TOURNÉE EUROPÉENNE EN PERSPECTIVE DU CHEF DE L’ÉTAT

Le délai fixé par Israël pour évacuer le Liban-Sud et la Békaa- ouest avant le 7 juillet approche de son terme. Cela signifie que toute l’action en cours s’inscrit dans ce cadre, les responsables prenant leurs dispositions pour pouvoir faire face à cette échéance et aux surprises désagréables... comme ce fut le cas lors du retrait des Israéliens de la montagne et de l’est de Saïda.

Le retrait israélien a été au  centre de l’entretien que le président de la République a eu lundi dernier, au palais de Baabda, avec M. Farouk Chareh, ministre syrien des A.E., celui-ci ayant fait escale à Beyrouth avant de gagner Paris où il devait transmettre au président Chirac un message verbal du président Assad et conférer avec son homologue français. (Quelques jours plus tôt, le chef de l’Etat français avait eu un entretien au téléphone avec le Premier ministre israélien, Ehud Barak).
En quittant le palais de Baabda, le chef de la diplomatie syrienne a déclaré que les intérêts libanais n’étaient pas en contradiction avec les intérêts syriens. “Quiconque pense le contraire se trompe”. M. Chareh a transmis un message personnel du président Assad à son homologue libanais traitant des développements de la conjoncture régionale.
Cela dit et d’après des sources renseignées, des indices permettent de prévoir une reprise en force des négociations syro-israéliennes, dès que sera assuré le climat propice à leur succès. Les rencontres ayant eu lieu, récemment, entre différentes personnalités et chefs d’Etat corroborent cette information. Damas que le ministre français de la Défense a soupçonné de maintenir ses troupes en territoire libanais, pour faire perpétuer sa mainmise sur le Liban, a donné, cette semaine, la preuve de sa bonne foi en réduisant le nombre des barrages dans la capitale et sur la route de la Békaa.
Le redéploiement des forces syriennes est assez significatif, d’autant qu’il s’est étendu à des secteurs qualifiés de “stratégiques”. Ainsi, la Syrie prouve, une fois de plus, qu’elle n’a aucune visée au Liban.
Dans le même temps, les responsables syriens œuvrent, en coopération avec leurs homologues libanais, aux fins de mettre en échec tout projet israélien visant à semer le trouble dans notre pays et à y compromettre la sécurité, ainsi qu’il est apparu dernièrement, suite à des attentats perpétrés par des éléments séditieux qu’il n’a pas encore été possible d’identifier.

DOSSIERS À TRANCHER
Par ailleurs, plusieurs dossiers ont besoin d’être tranchés dont les suivants:
1 - Le dossier de l’eau sous l’angle du partage du précieux liquide entre les Etats de la région proche-orientale. Il s’agit des ressources du lac de Tibériade, du Golan, du mont Hermon, du Jourdain, des eaux libanaises et de ce que la Turquie est en mesure de fournir.
A ce propos, il y a lieu de signaler la rencontre à Eilat entre le roi Abdallah II de Jordanie et Ehud Barak, au cours de laquelle a été évoqué, notamment, le projet relatif au barrage à construire sur le Yarmouk qui a déclenché la guerre de 1967.
2 - Le problème des réfugiés palestiniens et les projets de solutions proposés pour le résoudre, dont celui suggéré par M. Jean Chrétien, Premier ministre du Canada. Ce dernier a préconisé l’installation des réfugiés au Liban, en Syrie, en Jordanie, en Irak et au Canada. Ce qui a laissé accréditer les nouvelles faisant état de concertations en vue de rendre l’implantation “possible et acceptable”.
3- L’intention prêtée à l’Etat hébreu de conserver tout le territoire de Jérusalem et une partie de Cisjordanie non inférieure à 30 pour cent de la superficie totale, de cette région.
4 - Les tentatives israéliennes de fomenter des troubles au Liban, afin d’assurer le retrait de “Tsahal” avec le minimum de pertes, d’autant qu’il s’agit d’une zone relativement vaste s’étendant de Nakoura au Arkoub.
Selon des rapports officiels, Israël a commencé à démonter certaines installations militaires dans la région frontalière, en prévision de son évacuation, peut-être au moment où on s’y attendrait le moins...

TOURNÉE EUROPÉENNE DE LAHOUD?
D’autre part, on fait état avec insistance d’une tournée que le président Lahoud effectuerait en Europe, après celle du Golfe qu’il a clôturée par une visite à Téhéran et au Caire.
Le nouveau périple présidentiel commencerait par Paris et sa date serait fixée dès le retour de M. Farouk Chareh de la capitale française.
Dans ce contexte, certains pays européens, la France et l’Allemagne en tête, auraient fait part de leur disposition à contribuer à la reconstruction des régions sudistes dévastées par les agressions israéliennes. Le Japon, la Chine et la Malaisie ont également exprimé le désir de participer à cette opération.
Fait à signaler: la visite du chef de l’Etat au Caire a été la seule au terme de laquelle un communiqué commun a été diffusé, consignant la teneur des entretiens. Le président Hosni Moubarak, apprenons-nous, a réitéré sa disposition à fournir au Liban tout ce dont il a besoin dans cette étape délicate, d’autant que l’Egypte entretient de bonnes relations avec toutes les parties concernées par la crise libanaise.
“Nous avons devant nous, devait déclarer le président Lahoud, deux mois difficiles et nous devons nous armer de patience, celle-ci étant exigée dans des étapes déterminées que traversent les nations.”
Le chef de l’Etat a, en conséquence, invité les Libanais à se montrer au niveau de la responsabilité nationale et à resserrer les rangs, pour prémunir leur pays contre tous les dangers qui le menacent et lui assurer un avenir radieux. “Je parie sur la compréhension des citoyens et sur leur attachement à la patrie”, a-t-il conclu.
A Téhéran, le président Lahoud a entendu de l’ayatollah Khamenei, guide de la Révolution iranienne, des paroles élogieuses. De fait, il s’est adressé au chef de l’Etat en ces termes: “Vous êtes le sauveur de l’unité nationale, l’unificateur de l’Armée et le soutien de la Résistance. Vous avez transformé l’institution militaire en une entité nationale prééminente.”
Et d’ajouter: “Notre capacité n’a pas de bornes et nous sommes prêts à aider le Liban.”
Le président de la République a, au cours de toutes ses rencontres avec les dirigeants des pays qu’il a visités, explicité la position du Liban de tous les problèmes auxquels il est confronté, notamment, celui que pose la présence militaire syrienne. Il a assuré que “cette présence est légale, provisoire et sera traitée de manière à servir nos intérêts et non ceux d’Israël.”
De plus, il a dénoncé l’action menée par l’opposition établie à l’étranger, sans la citer nommément, disant qu’elle avait fomenté, dans le passé, des “conflits intercommunautaires”.
Dès sa rentrée, le président Lahoud a conféré, longuement, avec le président Salim Hoss à propos des derniers développements survenus au plan intérieur durant son absence. Et ce, afin de rasséréner l’atmosphère et d’empêcher tout dérapage, dont Israël pourrait tirer profit. Décision a été prise d’inscrire à l’ordre du jour du Conseil des ministres la question de la sécurité intérieure et les moyens à prendre pour la consolider.
D’ores et déjà, le Conseil central de sécurité applique des mesures destinées à prévenir toute atteinte à la stabilité interne.
Dans le même temps, le président Lahoud se soucie de consolider la situation financière, affirmant que “la monnaie nationale est bien tenue et protégée au double plan de la Banque Centrale et du système bancaire”. Et tout en admettant que la situation économique a besoin d’être traitée rapidement, il ne manque pas de faire état d’un plan que le gouvernement s’emploie à appliquer pour la redresser.
D’ailleurs, le cardinal Sfeir y a fait allusion dans son message pascal, tout en affirmant devant une délégation du CNL (aouniste) que la liberté se termine là où commence celle des autres. “Nous devons être tous libres dans le cadre de la loi”, a-t-il conclu.
Mgr Elias Audé, métropolite de Beyrouth a, également, mis l’accent dans son homélie dominicale sur la nécessité de sauvegarder la liberté d’opinion et de ne pas sévir contre les jeunes au risque de les contraindre à s’expatrier.

NADIM EL-HACHEM

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