DES FUNÉRAILLES OFFICIELLES ET POPULAIRES IMPRESSIONNANTES

La Syrie a tourné une page de son histoire en rendant un ultime hommage à son chef et leader Hafez Assad. Mardi 13 juin, ses obsèques nationales et populaires auxquelles ont pris part des représentants du monde entier, ont débuté peu avant huit heures à Damas pour s’achever, au coucher du soleil, à Qordaha, sa ville natale, où la dépouille a été inhumée dans le mausolée où repose son fils aîné, Bassel et sa mère.

Tôt le matin, le cercueil a quitté la maison familiale à Damas, recouvert du drapeau syrien et porté par des officiers supérieurs il est placé sur un affût de canon. Le Dr Bachar, entouré de ses deux frères, Majed et Maher, de hauts dignitaires et responsables syriens, mène le deuil. Le convoi funèbre avance dans les rues de la capitale, au milieu d’une foule estimée à des centaines de milliers de personnes - un million et demi d’âmes, selon certains - pleurant et criant de douleur. La marée humaine culmine place des Omayyades au cœur même de la cité où les Syriens ont afflué des quatre coins du pays. On observe plusieurs scènes d’évanouissement dues à l’intensité de la souffrance mais, aussi, à la chaleur, la température étant de 35Þ.
Le cortège gagne, ensuite, le palais du Peuple, situé quelque peu à l’extérieur de Damas, sur un promontoire très dégagé dominant la ville. Ce palais très luxueux, tout en marbre, boiseries damasquinées avec des lustres en cristal et des tapis persans, a été édifié par le président Assad. Dans ce palais, nouvellement inauguré, a eu lieu le 10 mai 1991, la signature du traité de fraternité et de coopération entre Beyrouth et Damas.
 

Le général Assad recevant les 
condoléances des présidents Chirac...

... Et le président égyptien.

DES DÉLÉGATIONS DE HAUT RANG, AUX CONDOLÉANCES
Au palais du Peuple, les délégations arabes et étrangères se recueillent devant la dépouille d’Assad et présentent les condoléances à son héritier politique, aux membres de la famille et aux hauts responsables syriens.
Le Liban officiel, politique, religieux afflue à Damas pour la circonstance. Le président Emile Lahoud, les chefs du Législatif et du gouvernement, MM. Nabih Berri et Salim Hoss se tiennent auprès de Bachar Assad jusqu’au soir.
Le monde arabe est représenté à de très hauts niveaux par le président égyptien Hosni Moubarak, le roi Abdallah II de Jordanie, le prince héritier Abdallah d’Arabie saoudite, l’émir du Koweit... On note, également, la présence des présidents iranien, algérien, yéménite, soudanais, turc, arménien,... du chef de l’Autorité palestinienne.
Du côté occidental, le président français Jacques Chirac est le seul chef d’Etat à se rendre à Damas, voulant ainsi, souligner les liens particuliers liant la France à la Syrie.


G.D.: MM. Farouk Chareh, les présidents Salim Hoss et Emile Lahoud, Bachar Assad, le président Nabih Berri et Nasri Khoury.

Le président Bill Clinton, se fait représenter par son secrétaire d’Etat Madeleine Albright. Elle a un aparté avec le Dr Bachar et en quittant le palais du Peuple, elle déclare: “Je suis encouragée par la volonté du président désigné de suivre la voie tracée par son père, qui, a-t-elle rappelé, a pris une décision stratégique en faveur de la paix”. Le chef de la diplomatie américaine ajoute: “Bachar est apparemment très déterminé. C’est quelqu’un qui est prêt à accomplir son devoir”.
La Grande-Bretagne est représentée par M. Robin Cook, son secrétaire au Foreign Office; l’Allemagne, par son ministre des A.E. et, la Russie, par le président de la Douma.
 

... Et Lahoud.

Avec l’Emir du Koweit...

LE DERNIER VOYAGE
Vers 15h30, le cercueil est porté du palais du Peuple jusqu’à l’aéroport de Damas et, de là, par avion jusqu’à l’aéroport Bassel Assad à Lattaquieh. Placée à nouveau sur un affût de canon, la dépouille prend le chemin de Qordaha où l’émotion sera encore plus vive qu’à Damas. Les rues sont noires d’une foule venue rendre un dernier hommage à son président. Le cortège se dirige vers la mosquée Naïssa (nom de la mère de Hafez Assad) à la coupole bleue où sont récitées les prières rituelles. Hafez Assad est, ensuite, inhumé au mausolée où repose son fils aîné Bassel, mort accidentellement en 1994.
 
LA FJA REND HOMMAGE AUX QUALITÉS DE LEADER ET DE MILIANT INTRÉPIDE DE ASSAD

En sa qualité de vice-président de la Fédération des journalistes arabes (FJA), M. Melhem Karam, président de l’Ordre des journalistes, a reçu de MM. Ibrahim Nafeh et Salaheddine Hafez, président et secrétaire général de la FJA, le texte d’une déclaration par laquelle ils annoncent le décès du regretté président Hafez Assad, “au terme d’une vie politique active et une lutte nationale exemplaire”.

“Jusqu’au dernier instant de sa vie, ajoute la déclaration, le président Assad a été un défenseur acharné et un combattant intrépide luttant en vue de réaliser les nobles objectifs arabes, de faire face à l’agression sioniste et à l’hégémonie internationale.
C’est pourquoi, il a bénéficié tout au long de sa présence au Pouvoir, d’un large soutien arabe et a assuré à la Syrie une place de choix sur la carte politique arabe et internationale.
Nous implorons à son intention la miséricorde du Créateur aspirons à voir la Syrie se maintenir dans sa position de premier plan, tout en jouissant du respect, de l’affection et de la stabilité.” 


Le dernier hommage de Mme Albright 
au président syrien.
LES CONDOLÉANCES DE L’ORDRE DES JOURNALISTES AUX DIRIGEANTS SYRIENS

A la tête d’une délégation du conseil de l’Ordre des journalistes, M. Melhem Karam s’est rendu mardi matin à Damas où il a présenté les condoléances au Dr Bachar Assad, commandant en chef des forces armées; MM. Abdel-Halim Khaddam, vice-président de la République; Abdallah el-Ahmar, secrétaire général adjoint du parti Baas; Abdel-Kader Kaddourah, président du Conseil du Peuple; Mohamed Moustapha Miro, président du Conseil; au général Moustapha Tlass, ministre de la Défense; à MM. Farouk Chareh, ministre des Affaires étrangères; Adnan Omran, ministre de l’Information, ainsi qu’aux membres du commandement local et régional du Baas.
 

M. Melhem Karam présentant 
les membres de la délégation 
au Dr Bachar Assad.

La délégation de l’Ordre des journalistes 
se recueillant devant la dépouille 
du président Hafez Assad.

Au cours d’un entretien avec le Dr Bachar Assad, M. Karam a rendu hommage aux valeurs prônées par le président Hafez Assad “qui, dit-il, guideront les générations montantes et dont nous nous inspirerons dans l’édification de notre avenir que nous voulons radieux. Le président Assad a édifié une Histoire tout entière et a marqué de son empreinte une époque arabe qui porte son nom et son souvenir”.
Le Dr Bachar Assad a dit: “Je vous remercie de votre sentiment et vous assure que les relations qui existaient entre nous dans le passé, se perpétueront. Nous poursuivrons notre action, en marchant sur les traces de notre cher disparu, dans l’intérêt de la Syrie, du Liban et des Arabes, le verbe journalistique devant être mobilisé en faveur de la gloire des Arabes, de leurs droits et de leur dignité”. 

ÉCHOS DES FUNÉRAILLES

l Les hauts dignitaires syriens voulaient que Hafez Assad soit enterré à Damas comme tous les présidents syriens. Mais Assad avait bien précisé dans son testament qu’il voulait reposer auprès de son fils aîné Bassel, dans l’imposant mausolée qu’il lui a fait construire à Qordaha.
l Des cheikhs sunnites ont participé aux prières, aux côtés des cheikhs alaouites à la mosquée Naïssa.
l A Qordaha, ville de 20.000 habitants, ceux-ci ont ouvert leurs maisons pour accueillir leurs concitoyens venus participer aux funérailles, étant donné que tous les cafés et restaurants étaient fermés.
l Cinq à six mille soldats de la garde républicaine étaient déployés à Qordaha.
l A Damas, les évanouissements par dizaines étaient dus à l’émotion mais, aussi, à la fatigue et à la forte canicule de plus de 35Þ.
l Le vice-président Khaddam n’est sorti de l’ombre que 72 heures après le décès d’Assad. Il a été aperçu aux funérailles, aux côtés de Bachar. Par ailleurs, lors du transfert de la dépouille vers le Palais du Peuple, M. Khaddam s’est approché du cercueil pour le porter, mais n’a pu le faire.
l Quinze interprètes du ministère syrien des A.E. se sont répartis entre les divers halls du palais, pour traduire les conversations entre M. Bachar et les chefs des délégations étrangères.
l La Sûreté générale syrienne a accordé à des Arabes israéliens l’autorisation de traverser les frontières à partir de la ville de Qoneitra, dans le Golan. C’est la première fois que Damas autorise des Arabes israéliens à se rendre en territoire syrien à partir de ce point de passage.
l Le président Lahoud était le seul dirigeant non syrien aux côtés du général Bachar Assad, lors de la mise de la dépouille mortelle dans le caveau familial à Qordaha.
l Lorsqu’il était élève à Lattaquieh, Hafez Assad avait eu une enseignante libanaise originaire de Baabda, Mlle Rose Harfouche. Il gardait d’elle le meilleur souvenir, “car, disait-il à ses intimes: elle était stricte, exigeante et m’a poussé aux études”.
l En un an et demi, le monde arabe a connu quatre successions: Abdallah II, de Jordanie; Mohamed VI, du Maroc; Hamad Ben Issa, de Bahrein et Bachar Assad, de Syrie, qui est à 34 ans, le plus jeune chef d’Etat du monde.

Par NELLY HÉLOU

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