Ovationné pendant plusieurs minutes par le millier de délégués
debout participant au congrès du parti Baas, Bachar Assad paraît
intimidé. Il salue l’assistance d’un geste de la main et lui fait
signe de s’asseoir. Tous ces honneurs déroutent encore cet ophtalmologue
qui, du jour au lendemain, se trouve projeté au premier rang de
la scène politique de son pays.
La date du 17 juin pour la tenue de ce congrès avait été
prévue bien avant le décès du président Assad
qui devait introniser son fils Bachar (34 ans) à la vice-présidence
du Baas. Le destin en a décidé autrement.
Mais les hautes instances du parti ont tenu à maintenir la date
du 17 juin et ce 9ème congrès sera le premier à se
tenir en l’absence de celui qui, durant trois décennies, a “régné”
en maître absolu sur la Syrie. Tout se fera, d’ailleurs, selon sa
volonté, la succession étant assurée.
Le parti Baas qui ne s’était pas réuni depuis quinze
ans, a donc tenu ce congrès en son nouveau siège, le palais
des Omeyyades situé à 15 km au sud de Damas sur la route
de l’aéroport.
Entamé le 17 juin, le congrès a achevé ses travaux
le 20 au soir, en élisant les vingt-et-un membres du commandement
du parti ou bureau politique et, à leur tête, Bachar Assad
au titre de secrétaire général. Douze nouveaux membres
y font leur entrée, les neuf autres faisaient partie de la direction
sortante. Au sein du nouveau comité central formé de quatre-vingt-dix
membres, on compte aussi 70% de nouvelles figures. Au nombre des militaires
faisant partie de ce comité: le commandant Maher, frère du
Dr Bachar, membre de la garde présidentielle; le colonel Manaf Tlass,
fils du ministre de la Défense; le général Ali Aslane,
chef d’état-major et le général Ibrahim Safi, chef
du contingent syrien au Liban.
![]() Les membres du congrès à la sortie des séances de travail. |
![]() Bachar: renouvèle la vieille garde. |
DOTER LE PAYS DE CADRES COMPÉTENTS
Dans une allocution de circonstance, le nouveau secrétaire général
a lancé un appel au “renouveau de la Syrie” et insisté sur
la nécessité “de doter le pays de cadres compétents”.
Dès le départ, ce 9ème congrès s’était
placé sous le signe du renouveau d’une “perestroïka” souhaité
par Bachar depuis qu’il est mêlé à la vie politique
de son pays. Un renouvellement au niveau de l’Etat et au sein du parti
et de sa direction.
Le congrès qui a tenu ces travaux à huis clos, avait
formé trois commissions de travail: la première chargée
des questions politiques et présidée par le vice-président
Abdel-Halim Khaddam qui était devenu invisible ces derniers mois.
On disait même qu’il était tombé en disgrâce.
Il est sorti de l’ombre, tout en restant discret.
La deuxième commission, présidée par le Premier
ministre, Mohamed Moustapha Miro, s’est penchée sur les questions
d’ordre économique, en vue d’établir une stratégie
globale pour la relève socio-économique. Cette tâche
ne sera pas de tout repos. Mais le futur président voudrait doter
son pays d’un vrai système bancaire, d’une économie de marché
et de structures administratives modernes...
La troisième commission visait, surtout, la réforme institutionnelle
du parti et de ses cadres. Le Dr Bachar a tenu à participer aux
travaux de cette commission, présidée par Fayez Nasser, l’un
des secrétaires adjoints du Baas, car il vise à moderniser
les structures du parti, afin de permettre l’adhésion de nouveaux
membres plus jeunes et plus proches de la base.
“JE N’AI PAS DEMANDÉ L’AIDE D’ISRAËL POUR ACCÉDER AU POUVOIR À DAMAS” ![]() “Cette information n’a aucun fondement”, a déclaré M.
Hareth el-Kheir, porte-parole de M. Rifaat Assad, dans un communiqué.
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FAROUK CHAREH PARLE DU RENOUVELLEMENT
Toujours influent, M. Farouk Chareh, ministre des Affaires étrangères,
résume dans le cadre d’une interview accordée à un
média libanais de langue arabe, l’impact de ce 9ème congrès,
affirmant: “En premier lieu, le renouvellement à tous les niveaux
est une revendication générale à la dimension de l’unanimité
qui s’est faite autour de Bachar Assad.
“En deuxième lieu, la lutte contre la corruption est une nécessité
sans que la dénonciation devienne un objectif en soi, ce qui porterait
atteinte à l’image de la Syrie sur le plan international”.
Par ailleurs, cette lutte anti-corruption sera confiée au Conseil
supérieur de la magistrature pour l’éloigner de toute propagande
médiatisée.
M. Chareh affirme l’attachement aux constantes politiques connues de
la Syrie pour “une paix juste, honorable et globale, tel que Damas le revendique
depuis la conférence de Madrid”. Il précise de même
que les droits nationaux du peuple palestinien demeurent un vif sujet d’intérêt
politique et jouissent de l’appui total de la Syrie.
![]() Moustapha Tlass: Récompensé par la nomination de son fils.. |
![]() Maher Assad: Le frère fait son entrée officielle dans la politique. |
APPUI TOTAL AU LIBAN
Par rapport au Liban, le chef de la diplomatie syrienne résume
les constantes de la politique syrienne en ces termes: “Appui total au
Pouvoir et au gouvernement, notamment en ce qui concerne la récupération
absolue de sa terre, en s’assurant du retrait des forces d’occupation au-delà
de la frontière”.
TÂCHE ARDUE POUR BACHAR
Maintenant que le 9ème congrès a achevé ses travaux,
reste à connaître comment vont être accueillies ses
décisions par ceux qui ont été écartés
du bureau politique, d’une vieille garde qui, peut-être, ne voit
pas d’un bon œil l’arrivée de jeunes cadres au sein du parti. Pour
le Dr Bachar Assad, désormais à la tête du Baas et
prochainement à la tête du pays, la tâche ne sera pas
aisée, même si pour l’heure les médias syriens veulent
continuer à donner une image euphorique du processus de succession.
N’empêche qu’à Damas et dans le pays, moins de vingt-et-un
jours après le décès du président Hafez Assad,
la vie a repris son cours normal.
L’agence a indiqué que Bachar Assad a été élu
secrétaire général, mais n’a pas précisé
qui sont ses adjoints.
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