Deiss, aux journalistes au Salon présidentiel du Palais fédéral Ouest à Berne.
M. Joseph Deiss a affirmé que “la Suisse condamne toute resurgence de la violence au Liban-Sud. Ce qui nous inquiète, dit-il, c’est le sort de la population civile. Nous souhaitons qu’on puisse continuer sur la base de ce qui a déjà été élaboré entre Israël et le Liban.
“Pour ce qui est des négociations, on attend un progrès du côté israélo-syrien pour que le Liban puisse parvenir à un accord. Cependant, la question des réfugiés palestiniens nous apparaît cruciale et la Suisse offre ses bons offices, même si le patronage du processus est assumé par d’autres.
“Au niveau des négociations multilatérales, les Suisses étaient présents à Moscou comme observateurs et chargés de la dimension humaine et nous souhaitons assumer cette fonction de manière plus intensive.
“Nous pensons que notre rôle peut être important, notamment dans la question des réfugiés, groupe piloté par les Canadiens et avec lesquels nous sommes en coopération. Aussi, allons-nous, en particulier, organiser avec les Tunisiens une conférence sur les questions et besoins des enfants, en général, dans la région, mais il faut que les activités que nous entreprendrons, puissent avoir des chances de succès. Cela dit, nous préférons nous concentrer sur ce que nous faisons déjà, puisque nous sommes engagés dans toute une série de projets surtout du côté palestinien.” (Un crédit-cadre pour les territoires palestiniens reconduit à 15 millions de F.S. par an).
M. Deiss qui a rencontré, auparavant, M. Peter Hanson, de l’UNRWA, s’est déclaré affligé de constater que l’on marque les cinquante ans de l’organisation, estimant que les pays de la région, ainsi que la Communauté internationale devraient aller au-delà de ce qui se fait actuellement, puisqu’aucune paix ne serait établie sans avoir résolu le sort des réfugiés d’une manière définitive.


Réforme et contre-réforme favorisèrent la division
confessionnelle qui marque la Suisse depuis le XVIIème siècle.

ACCORD POUR LA PROMOTION DES INVESTISSEMENTS
La visite du Conseiller fédéral pour la région s’inscrit dans le cadre de la contribution de la Suisse à une solution de pacification, d’aide, de coopération et de relations économiques avec le Proche-Orient. M. Deiss saisira l’occasion au cours de son séjour en Egypte, pour commémorer en privé les victimes de Louxor qui ont affecté pour un moment les relations égypto-suisses.
Arrivé au Liban, le ministre des Affaires étrangères visitera Beiteddine et Deir el-Kamar où la Suisse a négocié avec MM. Walid Joumblatt, député, et Dory Chamoun, président de la municipalité, un projet pour la réinsertion des déplacés et de la consolidation de l’entente entre les différentes communautés. Il visitera, aussi, le Musée national et signera un accord pour la promotion des investissements essayant de la sorte de “créer un cadre favorable pour les relations économiques dans un monde où ces dernières sont gérées par des privés défendant le système économique libéral de marché et où il est difficile à l’Etat d’agir directement. Dans cette optique, l’accord en vue vise à développer le potentiel existant entre les deux pays”.


MM. Pascal Arnold et Urs Thalmann
à l’Institut du fédéralisme.

MANDAT HUMANITAIRE
La promotion des droits de l’homme, de la démocratie et des principes de l’Etat de droit reste un objectif majeur pour la fédération helvétique, pays traditionnellement neutre. Etat dépositaire des quatre Conventions de Genève et de leurs protocoles additionnels, la Suisse est investie d’un mandat spécifique, surtout en ce qui concerne la Conférence internationale sur la protection des victimes de la guerre tenue à Genève en 1993. “Ce rôle se traduit par différents instruments”, indique M. Pierre-Yves Fux, collaborateur diplomatique à la Division politique IV qui s’est chargé d’expliquer les moyens d’application de cette politique humanitaire aux journalistes libanais et égyptiens.
“Il existe, dit-il, des instruments juridiques pour ratifier les conventions, favoriser l’émergence de nouvelles normes, de mécanismes d’application universels, des instruments politiques concrétisés par les dialogues et échanges qui s’instaurent entre les ambassades, des instruments économiques positifs ou négatifs qui favorisent ou bloquent toute coopération.”
Cette vocation humanitaire est appuyée par le mandat obtenu dans le processus multilatéral de paix au Proche-Orient, un mandat qui agit en fonction du progrès du processus bilatéral. Au titre dudit mandat, la Suisse soutient plus de cinquante activités depuis 1996 dans la région dont, particulièrement, des émissions en langue arabe sur le droit humanitaire, réalisées par le bureau de CICR au Caire qui seront diffusées par satellites en Egypte, au Liban et, peut-être, au Qatar. Une conférence régionale en Tunisie sur les droits de l’enfant, l’enseignement obligatoire des droits de l’homme dans les écoles et universités palestiniennes, projet proposé par Mme Hanane Achraoui et réalisé en collaboration avec le CICR et la Suisse.
Au Liban, la Confédération helvétique a soutenu financièrement l’Institut des droits de l’homme du Barreau de Beyrouth, ainsi que le forum libanais des ONG qui apporte l’assistance juridique à des groupes n’ayant pas accès à cette assistance, en plus de certains projets de développement dans le domaine de la justice des mineurs.
En revanche, le Maroc est l’un des pays arabes où est institué un dialogue intensif et des échanges d’experts et de délégations, d’avocats, où il y a soutien à certaines universités et ONG, etc.
Mais “pour certains pays de la région, l’expression “droits de l’homme” est délicate, remarque M. Pierre-Yves Fux. Ce qui incite la Suisse à agir de manière confidentielle et discrète dans l’intérêt des victimes. Nous ne cherchons pas à utiliser les droits de l’homme pour valoriser notre image auprès de l’opinion suisse ou autre”, ajoute-t-il.
Ainsi, pour ce qui est des détenus libanais arbitrairement à Khiam ou ailleurs, la Suisse intervient et suit de près ce dossier depuis des années, épaulée par différentes ONG internationales et locales qui lui fournissent des listes des personnes et des conditions d’incarcération. Aussi, “conformément au droit international pour lequel les Suisses ont un attachement viscéral, la Suisse favorise-t-elle une prise de conscience du problème des réfugiés palestiniens et une solution juste et durable prenant en considération la résolution 194 du Conseil de Sécurité de l’ONU qui accorde le droit au retour, à l’indemnisation.”


Les ruelles dans l’ancienne ville de Genève.

SOLUTION JUSTE ET VIABLE
Sur ce point, Mme Muriel Berset Kohen, collaboratrice diplomatique à la Division politique II, qui accompagne M. Joseph Deiss dans sa tournée,  affirme: “Nous soutenons la position libanaise qui a évolué ces derniers temps. Une solution au problème des réfugiés est, désormais, examinée sur le même pied d’égalité avec un retrait israélien du Liban-Sud. Nous comprenons, aussi, la situation particulière du Liban. Mais certainement au-delà de la position officielle, les solutions qui seront trouvées, seront nuancées et diversifiées.
“D’ailleurs, la Suisse est l’un des dix premiers contributeurs à l’UNRWA avec une donation de 8 millions de F.S. par an. Outre cette contribution, elle joue un rôle actif au sein de l’organisation pour améliorer son efficacité et les échanges entre les pays donateurs, hôtes et l’UNRWA elle-même.”
Selon Mme Kohen, la position de la Suisse au Proche-Orient repose sur des données centrales essentielles pour une solution viable; elles se résument par le droit d’Israël à la sécurité dans des frontières internationalement reconnues, le droit du peuple palestinien à un Etat viable, à une solution juste et satisfaisante pour les réfugiés palestiniens et le règlement du statut de Jérusalem, ainsi que le recouvrement de l’intégrité territoriale de la Syrie et du Liban.

INTÉGRITÉ TERRITORIALE ET INDÉPENDANCE POLITIQUE
Mme Jolanda Pfister qui rejoindra son poste à l’ambassade suisse à Beyrouth vers la fin du mois de mars, rappelle que “depuis que le conflit existe, le Conseil fédéral suisse est intervenu auprès des autorités israéliennes en faveur du respect des conventions à Genève relatives à la protection des combattants et des civils. La Suisse est intervenue pour que le CICR puisse continuer à exercer ses activités sans entraves.
“En 1999, elle a de nouveau entrepris des démarches auprès des Israéliens après l’occupation du village d’Arnoun et a condamné clairement la nouvelle escalade de violence au Liban-Sud et appelé au cessez-le-feu.
“Le Conseil fédéral considère, en outre, que le Liban doit recouvrir pleinement son intégrité territoriale et que la souveraineté de ce pays doit être strictement respectée conformément à  la résolution 425 du Conseil de Sécurité de même que son indépendance politique”, conclut-elle.
Cette politique helvétique proche-orientale est hautement influencée par le processus de Barcelone. La création d’une zone de libre-échange d’ici jusqu’à 2010 dans le Sud de la Méditerranée, accentue l’intérêt économique de la Suisse pour cette région. Ne faisant pas partie de l’Union européenne, elle ne peut pas se permettre de se désavantager. Membre de l’Association de libre-échange (ALE), elle conduit une politique parallèle à celle de l’Union européenne.

DE NOTRE ENVOYÉE SPÉCIALE MICHELINE ABI-KHALIL
Home
Home