APRÈS LE RETRAIT ISRAÉLIEN
LE LIBAN DÉTERMINÉ À RÉCUPÉRER LES FERMES DE CHÉBAA

Comme est tombé le mur de Berlin, après l’effondrement de l’ex-Union soviétique et comme les troupes américaines sont sorties de Saigon sous la pression et les coups assénés par la résistance vietnamienne, de la même manière s’est déroulé le retrait israélien du Liban-Sud les 21, 22, 23 et 24 mai, “l’armée israélienne “invincible” ayant cédé sous les coups de la Résistance.

L’opération s’est effectuée avec une telle précipitation, que les journaux parus le matin, étaient largement dépassés dans l’après-midi. Face à cette situation, tous les Libanais, des gouvernants aux citoyens ordinaires, se sont comportés avec responsabilité à tous les niveaux.
Et le discours du président Nabih Berri qui est, aussi, chef de “Amal”, n’a pas eu son pareil. De même que la harangue de Sayed Hassan Nasrallah, secrétaire général de la Résistance plus proche dans ses termes du responsable que du résistant.
Ceci a amené la résistance, à se comporter d’une manière exemplaire après le retrait israélien; aussi, n’a-t-on eu à déplorer aucun incident, “ni aucune gifle”, comme ce fut le cas, précédemment, à Jezzine.
“Il est demandé, aujourd’hui, a dit le président Berri, de liquider l’occupation, non de procéder à des règlements de comptes”. Et encore: “Le Liban tentera de récupérer les fermes de Chébaa par la voie diplomatique et s’il ne réussit pas, il aura recours à la résistance.” De plus, le chef du Législatif a rassuré les habitants de Marjeyoun et d’Aïn Ebel, en révélant que, dans leur majorité, “les membres de l’Armée du Liban-Sud étaient des musulmans.” De son côté, Sayed Nasrallah a invité les éléments de la milice lahdiste à se livrer à l’Armée, en assurant que rien ne devait leur faire peur, car ils seront jugés selon la loi libanaise, avec transparence et équité. En tout cas, l’aube du 24 mai constitue un tournant et une marque distinctive dans l’histoire du Sud et du Liban. Ce matin-là,  à 7 heures, le dernier soldat israélien quittait notre territoire; cette date ne sera jamais oubliée.
Les forces d’occupation avaient évacué la citadelle de Chékif, Aïchié et Marjeyoun, ultime étape du retrait, lequel a été accompagné comme toujours par les bombardements criminels de l’ennemi. Après le retour du Sud au giron de l’Etat, le cas des fermes de Chébaa a besoin d’être élucidé, car elles semblent devoir être maintenues sous la férule de l’occupation jusqu’à une date indéterminée. Mais la Résistance est résolue à reprendre la lutte jusqu’à libérer le dernier pouce de notre territoire. Le secrétaire général du “Hezbollah”, l’a affirmé, en y ajoutant une autre condition: la libération des Libanais détenus dans les geôles israéliennes. Le retrait de “Tsahal” avait commencé dans le secteur ouest, sans qu’on ait eu à signaler le moindre incident. Ceci a été facilité par la capitulation en grand nombre des effectifs de l’ALS, ceux-ci s’étant livrés directement à l’Armée ou par l’intermédiaire du “Hezbollah” ou de “Amal”. Dans le secteur oriental, les positions stratégiques ont été également évacuées sans accroc, notamment la citadelle de Chékif, Marjeyoun-Kleyha, le secteur proche de Chébaa, la zone ainsi évacuée ayant représenté dix pour cent de l’ensemble du secteur occupé. Le Conseil des ministres a tenu mardi une réunion extraordinaire, pour prendre connaissance de la situation sur le terrain et examiner l’action à entreprendre dans les villages sudistes pour satisfaire les besoins de la population. A cet effet, une commission ministérielle a été constituée sous la présidence de M. Michel Murr, ministre de l’Intérieur qui, après avoir mis au point son plan d’action, a tenu hier jeudi une séance de travail à Nabatieh où elle a examiné l’application d’un programme visant à réaliser des projets d’utilité publique pour assurer l’eau, l’électricité, les routes et le téléphone aux localités libérées après un quart de siècle d’occupation. Entre-temps, des contacts intensifs étaient effectués avec les hauts responsables autour de l’étape d’après le retrait. Ainsi, le président Lahoud a reçu des communications téléphoniques du président Jacques Chirac, de M. Kofi Annan, secrétaire général des Nations Unies et de Mme Madeleine Albright, secrétaire d’Etat US. M. Annan a annoncé le retour à Beyrouth de son envoyé spécial, M. Terjé Roed-Larsen, accompagné d’une équipe d’experts et d’un cartographe, à l’effet de s’assurer de la bonne application des résolutions 425 et 426. En fait, le Liban insiste pour que la FINUL s’acquitte de sa mission, telle que définie par ces deux résolutions. Elle consiste, notamment, à aider l’Autorité libanaise à étendre sa souveraineté à l’ensemble du territoire national. L’émissaire onusien sera interrogé, notamment, sur les raisons ayant amené M. Annan à ignorer les documents authentifiés que lui a adressés le gouvernement Hoss, prouvant que les fermes de Chébaa font partie intégrante du territoire libanais. Il y a lieu de signaler qu’avant de se retirer, les Israéliens ont multiplié les actes vils, en tirant sur les civils et en laissant traîner des engins meurtriers qui ont explosé dès qu’une personne les touchait. Ceci a fait plusieurs victimes et blessés. La Résistance a déclenché une seconde opération contre trois positions ennemies à Chébaa, blessant un soldat israélien; il s’agit de celles de Tal Seddaneh, de Jabal el-Rouss et de “Marsad Chébaa” (l’observatoire). Le président Emile Lahoud n’a pas manqué de féliciter l’Armée libanaise et la Résistance, ainsi que le peuple libanais tout entier, pour cette victoire sur Israël. En recevant une délégation d’Aramta, le chef de l’Etat a rassuré les Sudistes, en promettant des jours paisibles et heureux, contrairement à ce que prédisent certains sceptiques et pessimistes ayant perdu la foi dans la patrie et les aspirations de ses fils. “N’ayez pas peur, a dit le président de la République à la délégation d’Aramta, car vous êtes redevenus partie de l’Etat. Seuls ceux qui ont porté les armes seront poursuivis et jugés avec transparence et équité, selon les lois libanaises”.
Cependant, il a ajouté que le retrait ne signifiait pas l’instauration d’une paix juste et globale, celle-ci exigeant la récupération de toutes les portions non encore libérées du territoire national, les fermes de Chébaa en tête. “Il faut, également, obtenir la libération des Libanais détenus dans les geôles israéliennes, assurer le droit de retour aux réfugiés palestiniens et forcer l’Etat hébreu à évacuer le Golan jusqu’à la ligne du 4 juin 1967.” Le président Lahoud a fait état de l’aide syrienne, disant que “la Syrie a contribué à la réalisation de la victoire”.
De leur côté, les présidents Berri et Hoss ont multiplié les contacts avec les milieux officiels et civils qualifiés, pour prévenir toute perturbation dans l’opération du retrait. Les chefs du Législatif et du gouvernement ont félicité les Sudistes et les Libanais, en promettant de tout mettre en œuvre pour reconstruire les villages libérés et satisfaire leurs besoins en eau, électricité, téléphone, routes et dans le domaine sanitaire.
Aux députés qu’il a reçus, le président Hoss a dit: “La patrie tout entière vit la joie de ces journées glorieuses de son Histoire”. Au cours d’un entretien téléphonique avec le secrétaire général de l’ONU, le président du Conseil a échangé les vues avec M. Kofi Annan, sur la situation qui prévaut sur le terrain après le retrait israélien. M. Hoss a informé son interlocuteur de son intention de déposer une plainte contre l’Etat hébreu au Conseil de Sécurité, pour les attaques que ses troupes ont déclenchées contre les populations civiles sudistes au moment de leur départ. Et ce, suite à l’impossibilité pour le groupe de contrôle d’avril, issu de l’arrangement d’avril, de se réunir. Cela dit, il importe de préciser que le Liban est déterminé à poursuivre son action aux fins de récupérer les hameaux de Chébaa, en dépit de l’avis défavorable émis à ce sujet par le secrétaire général de l’ONU. A ce propos, il importe de faire état du document exhibé, dernièrement par le président Berri confirmant la “libanité” de Chébaa: il s’agit d’une carte établie par le Pentagone en 1976, montrant les fermes de Chébaa à l’intérieur du territoire libanais. Cette carte, M. Berri en a fait parvenir des copies aux présidents Lahoud et Hoss, ainsi qu’aux ambassadeurs des pays membres du Conseil de Sécurité, pour qu’ils la communiquent à leurs gouvernements respectifs.

NADIM EL-HACHEM

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