AU TERME DU IXÈME CONGRÈS DU BAAS
L’AMORCE D’UNE “PERESTROÏKA”

Une semaine après le décès du président syrien Hafez Assad, le parti Baas (au Pouvoir) a tenu son neuvième congrès à Damas et proclamé à l’unanimité dès la séance d’ouverture, Bachar Assad “dirigeant du parti Baas et du peuple”. A la séance de clôture, tenue dans la soirée du mardi 20 juin, le Dr Bachar est élu secrétaire général du parti.
Evidemment, aucun élément de surprise dans cette succession programmée et tenue jusque-là sous contrôle. L’étape décisive vers la présidence de la République sera franchie le 25 juin, date à laquelle le parlement se réunit pour approuver la décision du commandement du Baas et proclamer la candidature du “dauphin” à la tête de l’Etat. Le peuple n’aura plus qu’à entériner cette candidature par un référendum prévu vers la mi-juillet.

Ovationné pendant plusieurs minutes par le millier de délégués debout participant au congrès du parti Baas, Bachar Assad paraît intimidé. Il salue l’assistance d’un geste de la main et lui fait signe de s’asseoir. Tous ces honneurs déroutent encore cet ophtalmologue qui, du jour au lendemain, se trouve projeté au premier rang de la scène politique de son pays.
La date du 17 juin pour la tenue de ce congrès avait été prévue bien avant le décès du président Assad qui devait introniser son fils Bachar (34 ans) à la vice-présidence du Baas. Le destin en a décidé autrement.
Mais les hautes instances du parti ont tenu à maintenir la date du 17 juin et ce 9ème congrès sera le premier à se tenir en l’absence de celui qui, durant trois décennies, a “régné” en maître absolu sur la Syrie. Tout se fera, d’ailleurs, selon sa volonté, la succession étant assurée.
Le parti Baas qui ne s’était pas réuni depuis quinze ans, a donc tenu ce congrès en son nouveau siège, le palais des Omeyyades situé à 15 km au sud de Damas sur la route de l’aéroport.
Entamé le 17 juin, le congrès a achevé ses travaux le 20 au soir, en élisant les vingt-et-un membres du commandement du parti ou bureau politique et, à leur tête, Bachar Assad au titre de secrétaire général. Douze nouveaux membres y font leur entrée, les neuf autres faisaient partie de la direction sortante. Au sein du nouveau comité central formé de quatre-vingt-dix membres, on compte aussi 70% de nouvelles figures. Au nombre des militaires faisant partie de ce comité: le commandant Maher, frère du Dr Bachar, membre de la garde présidentielle; le colonel Manaf Tlass, fils du ministre de la Défense; le général Ali Aslane, chef d’état-major et le général Ibrahim Safi, chef du contingent syrien au Liban.
 

Les membres du congrès à la sortie 
des séances de travail.

Bachar: renouvèle la vieille garde.

DOTER LE PAYS DE CADRES COMPÉTENTS
Dans une allocution de circonstance, le nouveau secrétaire général a lancé un appel au “renouveau de la Syrie” et insisté sur la nécessité “de doter le pays de cadres compétents”.
Dès le départ, ce 9ème congrès s’était placé sous le signe du renouveau d’une “perestroïka” souhaité par Bachar depuis qu’il est mêlé à la vie politique de son pays. Un renouvellement au niveau de l’Etat et au sein du parti et de sa direction.
Le congrès qui a tenu ces travaux à huis clos, avait formé trois commissions de travail: la première chargée des questions politiques et présidée par le vice-président Abdel-Halim Khaddam qui était devenu invisible ces derniers mois. On disait même qu’il était tombé en disgrâce. Il est sorti de l’ombre, tout en restant discret.
La deuxième commission, présidée par le Premier ministre, Mohamed Moustapha Miro, s’est penchée sur les questions d’ordre économique, en vue d’établir une stratégie globale pour la relève socio-économique. Cette tâche ne sera pas de tout repos. Mais le futur président voudrait doter son pays d’un vrai système bancaire, d’une économie de marché et de structures administratives modernes...
La troisième commission visait, surtout, la réforme institutionnelle du parti et de ses cadres. Le Dr Bachar a tenu à participer aux travaux de cette commission, présidée par Fayez Nasser, l’un des secrétaires adjoints du Baas, car il vise à moderniser les structures du parti, afin de permettre l’adhésion de nouveaux membres plus jeunes et plus proches de la base.
 
RIFAAT ASSAD: 
“JE N’AI PAS DEMANDÉ L’AIDE D’ISRAËL POUR ACCÉDER AU POUVOIR À DAMAS”
Rifaat Assad a démenti avoir demandé l’aide d’Israël pour accéder au Pouvoir à Damas.

“Cette information n’a aucun fondement”, a déclaré M. Hareth el-Kheir, porte-parole de M. Rifaat Assad, dans un communiqué.
La radio publique israélienne a affirmé mardi dernier que l’oncle de Bachar Assad avait demandé, ces derniers mois, le soutien d’Israël pour prendre le Pouvoir à Damas.
Rifaat Assad, qui vit en exil en Europe, a utilisé un intermédiaire pour prendre contact notamment avec l’ambassadeur d’Israël aux Nations Unies, Yéhouda Lancry, qui a rendu compte de cette démarche au ministre des Affaires étrangères, David Lévy, a ajouté la radio.
En échange d’un appui d’Israël, Rifaat Assad aurait promis que la Syrie sous sa direction “agirait pour imposer le calme et la sécurité au Liban-Sud”, a ajouté la radio, en affirmant que M. Lancry avait refusé de confirmer ou démentir ces informations.
Rifaat Assad, qui a été chassé de son pays en 1995; puis, destitué de son poste de vice-président en 1998, s’est posé en rival de Bachar après la mort, le 10 juin, du président Hafez Assad.
Evoquant la désignation de Bachar, son neveu âgé de 34 ans, comme candidat officiel à la présidence, il avait accusé les dirigeants syriens d’avoir “violé la Constitution en faisant fi de la légalité et de la volonté du peuple”. 

FAROUK CHAREH PARLE DU RENOUVELLEMENT
Toujours influent, M. Farouk Chareh, ministre des Affaires étrangères, résume dans le cadre d’une interview accordée à un média libanais de langue arabe, l’impact de ce 9ème congrès, affirmant: “En premier lieu, le renouvellement à tous les niveaux est une revendication générale à la dimension de l’unanimité qui s’est faite autour de Bachar Assad.
“En deuxième lieu, la lutte contre la corruption est une nécessité sans que la dénonciation devienne un objectif en soi, ce qui porterait atteinte à l’image de la Syrie sur le plan international”.
Par ailleurs, cette lutte anti-corruption sera confiée au Conseil supérieur de la magistrature pour l’éloigner de toute propagande médiatisée.
M. Chareh affirme l’attachement aux constantes politiques connues de la Syrie pour “une paix juste, honorable et globale, tel que Damas le revendique depuis la conférence de Madrid”. Il précise de même que les droits nationaux du peuple palestinien demeurent un vif sujet d’intérêt politique et jouissent de l’appui total de la Syrie.
 

Moustapha Tlass: Récompensé 
par la nomination de son fils..

Maher Assad: Le frère fait son entrée 
officielle dans la politique.

APPUI TOTAL AU LIBAN
Par rapport au Liban, le chef de la diplomatie syrienne résume les constantes de la politique syrienne en ces termes: “Appui total au Pouvoir et au gouvernement, notamment en ce qui concerne la récupération absolue de sa terre, en s’assurant du retrait des forces d’occupation au-delà de la frontière”.

TÂCHE ARDUE POUR BACHAR
Maintenant que le 9ème congrès a achevé ses travaux, reste à connaître comment vont être accueillies ses décisions par ceux qui ont été écartés du bureau politique, d’une vieille garde qui, peut-être, ne voit pas d’un bon œil l’arrivée de jeunes cadres au sein du parti. Pour le Dr Bachar Assad, désormais à la tête du Baas et prochainement à la tête du pays, la tâche ne sera pas aisée, même si pour l’heure les médias syriens veulent continuer à donner une image euphorique du processus de succession.
N’empêche qu’à Damas et dans le pays, moins de vingt-et-un jours après le décès du président Hafez Assad, la vie a repris son cours normal.
 
LE NOUVEAU BUREAU POLITIQUE DU BAAS
Voici la liste des membres du commandement (bureau politique) du parti Baas syrien élus à l’issue de son neuvième congrès, dans l’ordre donné par l’agence officielle Sana.

L’agence a indiqué que Bachar Assad a été élu secrétaire général, mais n’a pas précisé qui sont ses adjoints.
Sur les vingt-et-une personnalités, douze font leur entrée et neuf faisaient partie de la direction sortante:
- Bachar Assad (nouveau secrétaire général);
- Abdallah Ahmar (ancien, secrétaire général adjoint sortant);
- Abdel Halim Khaddam (ancien, vice-président syrien);
- Sleiman Qaddah (ancien, secrétaire général adjoint sortant);
- Zouheir Macharqa (ancien, vice-président syrien);
- Abdel-Kader Kaddourah (ancien, chef du parlement);
- Fayez Nasser (ancien);
- Ahmed Dargham (ancien);
- Moustapha Tlass (ancien, ministre de la Défense);
- Walid Hamdoun (ancien);
- Mohamed Moustapha Miro (nouveau, Premier ministre);
- Naji Otri (nouveau, vice-Premier ministre pour les Services publics);
- Farouk Chareh (nouveau, ministre des Affaires étrangères);
- Salam Yassine (nouveau, ministre de l’Administration locale);
- Ibrahim Heneidi (nouveau, gouverneur de Soueida, sud);
- Farouk Abou-Chamat (nouveau, membre de la section de Damas);
- Ghayath Barakat (nouveau, membre de la section d’Alep, nord);
- Walid Al-Bouz (nouveau, gouverneur de Kuneitra, Golan);
- Majed Chdoud (nouveau, doyen de la faculté des sciences politiques à Damas);
- Mohamed Saïd Bakhtiane (nouveau, ex-gouverneur de Hama, centre);
- Mohamed el-Hussein (nouveau, enseignant à l’université d’Alep, nord).
Le comité central qui compte quatre-vingt-dix membres, supposé contrôler l’action du commandement, compte une vingtaine de femmes, un nombre sensiblement plus important que dans le précédent et parmi elles, Boussayna Chaabane, traductrice du président défunt et conseillère au ministère des Affaires étrangères, âgée de 47 ans.
Les vingt-et-un membres du commandement du Baas sont également membres du comité central qui compte plusieurs militaires, dont Bachar Assad qui a été promu général et commandant en chef de l’Armée et le ministre de la Défense, Moustapha Tlass.
Le général Ibrahim Houeiji, chef des services de renseignements de l’armée de l’air et les généraux Abdel-Rahmane Sayyade et Farouk Issa, chefs d’état-major adjoints, figurent également dans le comité central, de même que les généraux Toufic Jalloul, inspecteur en chef des forces armées; Kamal Mahfouz, commandant de l’armée de l’air; le général Hassan Khalil, chef des renseignements militaires et le général Ali Houri, chef des renseignements généraux. 


Home
Home