MANIFESTATIONS ESTUDIANTINES EN FAVEUR DE LA LIBERTÉ D’OPINION
LA TENSION À SON PAROXYSME DANS LES UNIVERSITÉS

A plusieurs reprises cette semaine, les étudiants ont manifesté dans la rue à Beyrouth en faveur de la liberté d’opinion, rappelant le mouvement protestataire qui avait été organisé pour le même motif, il y a deux ans, place de l’Etoile.
 

Cette fois, les manifestants voulaient obtenir la libération de neuf étudiants détenus; ils ont été réprimés par la force et une dizaine d’entre eux ont été blessés, certains grièvement. Deux jeunes filles et un jeune homme atteints au dos et au cou ont été admis à l’Hôtel-Dieu. Fait à signaler: les manifestants ont été battus à coups de crosses de fusils mitrailleurs et de matraques par les forces sécuritaires et aspergés d’eau par les pompiers, appelés à la rescousse des FSI... Deux étudiants: Georges Saouma et Tony Harb ont été arrêtés.
Cinq autres devaient être appréhendés. Se réclamant du Courant national libre (aouniste), ils distribuaient des tracts, ce sont: Ziad Abs, Tony Eriane, Tony Otayek, Patrick Samaha, Naïm Aoun, Jean-Paul Dib, Paul et Pierre Bassil, Rabih Maalouli.
Bien que les trois premiers étudiants aient été remis en liberté, le mouvement protestataire n’a rien perdu de sa vigueur. En effet, mardi, près de cinq cents jeunes gens et jeunes filles se sont rassemblés, place du Musée national. Des brassards noirs noués autour du bras ou de la tête, ils scandaient des slogans d’appui à la liberté d’expression. D’autres portaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire des inscriptions réclamant le départ de “toutes les forces étrangères du Liban”.
Après avoir observé un sit-in devant le tribunal militaire, ils ont gagné la caserne Hélou où leurs camarades étaient détenus. Là, la tension est montée d’un cran, les forces de l’ordre ayant sommé les manifestants de quitter les lieux en moins de dix minutes. Mais ceux-ci ont organisé un sit-in de protestation sur place.
Ils devaient être dispersés par la force, les FSI ayant fait appel à l’escouade de pompiers pour les éloigner de la caserne en les aspergeant d’eau.
Première organisation à dénoncer les moyens utilisés par les forces de l’ordre pour réprimer les manifestations estudiantines, l’Association des Nouveaux droits de l’homme, qui a exprimé sa préoccupation,  d’autant que les étudiants n’ont pas menacé l’ordre public.
De plus, elle a déploré l’arrestation de neuf personnes “sans fondement juridique valable” et l’agression contre des journalistes dont le matériel a été confisqué. Enfin, elle réclame la libération des détenus, l’arrêt des poursuites judiciaires à caractère politique et la sauvegarde de la liberté d’expression.
Justifiant la réaction des effectifs des FSI, le Conseil intérieur de sécurité a diffusé un communiqué dans lequel, tout en proclamant son respect du droit de manifester, il soutient “qu’une manifestation ne peut être légale, si elle n’est pas dûment autorisée”.

SIT-IN DEVANT LE PALAIS DE JUSTICE
Tout avait commencé lundi par un sit-in devant le palais de Justice à Beyrouth, pour protester contre l’arrestation de deux étudiants aounistes de l’USEK et présenter au bâtonnier de l’Ordre des avocats une requête réclamant la libération des détenus.
Bravant les représentants de l’Autorité, les protestataires ont distribué en dehors de l’enceinte du palais, des tracts dénonçant les récentes arrestations qualifiées “d’arbitraires”.
Quant au bâtonnier, il a reçu les étudiants et déclaré que le juge Addoum avait promis de libérer tous les étudiants détenus. Il leur a demandé au terme de l’entretien, de se disperser en bon ordre... Ce à quoi ils n’ont pas obtempéré, insistant à rester sur place jusqu’à la libération de leurs camarades.
Il faut relever que, dans la journée de lundi, les cours avaient été suspendus dans certaines universités.

AOUN PRÊT À LA “CONFRONTATION PACIFIQUE”
Par ailleurs, au cours d’une conférence de presse tenue au bureau du CNL, sis à l’immeuble de “La Cité” à Jounieh, où le général (en retraite) Nadim Letayf et Me Nouhad Jabre, représentant l’Ordre des avocats, ont pris la parole pour parler des manifestations estudiantines et des incidents qu’ils ont provoqués, un contact par téléphone a été établi avec le général Michel Aoun qui a dénoncé le comportement de l’Autorité, se disant prêt “à la confrontation par les voies pacifiques, à travers notre droit constitutionnel d’exercer la liberté et de jouir de tous nos droits sur l’ensemble du territoire libanais”.
“Tout Libanais, a dit l’ancien chef du gouvernement militaire, est responsable, moralement et a le devoir de défendre la souveraineté du Liban et son indépendance”.
Puis, le général Letayf a accusé le Pouvoir “de donner des leçons dans le respect des libertés, alors que ses organismes sévissent de la pire manière contre les citoyens pour les empêcher d’exprimer librement leur opinion”.
Me Jabre devait prendre la parole à son tour pour réprouver les procédés auxquels les responsables ont recours, afin de réduire au silence les citoyens qui militent en faveur de la liberté, de la souveraineté du Liban et son indépendance.

CHAMOUN: NON À LA RÉPRESSION
M. Dory Chamoun, leader du Parti national libéral, s’est élevé, quant à lui, contre la manière dont les représentants de l’Autorité répriment les manifestations pacifiques.
“Où est la liberté d’opinion? Que fait-on de la Constitution et qu’en est-il des promesses faites par les gouvernants de préserver la liberté de manifestation?”, a demandé le chef des Libéraux.
 
DIX ÉTUDIANTS CONDAMNÉS À DES PEINES DE PRISON
Aux dernières nouvelles, le tribunal militaire a condamné dix étudiants à des peines de prison de dix jours à six semaines, au motif “qu’ils ont affronté les forces de l’ordre”.

Trois nouveaux sit-in ont été organisés, mercredi, à l’USJ, à l’Université américaine et à la faculté d’information et de documentation de l’U.L. Les étudiants de l’USJ ont brûlé le drapeau syrien et scandé des slogans hostiles à la Syrie, réclamant le retour à “un Liban libre, souverain et indépendant”.
Il faut craindre qu’après le verdict du tribunal militaire, la fronde estudiantine soit relancée, en dépit de la fête de Pâques. 


Home
Home