Ce volume de cinq-cent pages est consacré aux articles parus
en 1957, année qualifiée de “tournant”. C’est, en effet,
l’année de la “Doctrine Eisenhower” par laquelle les Etats-Unis
prenaient officiellement et nettement la succession de la Grande-Bretagne
et de la France, comme puissance dominante en Proche-Orient.
Après la lamentable équipée anglo-franco-israélienne
de 1956 sur le Canal de Suez, Eisenhower appelait le monde arabe à
se regrouper pour affronter la menace communiste avec l’aide de l’Amérique
tout en lui promettant des efforts accrus pour une paix arabo-israélienne.
C’était aussi l’année, sur le plan libanais, des élections
législatives conçues pour préparer le renouvellement
du mandat du président Camille Chamoun et qui, en définitive,
devaient aboutir à l’insurrection de 1958 suivie de l’arrivée
au pouvoir du général Fouad Chéhab, dont le sexennat
n’aura été qu’une parenthèse dans le cours de l’histoire
mouvementée de la République libanaise.
1957, qui était inaugurée par l’appel d’Eisenhower au
regroupement du monde arabe sous l’égide des Etats-Unis, aura été
ainsi une étape décisive des divisions: sur le plan régional,
entre Syro-Egyptiens et Hashémites, les premiers bientôt réunis
en une République Arabe Unie et les seconds, également, unifiés
mais bientôt bouleversés par la révolution irakienne.
Sur le plan libanais: par une cassure que le mandat du président
Chéhab n’a pu que masquer jusqu’à son tragique rebondissement
en 1975.
Les articles de René Aggiouri de cette époque, nous permettent
de suivre au jour le jour cette histoire troublée d’un Proche-Orient
embrigadé dans la guerre froide Est-Ouest, alors que ses dirigeants
étaient braqués sur le seul conflit de Palestine dont la
relance, dix ans plus tard, aura des conséquences qu’on n’a pas
fini, encore aujourd’hui, d’essayer de surmonter toujours sous la direction
de l’Amérique.
En publiant ce recueil d’éditoriaux de René Aggiouri,
M. Georges Farchakh a pris un pari et il nous annonce, dans un “avant-propos”,
qu’il compte bien récidiver en préparant d’ores et déjà
l’édition de nouveaux recueils consacrés à d’autres
années de la longue collaboration de leur auteur au journal “L’Orient”.
Le prochain volume sera consacré à l’année 1967.
C’est une courageuse et précieuse contribution à la connaissance
de l’histoire vécue du Proche-Orient contemporain. C’est ainsi que
la jugent, dans leurs présentations de ce premier recueil, l’ambassadeur
Camille Aboussouan et l’écrivain Jamil Jabre.