S.S. JEAN-PAUL II PLACE SON “PÈLERINAGE
JUBILAIRE” SOUS LE SIGNE DU DIALOGUE
“QUE LA PAIX SOIT LE CADEAU DE DIEU À LA TERRE QU’IL
CHOISIT POUR SIENNE”, DÉCLARE LE SAINT-PÈRE

Souhaité ardemment de longue date par Jean-Paul II, ce pèlerinage jubilaire en Terre Sainte est devenu réalité. Le Souverain Pontife vient de passer une semaine entre la Jordanie, Israël et les territoires occupés, sur les pas de Moïse, de Jean-Baptiste et du Christ: du Mont Nébo, à Jérusalem, Bethléem et Nazareth.
Ce pèlerinage historique aux “sources de la Foi”, le Pape a voulu le placer sous le signe de la paix, de la justice et du dialogue entre les trois religions monothéistes: le Christianisme, l’Islam et le Judaïsme qui prennent leur source dans cette région du monde. Le mois dernier, sur le Mont Sinaï, le Saint-Père avait déjà initié cette grande entreprise de dialogue interreligieux.
Evidemment, Jérusalem a constitué le moment le plus fort de la visite. On peut imaginer toute l’émotion et la ferveur de Jean-Paul II, quand il en a foulé le sol le mardi soir 21 mars. Ville trois fois sainte, elle abrite le Saint-Sépulcre, le lieu le plus sacré de la Chrétienté; le mur des Lamentations, premier lieu saint des Juifs et la Mosquée d’El-Aqsa, troisième lieu saint de l’Islam.
Avant d’arriver en Terre Sainte, où tous les lieux sacrés et villes qu’il a visités ont été pavoisés aux couleurs du Vatican, le Pape a, à maintes reprises, rappelé que son pèlerinage jubilaire était, uniquement, inspiré par des motifs religieux, voulant éviter toute polémique autour de cette visite. Mais dans cette région du globe, à la recherche de la paix, de la sécurité et de la stabilité, peut-on réellement séparer le politique du religieux, d’autant plus que tout devient politique, y compris la religion?
Par sa grande ferveur, sa sérénité et la profondeur de son message à chaque étape du voyage, le successeur de Pierre a su donner à ce pèlerinage toute sa dimension spirituelle et temporelle loin des conflits, des critiques et des passions. Par la foi et l’espérance, Dieu fera le reste dans les esprits et les cœurs.
 

De ce promontoire sur le Mont Nébo où Moïse aurait trouvé
la mort selon la tradition, le Saint-Père a déclaré avoir
vu la ville de Jérusalem.

Jean-Paul II a entamé, le lundi 20 mars 2000, par Amman, première étape de son “pèlerinage jubilaire” de six jours en Terre Sainte, “aux sources de la foi” le plaçant d’emblée, sous le signe de la paix.
La Jordanie a réservé au chef de l’Eglise catholique un accueil émouvant officiel et chaleureux. D’ailleurs, cette étape du voyage papal était la plus calme et la plus sereine, loin de toute tension polémique ou réaction d’hostilité.
Le Saint-Père a été accueilli à l’aéroport international de la reine Alia à Amman, par le roi Abdallah de Jordanie et la reine Rania. Dans une brève allocution, S.S. Jean-Paul II a évoqué le thème de la paix au Proche-Orient. “Aussi difficile et aussi long qu’il soit, dit-il, le processus de recherche de la paix doit continuer. La paix est tellement inportante; il faut prier pour qu’elle se réalise, car sans elle il ne peut y avoir de développement authentique pour cette région du monde.”
Le Pape exprime de même l’espoir que sa visite “renforcera le dialogue déjà fructueux entre chrétiens et musulmans qui est conduit en Jordanie”, rappelant que “les religions monothéistes ont la paix, le bien et le respect de la personne humaine parmi leurs valeurs les plus importantes”.
Dans son allocution, le roi Abdallah II s’adresse en ces termes, au Saint-Père: “Votre visite est porteuse d’espoir en un avenir meilleur à tous ceux qui n’ont connu que les misères du passé. Elle apporte l’espoir aux Palestiniens qui aspirent à la justice et à la stabilité, une promesse de sécurité et d’acceptation pour les Israéliens, un confort pour les Libanais et l’espoir pour les Syriens que le triste chapitre de la guerre est enfin fini.”
La cérémonie d’accueil s’est déroulée sous une tente, symbole de l’hospitalité bédouine. Trois enfants, deux chrétiens et un musulman, ont présenté une coupe contenant la terre de Jordanie que le Pape a bénie, en même temps, un enfant libérait deux colombes, symbole de la paix.


Une grande statue symbolisant
le bâton de Moïse.

AU MONT NÉBO D’OÙ MOÏSE A VU LA TERRE PROMISE
Juste après la cérémonie d’accueil, le Souverain Pontife a gagné, en voiture, le Mont Nébo, situé à 40 km de la capitale jordanienne. Selon la tradition, Moïse serait mort en cet endroit après avoir vu la Terre promise.
Accueilli par le prince Hassan ben Talal, oncle du roi Abdallah, Jean-Paul II s’est recueilli à la basilique du Mont Nébo, basilique byzantine du IVème siècle dont le sol et les murs sont couverts de mosaïques illuminées par des dizaines de cierges.
Une cinquantaine d’invités, dont le gouverneur de la région, des maires des localités voisines, des prêtres et des religieuses ont accueilli le Saint-Père à l’intérieur de la basilique, alors que la chorale formée d’une vingtaine d’enfants, entonnait des cantiques en arabe et en latin. S.S. Jean-Paul II s’est agenouillé sur un prie-Dieu, a fermé les yeux, croisé les mains dans un profond recueillement. “J’ai fait, dira-t-il, ensuite, une courte prière pour les habitants de la terre promise, chrétiens, musulmans et juifs”.
Cette première journée de pèlerinage s’est achevée par un entretien, en début de soirée, avec le souverain hachémite; le Pape devait passer la nuit à la nonciature apostolique d’Amman.
Mardi 21 mars, il a entamé sa deuxième journée de pèlerinage en célébrant la première messe d’un Pape en Jordanie, au grand stade d’Amman, en présence de près de 100.000 fidèles dont des Libanais, des Syriens, des Irakiens, venus en Jordanie pour la circonstance.
Jean-Paul II fait le tour du stade dans sa célèbre papamobile, suivi d’un essaim de fidèles enthousiastes, agitant des drapeaux du Vatican et sous les acclamations chaleureuses de la foule, qui scandait: “Jean-Paul II que Dieu te bénisse”. Il a revêtu, ensuite, une chasuble rouge, porté la mitre et la crosse pour célébrer l’office divin, entouré d’une cinquantaine de cardinaux et d’évêques. Cette messe papale fut dédiée au “martyr Jean-Baptiste” qui, selon les Evangiles, baptisa le Christ dans les eaux du Jourdain.
Lors de cette messe, deux mille enfants ont fait leur première communion. Le Saint-Père a, de même, béni trois pierres angulaires de trois nouvelles églises à Amman dont une maronite. Lorsqu’il s’est adressé aux fidèles en arabe, leur disant “As-Salam Lakoum” (Paix avec vous), ce fut le délire. Dans son homélie, il a affirmé: “Après avoir suivi les pas d’Abraham et de Moïse, notre pèlerinage a atteint maintenant les lieux où notre sauveur Jésus-Christ a vécu et voyagé durant sa vie terrestre.”
Avant de quitter la Jordanie pour aller en Israël, le Pape s’est rendu à Wadi Kharrar, sur la rive orientale du Jourdain, l’un des deux lieux les plus probables où le Christ aurait été baptisé par Jean-Baptiste.


Le Pape célébrant la messe au grand stade d’Amman en
présence de 100.000 fidèles.

ARRIVÉE EN ISRAËL
Mardi 21 mars, vers 17h40 (heure de Beyrouth), un “Airbus 320” de la Compagnie royale jordanienne, arborant les drapeaux du Vatican et d’Israël, se posait à l’aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv. A sa descente d’avion, le Pape embrasse et bénit un bol rempli de la terre d’Israël que lui ont tendu trois enfants originaires de Nazareth: un juif, un chrétien et un musulman.
Le Saint-Père est accueilli par le président Eizer Weizman et par le Premier ministre Ehud Barak, accompagnés de leurs épouses. Tous les membres du Cabinet sont présents et l’accueil est teinté de beaucoup d’émotion, accompagné de mesures de sécurité draconiennes. Plus de 25.000 hommes auraient été mobilisés pour la circonstance et même, dit-on, le chef de l’Etat américain n’avait pas eu droit à un tel déploiement de forces.
C’est que cette présence du Saint-Père est de la plus haute importance. Tout d’abord, il s’agit de la première visite d’un Souverain Pontife en Israël depuis trente-six ans. En 1964, Paul VI y avait effectué un pèlerinage, mais à l’époque, le Saint-Siège ne reconnaissait pas encore l’Etat hébreu. C’est chose faite depuis et, en 1994, des relations diplomatiques étaient établies entre le Vatican et Israël.
Par ailleurs, le Saint-Père arrive dans une région du monde qui aspire à une paix réelle et durable. A chaque étape de son pèlerinage, Jean-Paul II insistera sur la nécessité d’aboutir à cette paix. En troisième lieu, sa visite s’inscrit dans l’une de ses préoccupations majeures, à savoir: l’instauration d’un dialogue interreligieux, les lieux saints abritant les trois religions monothéistes.
Dans une brève allocution à l’aéroport Ben Gourion, le Pape affirme: “Nous savons tous combien est urgent le besoin de paix et de justice, non seulement pour Israël mais pour toute la région. Que la paix soit le cadeau de Dieu à la Terre qu’Il choisit pour Sienne.”
Jean-Paul II évoque, aussi, les relations entre le Vatican et l’Etat hébreu: “L’établissement de relations diplomatiques entre nous en 1994, rappelle-t-il, a scellé les efforts pour ouvrir une ère de dialogue sur des questions d’intérêt commun.”
De même, il affirme que son pèlerinage “est un hommage aux trois traditions religieuses qui coexistent sur terre. Je prie pour que ma visite serve à encourager un accroissement du dialogue interreligieux qui amène juifs, chrétiens et musulmans à rechercher dans leurs croyances respectives la motivation et la persévérance pour œuvrer pour la paix et la justice.”
Le président Weizman prononce une allocution en hébreu et M. Barak salue le Pape en ces mots: “Bienvenue en Terre Sainte”. La cérémonie officielle d’accueil a dû être écourtée à cause du temps pluvieux.
 

Le roi Abdallah II et la reine Rania 
accueillent le Souverain pontife à Amman.

Jean-Paul II entouré du président 
Eizer Weizman et de M. 
et Mme Ehud Barak.

Le chef de l’Autorité palestinienne 
\Yasser Arafat conversant avec le Pape.

Le Saint-Père bénissant la foule 
avec des rameaux d’olivier trempés 
dans l’eau du Jourdain.

DE JÉRUSALEM À BeTHLÉEM
Dans un hélicoptère “Black Hawk” de l’armée de l’air israélienne, le Saint-Père s’est rendu de Tel-Aviv à Jérusalem où il est arrivé autour de 7h20 (heure de Beyrouth). On peut imaginer toute son émotion, sa ferveur et sa joie profonde en foulant cette terre trois fois sainte, où depuis si longtemps, il aspirait se rendre en pèlerinage. Inutile de préciser qu’un imposant dispositif de sécurité avait été mis en place à l’héliport de Jérusalem qui avait été saccagé peu de jours auparavant par des extrémistes juifs du mouvement Kach, hostiles à la visite papale. Mais rien n’ébranle la sérénité du successeur de Pierre qui sait que la “foi soulève les montagnes”.
Le Saint-Père passe donc sa première nuit à Jérusalem au siège de la nonciature apostolique au Mont des Oliviers, placée, elle aussi, sous haute surveillance. Mercredi matin, à 9h15 (heure de Beyrouth), Jean-Paul II arrive à Bethléem, troisième étape de son pèlerinage où il passe la journée. Il embrasse et bénit la Terre Sainte et est accueilli par Yasser Arafat, chef de l’Autorité palestinienne, avec qui il aura un long entretien. Le moment fort de la visite à Bethléem sera, évidemment, l’office divin que le Saint-Père a célébré en plein air, sur une vaste place devant la basilique de la Nativité où se trouve la grotte où est né l’Enfant Jésus il y a deux mille ans. Plus de 20.000 fidèles ont assisté à la messe dont des fils de Bethléem et de la région et des pèlerins venus des quatre coins du monde. Le Souverain Pontife a, de même, visité un camp de réfugiés palestiniens où vivent huit mille personnes. Quelques heures avant son arrivée, des centaines de réfugiés du camps ont appelé le Pape à appuyer leur droit au retour.
Les Palestiniens espèrent, par ailleurs, que Sa Sainteté les confortera dans leurs aspirations à la création d’un Etat, après que le Vatican eut signé, en février 2000, un accord historique avec l’OLP officialisant les activités de l’Eglise catholique dans les territoires autonomes.
Dans la soirée du mercredi, le Pape est retourné à Jérusalem pour y passer la nuit et poursuivre dans les jours à venir, son pèlerinage en Terre Sainte, visitant les lieux saints de Jérusalem, ainsi que la ville de Nazareth où une vive polémique avait eu lieu autour de la construction d’une mosquée jouxtant la basilique historique. Le Saint-Siège avait vivement protesté, menaçant même de renoncer à ce voyage.

 Par NELLY HÉLOU

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