CONCERTATIONS LIBANO-SYRIENNES ET
PRIVATISATION SUR FOND DE RAIDS ISRAÉLIENS

La région dans son ensemble paraît engagée dans une course contre la montre: les prises de position, les déclarations et contre-déclarations se succèdent souvent différentes, voire contradictoires.

Ainsi, le Premier ministre israélien, Ehud Barak qui avait annoncé le retrait de ses troupes avant le 7 juillet, semble devoir les rapatrier un mois à l’avance. De fait, moins de vingt-quatre heures après avoir évacué Chayar Azour, “Tsahal” et l’ALS se sont retirés de Aramta et on dirait que le retrait doit s’effectuer par étapes. On s’attend que d’autres localités sudistes, notamment Bir Kallab et Rihane soient évacuées incessamment et si tout se déroulait à ce rythme, le retrait serait accompli totalement le 7 juin prochain, soit un mois avant la date fixée par Barak. Au plan politique, la séance parlementaire de mardi et mercredi, en dépit du débat enfiévré qui y a été institué, n’a pas éclipsé la scène sudiste et ce qui s’y passe.
Cependant, le projet relatif à la privatisation a suscité des réactions variées, certains ayant émis des réserves partant de leurs craintes que ce système se répercute, négativement, sur la situation économique citant, à titre d’exemple, les secteurs des télécommunications et du cellulaire. Le président Berri a promis d’instituer un autre débat sur la question le 23 mai prochain.

PRIVATISATION
D’ores et déjà, le gouvernement a été contraint de revenir à la Chambre pour chaque cas de privatisation, afin de recevoir son feu vert.
En plus de ce projet, l’Assemblée nationale a ratifié trente-trois autres, le plus important habilitant le gouvernement à engager des magistrats parmi les membres du Barreau ayant à leur actif plus de huit années d’activité, ainsi que le projet réorganisant le secteur de l’eau.
Parmi les questions évoquées lors de l’heure réservée aux problèmes d’ordre général, la dégradation de la situation au Liban-Sud et la nécessité de consolider le front intérieur pour qu’il puisse faire face, avantageusement, aux prochaines échéances, ont figuré en tête de liste.
Cependant, les parlementaires n’ont pas fait état du retrait de “Tsahal” et de l’ALS du village d’Aramta après vingt ans d’occupation, sans doute, parce qu’ils n’en avaient pas été informés.
Un membre en vue du parlement, commentant les développements de la conjoncture, constate que “l’avenir de l’opération de paix commence à devenir problématique” et qu’il n’est plus possible d’émettre la moindre prévision en ce qui concerne l’éventuelle relance des négociations sur le volet syrien.
Il y a lieu de signaler qu’Israël cherche à détourner l’attention de ce processus et à créer une diversion en soulevant le problème des fermes de Chébaa - revendiquées par le Liban - en le rattachant à l’affaire du Golan. Et ce, dans l’intention de le rendre encore plus complexe et d’en faire l’objet d’un “bazar” avec Beyrouth et Damas. Les Israéliens semblent devoir faire de Chébaa un autre “Taba”, comme ce fut le cas de l’enclave égyptienne, les pourparlers à son sujet ayant nécessité des mois avant d’être tranché.

QUID DES LÉGISLATIVES?
Le même parlementaire estime que les législatives, initialement fixées au mois d’août, seraient tributaires du retrait israélien et de ses développements sur le terrain. Mais cela n’empêche pas les candidats de poursuivre leurs contacts et de préparer leur campagne électorale.
Le chef du Législatif qualifie l’étape actuelle de “difficile”. Sa coterie lui attribue des propos dont il ressort que le Liban se trouve au début du chemin, en ce qui concerne le retrait israélien.
Le président Nabih Berri estime que “les fermes de Chébaa constituent le titre de sa nouvelle bataille”, cette dernière ayant débuté dès le moment où le vice-ministre israélien de la Défense a mis en doute la justesse du tracé des frontières libanaises. Et ce, à l’effet d’occulter l’occupation progressive de ces fermes qui s’est opérée en huit étapes depuis 1967 et jusqu’en 1989.
M. Berri a entrepris de recueillir des documents confirmant que ces fermes font partie intégrante du territoire libanais. Aussi, a-t-il reçu une délégation des habitants de cette localité qui lui ont remis des titres de propriété attestant son point de vue.

LE CAS DE CHÉBAA
Le président du parlement attache d’autant plus d’importance à la campagne israélienne dans ce domaine, que cette zone est riche en produits agricoles et en ressources hydrauliques, au point qu’elle est appelée le “triangle de diamant”. De plus, Israël y a aménagé des centres touristiques et de sports d’hiver, en plus d’un centre d’écoute et d’observation.
Pour ces raisons, le Liban réaffirme son attachement aux fermes de Chébaa, car dans le cas contraire et si l’Etat hébreu refusait de les restituer, le retrait de “Tsahal” serait incomplet, ce qui justifierait la poursuite par la Résistance de ses opérations anti-israéliennes.
M. Berri a promis de mettre à la disposition de l’ambassadeur US, M. Satterfield qui s’informait à ce sujet, des documents authentifiés prouvant l’appartenance de Chébaa au Liban.
Par ailleurs, la diplomatie libanaise s’est activée, une fois de plus, pour dénoncer d’éventuels raids que l’aviation israélienne effectuerait contre d’autres objectifs civils, après ceux des sous-stations électriques de Bsalim et de Bared.
A ce propos, le président Hoss a reçu de Mme Madeleine Albright, un message dans lequel elle condamne “tous ceux qui s’attaquent aux objectifs civils”, sans distinguer entre la victime et l’agresseur.
Les autorités s’arrêtent au pilonnage de la route Beyrouth-Damas à la hauteur de Taanayel, le considérant comme un “message adressé à la Syrie, pour qu’elle fasse pression sur le Hezbollah” afin de le mettre en garde contre le lancement des katiouchas sur la partie nord d’Israël.
La diplomatie libanaise est parvenue, en l’espace de quelques heures ayant suivi la nouvelle agression israélienne, à obtenir une solidarité arabe et internationale avec le Liban face à l’Etat hébreu.
En effet, des instances internationales ont dénoncé les attaques israéliennes et le Conseil de la Ligue arabe, siégeant à l’échelon des délégués permanents, au Caire, a confirmé les recommandations adoptées le 10 février par les ministres arabes des Affaires étrangères réunis dans la capitale libanaise, appelant les pays membres à suspendre toute tentative de normalisation avec Tel-Aviv et à ne plus participer aux négociations multilatérales.
De son côté, le président de la République a attiré l’attention sur le fait que l’agression israélienne vise à empêcher l’application de la résolution 425, disant que “les forces d’occupation ne savent plus comment sortir de leur mauvais pas. Elles veulent nous soumettre en partant, mais elles n’y réussiront pas.”
Aussi, le chef de l’Etat a-t-il réitéré “le droit de la Résistance à poursuivre son action, tant que l’occupant n’aura pas évacué le dernier pouce du territoire national”, tout en se félicitant de “la position arabe unifiée en faveur du Liban”.
Quant au président Hoss, il a réaffirmé que “les agressions ennemies n’affecteront nullement la détermination de notre peuple à poursuivre la lutte, ni à renoncer à nos constantes nationales que nous avons notifiées au représentant du secrétaire général des Nations Unies.”
Pendant ce temps, Damas maintient le contact avec Beyrouth, dans le cadre de la coordination de leur position face à Israël. Dans ce contexte, le président du Conseil a reçu un appel téléphonique de son homologue syrien, M. Mohamed Miro et de M. Farouk el-Chareh, chef de la diplomatie syrienne, qui l’a mis au courant de la teneur des pourparlers entre les présidents Assad et Moubarak au Caire. D’autre part, il y a lieu de faire mention de la “lettre ouverte” que le général Antoine Lahad, commandant de l’ALS, a adressée au président Lahoud, dans laquelle il lui demande d’amnistier les effectifs de son “armée”, en se disant responsable de toutes les opérations que ces derniers ont entreprises sous son commandement.
La réponse est venue du président Hoss qui a conseillé à Lahad de se livrer à la Justice libanaise, disant qu’elle le jugera “avec transparence et équité, conformément aux lois en vigueur”.

N.B.

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