DÉPUTÉ DE ZAHLÉ ELIE SKAFF:
“SEULE LA CONFIANCE DANS L’ETAT ET SES INSTITUTIONS
PEUT REDRESSER LA SITUATION ÉCONOMICO-FINANCIÈRE”

"Le Dr Bachar Assad suivra la trace de son père, mais il ne nous est possible de rien prévoir à propos de l’opération de paix au Proche-Orient”, déclare M. Elie Skaff, député de Zahlé.
Au plan interne, il est persuadé que le président Emile Lahoud édifiera l’Etat de la loi et des institutions, “bien que le gouvernement n’ait pas pris la chose très au sérieux”. Aussi, est-il appelé à œuvrer dans ce but et, surtout, d’engager une bataille sans merci contre l’amoralité: “Il y a trop de mensonges et de duplicité chez nous”.
Quant à la crise économico-financière, son règlement exige, surtout, une confiance dans l’Etat et dans sa gestion de la chose publique, l’amélioration de la conjoncture régionale pouvant y contribuer dans une large mesure.

De l’étape future et de l’évolution de la conjoncture régionale après le décès du président Hafez Assad, en ce qui concerne notamment le processus de paix, M. Skaff se montre circonspect. “On ne peut rien prédire pour le moment, bien qu’en Syrie la situation s’annonce stable, le Dr Bachar Assad devant marcher sur les traces de son père, la paix étant une option stratégique pour la Syrie et le Liban”.
L’occasion est propice au changement à tous les niveaux et nul ne peut envier le Dr Bachar à qui il est beaucoup demandé. En ce qui a trait au processus de paix, tout porte à penser qu’il sera gelé jusqu’à la fin des élections présidentielles américaines. Il nous faut donc adopter l’attitude chère aux Anglais: “Wait and see”.

Comment évolueront les relations libano-syriennes?
Cette question dépasse les personnes. La Syrie est entrée au Liban et en sortira avec l’approbation internationale.
Je n’entrerai pas dans les détails, mais je constate que les Libanais souhaitent, unanimement, entretenir de bonnes relations avec le pays frère et voisin, en les améliorant davantage, de manière à préserver nos intérêts communs et, surtout, en les établissant sur base d’une affection profonde et d’un respect mutuel.

Partagez-vous l’avis de ceux qui réclament le déploiement de l’Armée libanaise au Liban-Sud?
Si je devais répondre d’une manière spontanée, je dirais qu’un tel déploiement serait très important. Cependant, il faut laisser au chef de l’Etat toute latitude pour prendre la décision adéquate, car il dispose de données qui nous échappent.
Ainsi que le stipule la résolution 425 du Conseil de Sécurité, l’envoi de nos forces régulières au Sud doit s’opérer par étapes et après qu’aura été vérifié le retrait israélien de notre territoire, ce qui a posé un problème que le secrétaire général de l’ONU est venu sur place pour trancher.
En ce qui concerne le tracé des frontières, qui devrait être défini entre les Etats, il semble que les Nations Unies tiennent maintenant à intervenir pour décider du sort des pays. Serait-ce la politique imposée par le nouvel ordre mondial?

LISTE DE COALITION À ZAHLÉ
Quoi de nouveau au plan électoral: avez-vous choisi vos colistiers?
Effectivement, nous avons constitué notre liste de coalition comme ce sera le cas dans la plupart des circonscriptions. Si des modifications devaient y être apportées, ce serait par rapport aux candidats grec-orthodoxe et arménien. Et ce, en raison du différend qui m’oppose au président Elias Hraoui qui m’a combattu durant les neuf années qu’il a passées au palais de Baabda. Notre collègue Chaouki Fakhoury est censé le représenter et il faisait partie, autrefois, de notre bloc.
Mais après l’élection du président Hraoui, nos rapports avec Fakhoury ont été compromis. En ce qui concerne M. Khalil Hraoui, son nom a été choisi par sa famille.
Quant à M. Georges Kassardji, député arménien, il envisage, dit-on, de constituer sa propre liste. De toute façon, nous sommes en pourparlers avec le parti Tachnag pour la désignation de son candidat.

ASSAINIR LE CLIMAT SOCIO-POLITIQUE
Après le retrait israélien, comment trouvez-vous la prochaine étape à tous les niveaux?
L’occupation israélienne était le principal problème au Liban. Mais beaucoup de problèmes existent encore. Nous vivons dans un cycle de mensonge et d’amoralité. Aussi, est-il nécessaire, à l’étape actuelle, de rétablir l’esprit de moralité. D’autre part, la crise économico-financière requiert une solution qui dépend de la confiance en l’Etat et ses institutions, ainsi que de la conjoncture régionale. Sans un règlement à l’échelle régionale, l’investissement ne sera pas favorisé et l’économie ne sera pas réactivée, ce qui pousse les jeunes à l’exode.
L’édification de l’Etat de la loi et des institutions règle beaucoup de crises. Le peuple et le Pouvoir doivent œuvrer en ce sens et se débarrasser des politiques traditionnelles et des considérations confessionnelles ou autres. Si le peuple n’exerce pas une pression sur les députés et ceux-ci sur le gouvernement, l’Etat des institutions ne sera pas édifié.

LA RÉFORME NÉCESSAIRE
Les milieux politiques parlent d’une reprise de la réforme administrative à l’instar de ce qui se passe en Syrie. Qu’en dites-vous?
La réforme est indispensable. Qu’en est-il des milliards de dollars qui ont été volés? Comment régler le problème du vol qui était en vigueur sous l’ancien régime? L’Etat doit favoriser et garantir les investissements. Le président Lahoud est déterminé à instituer l’Etat des institutions, comme prévu dans le discours d’investiture, bien que le Cabinet ne s’y met pas sérieusement.

Approuvez-vous la politique gouvernementale?
Je suis avec le régime, mais non avec le Cabinet. Le président Lahoud est connu pour sa probité et le pays doit être édifié sur les principes de la morale. Le Cabinet n’a pas réussi dans sa tâche. Quelques ministres travaillent sérieusement, tandis que d’autres sont inactifs et se contentent de faire des déclarations. Ils ne répondent même pas aux appels des députés. Le pays ne peut être géré de cette manière.
La corruption a caractérisé le Cabinet précédent; l’actuel est dans un état de coma. Aussi, faudrait-il former un Cabinet politique.

En tant que membre du Conseil supérieur melkite, interviendrez-vous dans la désignation du représentant de votre communauté dans le prochain Cabinet?
Le Liban est basé sur le confessionnalisme. Nous demandons à émettre notre avis quant au choix du ministre qui représentera notre communauté dans le prochain Cabinet et refusons que certaines personnes décident du sort du pays. Durant le mandat du président Hraoui, la communauté melkite a été défavorisée.

Propos recueillis par
HALA HUSSEINI

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