Les résultats ont confirmé le succès de la “liste
du changement” que soutenait M. Michel Murr, ministre de l’Intérieur,
aux dépens de la “liste de la décision libre” qu’appuyait
une coalition formée de M. Auguste Bakhos, ancien député
du Metn, le Parti national libéral et le Parti social national syrien
(PSNS).
La liste Murr a obtenu 5.277 voix, contre 1940 à la liste concurrente,
ce qui laisse prévoir, d’ores et déjà, disent les
observateurs, les résultats des prochaines législatives dans
cette circonscription. Car il s’agit d’un indice annonciateur du succès
des formations loyalistes; mais il ne faut pas généraliser.
Le fait pour le PSNS d’avoir soutenu la “liste de la décision
libre”, ne peut être interprété comme une rupture définitive
de ce parti avec M. Murr. De même, le soutien apporté à
la “liste du changement” par les Kataëb, permet de prédire
une alliance possible entre ce parti et le ministre de l’Intérieur
aux élections générales.
Au plan international, l’attention était braquée sur
le troisième sommet que le président Clinton a tenu mercredi
avec Ehud Barak, après avoir conféré précédemment
avec les présidents Hafez Assad et Hosni Moubarak.
La Syrie avait communiqué ses réponses aux questions
que le chef de l’Exécutif US a posées au chef de l’Etat syrien
lors de leur rencontre à Genève, par l’intermédiaire
de l’ambassade des Etats-Unis à Damas. Quant à la teneur
de ces réponses, Patrick Seale croit savoir qu’elles ont porté
sur le lac de Tibériade qui serait maintenu sous la souveraineté
d’Israël, celle de la Syrie devant s’y exercer du côté
nord-est du lac, les autorités syriennes s’engageant à ne
pas y prélever de l’eau et à ne pas le polluer.
En contrepartie, l’Etat hébreu promet d’assurer un passage pour
permettre aux Syriens de s’adonner à la pêche dans le lac
et de l’utiliser à des fins touristiques ou de toute autre nature.
De plus, une commission mixte syro-israélienne élaborerait
un système destiné à garantir les intérêts
des deux pays dans le secteur et à assurer une répartition
équitable des ressources hydrauliques.
De son côté, le Liban avait donné sa réponse
à propos de la décision israélienne relative au retrait
du Liban-Sud, à travers un mémorandum que le président
Emile Lahoud a adressé à M. Kofi Annan, secrétaire
général des Nations Unies, consignant les constantes libanaises
et la position du Liban officiel envers le retrait et l’opération
de paix dans son ensemble.
Le chef de l’Etat y insiste sur la nécessité d’opérer
le retrait (inconditionnel) de “Tsahal” conformément à la
résolution 425 du Conseil de Sécurité, les effectifs
de la FINUL étant appelés à aider l’Etat libanais
à étendre sa souveraineté jusqu’aux frontières
internationalement reconnues.
De plus, Israël doit dédommager le Liban de l’énorme
préjudice qu’il lui a causé depuis 1978, date à laquelle
la 425 a été approuvée et que l’Etat hébreu
a refusé d’appliquer jusqu’ici.
Autre point soulevé par le mémorandum présidentiel:
le problème des réfugiés palestiniens doit être
réglé et leur droit au retour reconnu. Dans ce cas, la présence
armée dans les camps palestiniens du Liban ne se poserait plus,
cette présence que les Israéliens avaient invoquée
de tout temps pour justifier leurs invasions successives du territoire
libanais et leurs raids aériens sur nos infrastructures.
Les observateurs et les analystes considèrent que la réponse
présidentielle à la lettre par laquelle le secrétaire
général de l’ONU a consigné la teneur de son entretien
avec le chef de la diplomatie israélienne à Genève,
est un coup de maître, le président Lahoud y ayant mis les
points sur les “i”, en réfutant les prétextes qu’invoque
Israël pour justifier sa politique belliciste contre ses voisins.
Il a insisté, en particulier, sur la nécessité d’instaurer
une paix juste et globale garantissant les droits de tous les peuples de
la région.
Le mémorandum présidentiel réitère l’attachement
du Liban à l’option de paix, en même temps que ses partenaires
de la Ligue arabe, la Syrie en tête.
Les observateurs attirent l’attention sur le fait qu’en parlant d’un
retrait avec ou sans accord, Israël transgresse la résolution
425 qui exige son retrait immédiat et inconditionnel, dont le mécanisme
est défini par la résolution 426.
M. Larsen, émissaire spécial de M. Annan, a pris connaissance
de la position officielle du Liban et de la Syrie lors de ses entretiens
avec les responsables de ces deux pays.
Après la présentation du mémorandum présidentiel
au secrétaire général de l’ONU qui souligne la nécessité
de régler le problème des réfugiés palestiniens
établis au Liban et dans les autres pays d’accueil, des voix se
sont élevées dans ces camps, dont celle du “colonel” Mounir
Makdah, responsable de Fath, faisant état de l’entraînement
de groupes de combattants, en prévision d’une action anti-israélienne
au Liban-Sud. Et ce, jusqu’à ce que Tel-Aviv reconnaisse leur droit
au retour en Palestine.
Ceci peut amener Israël à reconsidérer sa décision
relative au retrait et en prendre prétexte pour modifier ses plans,
en optant pour celui préconisé par les généraux
de “Tsahal” qui proposent le maintien d’un certain nombre de fortins à
quelques centaines de mètres de la frontière.
De son côté, Sultan Aboul-Aynaine, secrétaire de
Fath, a pris le contre-pied du “colonel” Makdah, alors que le chef de l’Autorité
palestinienne, Yasser Arafat, a proclamé son refus du désarmement
des camps palestiniens, arguant que “la présence armée dans
les camps a été “légalisée” par le sommet du
Caire en 1970”.
Cependant, après les remous suscités par les déclarations
des responsables palestiniens, la tendance est maintenant à l’apaisement.
En effet, il a été demandé aux uns et aux autres,
de s’abstenir de prises de position et d’initiatives pouvant profiter à
Israël.
Le mémorandum présidentiel a, quant à lui, provoqué
des réactions favorables, à commencer par celle du secrétaire
général de l’ONU qui a pris contact avec le chef de l’Etat
et s’est engagé à œuvrer en vue d’instaurer une paix juste
et globale dans la région.
On s’attend que M. Larsen, envoyé spécial de M. Annan,
revienne à Beyrouth après son escale damascène, pour
reprendre avec les responsables libanais, les pourparlers entamés
la semaine dernière. Et ce, à la demande pressante du secrétaire
général.
Pendant ce temps, Israël recourt de nouveau à l’escalade
au Liban-Sud où son artillerie et son aviation attaquent, quotidiennement,
les positions de la Résistance. Les Israéliens ont d’autant
les mains libres, qu’ils refusent de se rasseoir à la table du comité
de surveillance de la trêve issu des arrangements d’avril 96. Ils
exigent que ce comité supervise la mise au point des “arrangements
de sécurité” dans la zone frontalière, afin d’assurer
le retrait de “Tsahal” dans les meilleures conditions, sans courir le risque
d’accrochages avec les “Hezbollahis”.
Cela dit et étant donné l’escalade sur le terrain que
l’Etat hébreu paraît déterminé à entretenir,
les observateurs désespèrent de voir les sommets Clinton-Barak
et Clinton-Arafat déboucher sur quelque résultat concret;
aussi, désespèrent-ils de voir relancer le processus de paix
sous le mandat de l’actuel chef de l’Exécutif américain.
Sur le plan local, les milieux politiques s’emploient à calmer
le jeu, afin de permettre au président Lahoud d’effectuer sa tournée
arabe à partir de la mi-avril dans un climat propice et garant de
son succès.
Toujours au plan intérieur, il y a lieu de signaler le rapprochement
intervenu mardi entre les présidents Hoss et Karamé, alors
que le président Karamé et M. Sleiman Frangié, ministre
de l’Agriculture, ne se sont pas encore réconciliés...