EN DÉPIT DE L’ESCALADE AU SUD
VERS LA REPRISE DES NÉGOCIATIONS SYRO-ISRAÉLIENNES AVANT FIN MAI?

Le dossier des fermes de Chébaa reste le plus chaud, non seulement depuis une semaine, mais dès le moment où le président Nabih Berri a soulevé cette affaire il y a près de deux mois. Ce jour-là, le chef du Législatif a dit, en substance: “Nous ne considèrerons pas le retrait israélien comme ayant été accompli, si un pouce de notre territoire est occupé, spécialement les fermes de Chébaa”.
 

Les fermes de Chébaa: Nouvelles 
préoccupations pour la diplomatie libanaise.

5.000 nouveaux soldats français au Sud.

Le président de la Chambre a, également, soulevé cette question en inaugurant le congrès pour l’évolution de l’action parlementaire arabe ayant tenu ses assises, cette semaine à Beyrouth. “Le Liban et les Nations Unies, a-t-il déclaré, sont des jumeaux dans l’application de la résolution 425. Je mets en garde contre le piège israélien qui vise à brouiller notre pays avec l’organisation internationale. Mais ce piège ne passera pas, car nous continuerons à combattre Israël et poursuivrons notre résistance en faveur des fermes de Chébaa, sans porter atteinte à la dignité de l’ONU et à ses forces que nous considérons comme faisant partie de notre combat en vue de la libération”.

CHÉBAA AU CENTRE DES PRÉOCCUPATIONS OFFICIELLES
Ces fermes restent au centre des préoccupations de la diplomatie libanaise qui s’emploie à confirmer leur appartenance au Liban, alors que les Israéliens cherchent à lier ce dossier avec celui du Golan, afin de ne pas évacuer cette zone sur la base de la résolution 425 et, aussi, pour utiliser cette carte face à la Syrie.
Le Liban a découvert de nouveaux documents attestant, faits, dates et chiffres à l’appui, que Chébaa a toujours fait partie intégrante du territoire libanais. Ces pièces justificatives, le président Salim Hoss les a fait parvenir à M. Kofi Annan, secrétaire général de l’ONU. Il s’agit, notamment, des procès-verbaux de deux réunions tenues par deux délégations libanaise et syrienne en 1964 et 1967, pour débattre du dossier de Chébaa. Les deux parties y consignent leur accord autour du tracé de la frontière entre les deux pays.
Dans le même temps, le chef du gouvernement rencontrait les ambassadeurs des pays membres permanents du Conseil de Sécurité, pour leur exposer la situation à Chébaa. Le président Hoss qui a remis aux diplomates des documents appuyant ses assertions, a touché du doigt la compréhension de ses interlocuteurs qui se sont engagés à soutenir le point de vue libanais devant les instances internationales.
Le gouvernement libanais, apprenons-nous, a fait part aux Nations Unies, par l’intermédiaire de sa mission permanente à New York, de son opposition au report de l’examen du dossier de Chébaa, à la demande de la partie israélienne. Tout en exigeant le retrait israélien de cette zone en application de la résolution 425.
 

Nabih Berri: Le retrait israélien est 
incomplet sans Chébaa.

Salim Hoss: Des pièces justificatives 
et des procès verbaux des années 60.

LA VISITE DE HAIN À BEYROUTH
Devant M. Peter Hain, ministre d’Etat britannique pour les Affaires extérieures, les responsables libanais ont exposé la position officielle envers l’affaire de Chébaa et mis en garde contre les manœuvres de l’Etat hébreu visant à induire l’opinion publique en erreur. De plus, ils ont rappelé les constantes libanaises, dont ils ne dévieront jamais.
Dans ce contexte, le président de la République a réaffirmé “l’attachement du Liban à l’application inconditionnelle de la 425, ce qui exige la récupération de notre souveraineté sur l’ensemble du territoire national y compris les fermes de Chébaa”.
Et d’ajouter: “La paix juste, globale et durable au Proche-Orient, ne peut être instaurée sans le retrait total des forces israéliennes et la reconnaissance du droit de retour à leur terre des réfugiés palestiniens”.
Le ministre d’Etat britannique a, quant à lui, invité toutes les parties à soutenir le Liban dans l’action intensive qu’il mène en vue d’une paix juste et de la stabilité dans la région tout entière après le retrait israélien.
De son côté, le président Berri s’est adressé en ces termes à une délégation comprenant des représentants des clubs et associations de Jezzine: “Les fermes de Chébaa constituent une partie intégrante du territoire libanais. Nous ne transigeons pas à son sujet et la Résistance se poursuivra contre Israël si ce dernier n’évacue pas Chébaa”.
A ce propos, il y a lieu de mentionner les nouveaux documents que le président Hoss a envoyés à M. Kofi Annan, alors que le secrétaire général de l’ONU recevait le rapport de M. Terjé Roed-Larsen, son émissaire spécial au Proche-Orient, consignant la teneur et les résultats de ses entretiens à Damas, Beyrouth et Tel-Aviv.
Le Conseil de Sécurité prendra connaissance lundi prochain de ce rapport, sur la base duquel il se prononcera sur la formule destinée à trancher un nouveau conflit sur un dossier aussi contesté.
Fait à signaler: la diplomatie syrienne s’est portée à la rescousse de la diplomatie libanaise. En effet, dans une communication téléphonique avec M. Annan, M. Farouk Chareh, ministre syrien des A.E., lui a assuré que les fermes de Chébaa ont été de tout temps sous la souveraineté libanaise jusqu’à leur occupation en 1967 par les Israéliens.
M. Chareh devait informer le président Hoss de son entretien avec le secrétaire général de l’ONU et réitérer l’appui de Damas à la position libanaise.
Un porte-parole du ministère syrien des A.E. a précisé, à ce sujet, que M. Chareh a mis l’accent au cours de son entretien avec M. Annan, sur le rôle que les Nations Unies sont appelées à jouer dans l’application de la résolution 425. Tout en réaffirmant la disposition de la Syrie à faciliter la tâche de l’ONU au plan du retrait israélien du Sud libanais. Enfin, il a affirmé qu’aucun litige “territorial” n’a jamais opposé le Liban à la Syrie.
 

Larsen: Un rapport détaillé à l’ONU.

Chareh: “Pas de litige territorial 
avec le Liban”.

FLAMBÉE DE VIOLENCE AU SUD
Tout en poursuivant son abandon de certaines positions dans la région frontalière, Israël continue à pilonner les villages sudistes, prenant pour cible, une fois de plus, des objectifs civils, telle l’école de Arab Salim où plusieurs écolières ont été blessées et des institutions médicales, notamment le dispensaire de cette localité.
Pendant ce temps, des rumeurs persistantes propagées par des sources renseignées, annoncent une éventuelle reprise des négociations syro-israéliennes “avant la fin du mois courant”. Et ce, suite à des concertations menées par Washington auprès de Damas et de Tel-Aviv.
Tous ces faits ont été au centre des délibérations du Conseil des ministres hebdomadaire, lequel s’est arrêté à des informations dont il ressort qu’Israël tient à opérer le retrait de ses forces du Sud “d’une manière calme et ordonnée”.
A ce propos, le Liban commence à recevoir des “conseils” de la part de différentes instances lui recommandant de “geler” le dossier des fermes de Chébaa jusqu’après le retrait israélien, mais les responsables y opposent une fin de non recevoir et exigent d’Israël d’évacuer les fermes en même temps que les autres tronçons qu’il occupe, illégalement, dans la partie méridionale du pays.
Par ailleurs, la France semble devoir jouer un rôle prééminent au plan des négociations de paix. A cet effet, elle multiplie les contacts avec les différentes parties.
Il serait question même de joindre aux forces internationales stationnées au Liban-Sud, cinq mille soldats français après le retrait, ce qui permettra à Paris de consolider sa position dans la région proche-orientale, d’autant que la France entretient d’excellents rapports avec Damas. De fait, le président Chirac a fait parvenir au Dr Bachar Assad, par l’entremise d’un ami commun, un message dans lequel il souligne le rôle que le fils du chef de l’Etat syrien est en mesure de jouer dans le cadre de l’opération de paix.
A ce propos, on apprend de sources fiables, que la France et les Etats-Unis ont retardé le retrait israélien jusqu’en juin, alors qu’il aurait dû intervenir en mai.
Et ce, dans l’espoir d’une relance des négociations de paix sur le volet syrien, ce qui rendrait possible le retrait sur base d’un accord et garantirait le déroulement de cette opération en douceur.

AUTOCENSURE?
Sur un autre plan, il y a lieu de faire état de la nouvelle “polémique” ayant opposé, ces derniers jours, le président Hoss à M. Rafic Hariri. En effet, le chef du gouvernement a demandé au ministre de l’Information de prendre les mesures prévues par la loi, à l’effet de mettre un terme à la campagne menée par la télévision “Al-Moustakbal” (Future Television) “qui diffuse des nouvelles et des commentaires ayant effarouché les investisseurs arabes et étrangers”.
Une réunion a été tenue, à cet effet, par le ministre de l’Information, les présidents des Ordres de la Presse et des journalistes et le président du Conseil national de l’Information, au cours de laquelle il a été décidé de traiter cette affaire avec le souci de préserver les libertés publiques, tout en veillant à sauvegarder l’intérêt supérieur de la nation dans cette étape particulièrement délicate.

NADIM EL-HACHEM

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