LA VIOLENCE À L’ÉGARD DES FEMMES
SES ORIGINES, SES FORMES ET SES CONSÉQUENCES GRAVES

Par ANGELA SARRAF
L’imagerie de la femme terrifiée, opprimée, objet fétichisé à l’usage des hommes, telle que les mouvements de libération des femmes la décrivent, n’est pas perdue. Il est encore largement reconnu que la violence à l’égard des femmes constitue une atteinte majeure à ses droits fondamentaux. La violence est légitime si elle a pour finalité de mettre un terme à une autre violence, celle qui menace l’intégrité physique, morale et la liberté... Autrement, le problème de la violence est considéré illégal.
Comme le précise Machiavel, “Ce n’est pas la violence qui restaure, mais la violence qui ruine qu’il faut condamner”. Aux yeux de la morale classique, la violence - qu’il faut distinguer de la force - est évidemment injuste, puisqu’elle ne respecte pas la dignité de la personne humaine.

“Personne ne peut vous contraindre à vous sentir inférieur sans votre consentement”.
 (Eleanor Roosevelt)

PRÉVALENCE
Si les données fiables sur la prévalence de la violence exercée contre les femmes par leurs partenaires sont rares, surtout dans les pays en voie de développement, des recherches de plus en plus nombreuses confirment qu’elle est partout présente. Des études effectuées dans vingt-quatre pays de quatre continents, révèlent que 20 à 50% des femmes sont victimes de la violence physique de leurs partenaires à un moment ou à un autre de leur vie. En moyenne, ces mêmes études révèlent que 50 à 60% des femmes qui subissent la violence de leurs partenaires, sont également violées par eux.
 
L’ORIGINE DE LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES
Mme Rafif Rida Sidawi, sociologue, affirme: “Les ressources de la violence contre la femme sont avant tout culturelles, intégrées dans l’idéologie patriarcale et le stock de stéréotypes culturels qui ne s’arrêtent pas à reproduire la violence, mais à la légitimer. D’où l’immortalité d’un système masculin de persuasion idéologique, un système manipulateur où s’exerce l’action spécifique de persuasion, sans utilisation immédiate de la sanction physique que la femme a connue au Moyen Age et à travers les époques historiques”.
Une question s’impose ici; elle est posée par Mme May Majdalani, psychothérapeute: La mère ne serait-elle pas un des agents les plus importants ayant assuré par son éducation la “socialisation” et du garçon et de la fille?”
Car, pense-t-elle, en traitant les deux d’une façon équivalente, selon leurs potentiels, leurs personnalités respectives, les expectatives de leurs futurs rôles et non selon leurs sexes, la mère serait en train de créer l’homme et la femme de demain, sans idées préconçues.
Il est entendu, comme elle continue à le dire, que “la mère n’est qu’une partie de ce changement... mais, très souvent, la mère de par sa relation avec son mari, son attitude avec sa fille et son fils, laisse une trace très profonde dans le développement de l’enfant pour qui elle constitue la référence dans ses expériences futures”.
La femme, peut-être sans le savoir, est en train d’avoir ce qu’on appelle en anglais un “double standard”. D’un côté, elle demande certains droits et se plaint de la violence qu’elle subit; de l’autre, elle continue à élever ses enfants en favorisant le garçon dans certains domaines et la fille dans d’autres, perpétrant ainsi la différence.
Bien que les rapports inégaux ayant abouti à la domination des hommes sur les femmes favorisent l’expression de la violence, le Dr Chaouki Hitti reconnaît que trois causes constituent une véritable source à la violence: deux remontent à l’enfance (une cause relationnelle due à l’enfance et une autre qui a détruit l’image et la conception de la famille en lui).
La troisième survient plus tard dans la vie, déclenchée par différents facteurs, à savoir: la pauvreté, une maladie nerveuse, une mésentente sexuelle, une nature sadique, un conflit idéologique, dogmatique ou radical, la cohabitation avec la belle-famille...

LA VIOLENCE sous toutes FORMES...
Il distingue entre les manifestations, explicites et implicites, de la violence. La première serait corporelle (coups, gifle, viol...), ou psychologique s’interprétant, dans ce cas, verbalement (cris, insultes, propos dégradants ou sarcastiques, menaces, hurlement...).
La seconde se manifesterait par des mensonges, l’absence de tout contact physique, la non participation aux frais de la famille, à l’éducation des enfants, les sorties nocturnes, le retour tardif à la maison...
Toutefois, le Dr C. Hitti tient à souligner la possibilité d’un revirement de l’agressivité implicite à explicite.
Il y a plus de différences que de similitudes entre les femmes qui ont subi la violence. Toutefois, une étude faite au Canada et aux Etats-Unis note des caractéristiques typiques des femmes violentées.
Selon une étude canadienne, certaines femmes paraissent plus sujettes encore que d’autres à l’abus; il s’agirait, dans ce cas, de femmes pauvres, invalides (physiquement et/ou mentalement)...

COMMENT LA FEMME LIBANAISE INTERPRÈTE-T-ELLE LA VIOLENCE DOMESTIQUE?
D’après une étude faite au Liban et rapportée par Mme M. Majdalani, 36% des femmes ont répondu que la violence domestique est un phénomène universel et 35% ont assuré qu’il est certainement un problème existant au Liban. 68% de ces femmes ont dit qu’il y a beaucoup de mariages malheureux au Liban et en ont attribué la cause à des difficultés financières (34%), aux mariages arrangés entre parents (33%) et aux différences importantes dans les mentalités (38%). 41% de ces femmes sont prêtes à subir leur mariage malheureux pour essayer de sauver leur ménage et sauvegarder la vie de leurs enfants; 15% envisageraient le divorce si la situation ne s’arrangeait pas; 23% au cas où la situation est désespérée, 2% ont évoqué la religion comme barrière au divorce et 9% remettent la décision à la femme.
18% ne songeraient jamais au divorce, considérant la réaction négative de la société (61%), pensent aux difficultés financières (27%) et à la perte des enfants (49%). La plupart d’entre elles encouragent la femme à avoir une carrière, car indépendante, elle sera plus en mesure de contrôler sa destinée.
L’abus que subissent les femmes n’est pas, uniquement, un problème personnel, comme on peut bien le penser. Voilà ce que nous apprend Mme M. Majdalani, sur la conséquence d’une sous-estime de la femme: homicide de l’un des partenaires, suicide, mauvais traitement au point d’invalidité, dépression, abus émotionnel et privation, dislocation de l’unité familiale, récurrence d’un comportement violent avec un nouveau partenaire, expansion de la violence au sein de la communauté, isolation sociale due à une peur de la violence, séparation, divorce et problème de la garde des enfants, perte de travail...
Cette violence, précise Mme M. Majdalani, se répercute aussi sur les enfants: dépression, report de cette violence sur la communauté, adoption d’un comportement violent à l’âge adulte, mariage précoce, alcool et drogue, agressivité, blessures émotionnelles, homicide, suicide, délinquance, etc.

DE QUI CRAINDRE LA VIOLENCE?
De nombreuses études ont montré que:
• Les auteurs d’actes de violence contre les femmes sont presque exclusivement des hommes.
• Les femmes ont, surtout, à craindre la violence des hommes de leur entourage.
• Les femmes et les jeunes filles sont le plus souvent victimes de la violence au sein de la famille et entre partenaires.
• Les violences physiques lors des relations intimes sont presque toujours accompagnées de violences psychologiques et verbales graves.
• De nombreux professionnels ou institutions sociales ont souvent tendance à culpabiliser les victimes.
Parmi les nombreuses conséquences préjudiciables pour la santé de la violence à l’égard des femmes, les blessures psychologiques sont, sans doute, les plus graves, car elles sont plus longues à guérir que les blessures physiques. Comme l’a fait observer une victime de la violence recueillie par un centre pour la protection de la femme: “Les blessures du corps guérissent vite. Seules restent les cicatrices... Mais les blessures de l’âme sont beaucoup plus longues à guérir. A chaque fois que je revis ces moments, ces blessures-là recommencent à saigner. Les dégâts psychologiques sont certainement les plus difficiles à réparer”.
Ces victimes de violences sont plus exposées à des comportements d’auto-châtiment et aux problèmes comme la toxicomanie ou le tabagisme.
Aux Etats-Unis d’Amérique, une étude a révélé que les femmes ayant des antécédents de violence sexuelle, étaient presque deux fois plus nombreuses à avoir eu recours à des services de santé mentale au cours des six mois précédant l’enquête, que les hommes et que les femmes qui n’avaient pas subi ce type de violence. D’autres études américaines ont montré que des antécédents de violence ou de viol étaient un facteur prédictif de visites médicales et de coûts médicaux plus marqués que d’autres variables.

ACTIVITÉS DE L’OMS
En 1996, l’OMS reconnaît les violences mentales/psychologiques comme faisant partie intégrante de la violence exercée contre les femmes au sein de la famille; elle a élaboré et mis à l’épreuve une méthodologie pour prévenir et traiter les conséquences de la violence.
Lors de sa dernière réunion, en avril 1996, la Commission mondiale de l’OMS pour la santé des femmes, organe de haut niveau chargé de sensibiliser l’opinion aux questions qui touchent à la santé des femmes sur le plan national et international, s’est intéressée principalement au problème de la violence et a recommandé à l’OMS de se concentrer, dans un premier temps sur la violence domestique et sur la violence à l’égard des femmes dans les situations de conflit. Un groupe de travail désigné par la Commission sera chargé d’étudier les mécanismes de surveillance des instruments de droit international portant sur la violence à l’égard des femmes et de veiller à ce qu’ils soient respectés.
 
L’AVIS DES JURISTES
BAKHOS: LA LOI LIBANAISE PUNIT LA VIOLENCE
Sur la situation de la femme libanaise, Me Auguste Bakhos émet ces réflexions: “Je suis contre toute forme de discrimination. D’ailleurs, pourquoi en parler, alors que les mêmes droits sont octroyés aux deux sexes? A chacun selon son mérite et son potentiel... La Libanaise possède les mêmes chances d’égalité que les Occidentales.
“Ce que je demanderais, par contre, à toute femme, c’est de ne pas reléguer au dernier plan sa féminité qui constitue sa force et de tenir compte d’une grâce qui lui est toute particulière: la maternité. Par là, elle devient plutôt à la base de celui qu’elle s’obstine à égaliser.
“Je ne nie pas les différentes formes de discrimination qui ont lieu encore malheureusement dans la société. La loi tranche et punit la violence. Je pense que la peur de la femme de porter plainte est basée sur une crainte de détruire son foyer. J’irais même plus loin en affirmant que de par sa nature, la femme peut pour ainsi dire, parvenir à de grandes réalisations en adoptant un savoir-faire. Ceci mis à part la compassion que peuvent lui éprouver enfants, société, hommes de religion...
“La loi libanaise accorde à la femme presque tous ses droits. Il demeure la loi des sanctions à laquelle des modifications vont bientôt être apportées. Ce qui ne justifie plus les obsessions des femmes dans leur persistante volonté à égaliser le sexe mâle. 

LE CODE PÉNAL SANCTIONNE LES ACTES D’AGRESSION
Me Fadi Moghaïzel: “Initialement, les lois libanaises comportaient de nombreux textes discriminatoires à plusieurs niveaux. Cependant, depuis le début des années 50 et grâce aux efforts des pionnières du mouvement féministe libanais, des modifications ont pu être obtenues, à commencer par l’octroi des droits politiques aux femmes (droit de vote et droit d’être élu).
“En ce qui concerne la violence exercée contre les femmes, il n’existe malheureusement pas de texte spécial protégeant la femme, mais il n’en demeure pas moins qu’il est possible de recourir aux dispositions du Code pénal qui sanctionnent les actes de violence et d’agression contre les personnes en général. La suppression des textes de lois discriminatoires exige encore des efforts importants.
“Jusqu’à ce jour, les progrès dans ce sens ont été considérables, mais lents. Afin d’assurer un changement plus rapide et radical, la femme devrait prendre part, plus activement, à la vie politique du pays à tous les niveaux, que ce soit au sein des partis politiques, du pouvoir législatif ou exécutif. Sans cette participation, la domination des sphères du pouvoir par les hommes constituera toujours un frein et parfois même un obstacle à la réalisation de l’égalité entre les femmes et les hommes au niveau des droits et des obligations”. 

CERCLE VICIEUX DE VIOLENCE
Pourquoi certains hommes persistent-ils à considérer les femmes comme des êtres de deuxième catégorie?
Le Dr Assem Alameddine pense que l’attitude répressive des hommes à l’encontre des femmes et de ces dernières à l’égard de leurs enfants, constitue un cercle vicieux de violence où la victime s’identifie à l’agresseur et agresse le plus faible. “Je parle, aussi, des femmes à l’égard de leurs enfants, car on ne peut envisager la solution aux problèmes de la violence contre les femmes, sans résoudre les cas de la violence de la mère contre ses propres enfants qui, à l’âge adulte, vont reprendre les mêmes scènes de violence”.
Le Dr Alameddine se réfère aux trois témoignages pour une illustration typique de l’infériorité prêtée aux femmes dans certaines sociétés. Ibtissam éprouve ce cuisant sentiment d’infériorité pour le simple fait qu’elle n’est pas un homme. Son père pense que notre société et notre culture sont entièrement basées sur la virilité et la suprématie présumée de l’homme. Ibtissam est donc de celles qui tiennent une place marginale dans la vie.
L’infériorité fait, aussi, partie de la vie de Diana et Leila. La première est culpabilisée par sa mère pour l’échec de sa vie. Elle sous-entend, continuellement, son manque d’intelligence et sa faible personnalité. Sa vie avec son mari ne l’a pas  rééquilibrée non plus.
Quant à Leila, elle est dominée par son conjoint. Consciente de ce sentiment d’impuissance qu’il lui a imprimé par ses menaces et sa cruauté, elle n’ose pas se révolter. La négligence de ses parents en ce moment délicat, a exacerbé chez elle ce sentiment.
Chargé depuis des siècles par la société du rôle de “patriarche”, l’homme a provoqué chez la femme ce sentiment de soumission. “Ce qui est étonnant, souligne le Dr Alameddine et contrairement à ce que l’on croit, la vie professionnelle et l’indépendance financière de certaines femmes ne changent rien à ce sentiment, ni à cette image qu’elles ont d’elles-mêmes. Et même lorsqu’elles parviennent à se débrouiller toutes seules, elles ne se décident pas pour autant à se séparer de leur époux.”
Le Dr Alameddine cite trois facteurs: le premier est en rapport avec la mentalité et l’éducation. C’est, notamment, le cas de Leila qui s’est résignée à tenir compte de l’image et de la réputation de ses parents.
Les deux autres facteurs sont d’ordre plus humain. C’est, tantôt, l’amour que la femme porte toujours envers son conjoint irascible. Elle devient, dans ce cas, masochiste. Tantôt, la peur de sa nouvelle situation. C’est à ce niveau que l’éducation peut jouer un rôle majeur. Depuis l’enfance, la femme orientale n’a pas été habituée à se juger à sa juste valeur. Diana et Ibtissam illustrent bien ces situations.
Une certaine complaisance de la femme vis-à-vis de son état, constitue une attitude qui renforce d’autant la prétendue supériorité de l’homme.

Si à 16 ans, Ibtissam a accepté comme prétendant l’ignorant, le faible et le pauvre Fadi à la piètre santé, c’était pour en finir de son père, rétrograde et obtus.
Cependant, la vie avec ses beaux-parents, l’irresponsabilité de son mari et son “fainéantisme”, les problèmes financiers ont vite fait de décevoir la jeune femme. Son avenir se résumait, désormais, en la mendiance, le vol, les relations déshonorantes.
Cette horrible situation n’a pas découragé Ibtissam pour autant. Tenter de reconquérir son mari lui valait coups, menaces et injures même enceinte de son quatrième bébé et ce, au vu et au su des voisins.
La relation amoureuse que Fadi entretenait, ne décidait pas plus sa femme à le quitter.
En accord avec son beau-père, il l’a traînée de force au tribunal pour signer les papiers sans, toutefois, que quiconque lui demande si elle était consentante et quelles étaient les causes de ce divorce.
Fadi qui a obtenu la garde des enfants, n’a pas respecté le droit de visite accordé à son ex-femme. “Depuis quatre ans, je n’ai pas vu mes enfants à qui ma belle-mère a raconté des propos médisants à mon sujet”.

Leila: Mariage précoce...
Leila, quant à elle, a eu un tout autre parcours. Dès son plus jeune âge, elle a été confrontée à des difficultés matérielles, au point de postuler un poste de servante chez une famille qui ne lui a épargné aucun mauvais traitement.
En épousant Nabil à 13 ans, l’avenir ne semblait guère plus prometteur à Leila. Ses rêves s’envolaient définitivement avec ce charlatan, voleur, menteur, alcoolique et joueur de hasard.
Elle a dû reprendre le travail pour éponger les dettes de son mari et se voyait souvent seule, confrontée à des créanciers qui voulaient profiter de la situation. Chose dont Nabil n’avait cure. Les hématomes qui couvraient le corps de Leila, ses trois tentatives de suicide aux barbituriques et son emprisonnement suite à une affaire de trafic à laquelle l’a mêlée son mari, n’ont guère ému ses parents.
Le divorce obtenu aujourd’hui après quinze ans de souffrance et d’endurance, le remariage de Leila avec un type qui lui prodigue tout le bonheur possible, n’ont pas cicatrisé ses blessures.

Diana se culpabilise...
Diana est de ces femmes qui ne mettent pas leur souffrance uniquement sur le compte de leur mari. Elle est consciente d’avoir pris l’initiative dans la destruction de son ménage avec l’affection et l’attention reportées entièrement sur sa petite Zeina et la négligence totale, dans ce cas, de son mari.
Mais elle n’innocente pas ce faible de personnalité, fainéant, inculte, instable, alcoolique, irresponsable.
Diana n’avait la possibilité que de vivre au crochet des bienfaiteurs vu que son mari lui interdisait de travailler et même de sortir de cette misérable masure qui faisait office de chambre à coucher, de salon, de cuisine et... de toilettes.
L’espoir n’était désormais plus permis avec l’intrusion d’une femme âgée dans la vie de Nader, sans foi ni loi, qui l’avait poussé à la violence et à parler, par la suite, de divorce. Cette horrible situation avait rendu Diana boulimique et s’était répercutée sur sa santé. En dépit de tout cela, Diana continue aujourd’hui à se culpabiliser, elle en veut à son égoïste de mère pour ses conseils malhonnêtes.
 
LES VIOLENCES FAITES AUX ÉPOUSES
Au Moyen Age, le “droit de correction” fait partie des mœurs. L’Eglise émet une ordonnance, au XVème siècle, qui précise “quand et comment un homme pouvait, effectivement, battre sa femme”. Loin de s’atténuer, la brutalité maritale s’affirme au grand jour dans les siècles suivants. Le Code Civil ou Code Napoléon, renforce l’autorité maritale et excuse le meurtre de l’épouse par l’époux en cas d’adultère.
Aujourd’hui, la loi réprime les violences conjugales et, de plus en plus, les femmes osent parler et porter plainte. Tous les milieux sont touchés par la violence conjugale. Soulignons que, bien que victime, c’est, encore, le plus souvent la femme, qui doit quitter le domicile conjugal pour se mettre en sécurité. Depuis 1990, la loi permet aux associations qui luttent contre les violences familiales de se porter partie civile. En France, le viol est un crime passible de 15 ans de prison (viol simple) à la réclusion criminelle à perpétuité (viol avec tortures). 
DE CERTAINES DISPOSITIONS DU CODE PÉNAL ET DU STATUT PERSONNEL
Si certaines causes de divorce sont péremptoires (l’adultère par exemple), d’autres sont facultatives: excès, sévices ou injures de l’époux envers sa femme rendant intolérable le maintien du lien conjugal. De leur côté, les tribunaux ont ouvert la voie au divorce aux époux en cas de cause péremptoire. Toutes les législations en matière de statut personnel dans les différentes communautés libanaises, ainsi que le droit pénal libanais ont accordé une certaine prééminence à la femme, en sanctionnant l’homme pour la cruauté et la dégradation morale qu’il lui faisait subir et en prévoyant, conséquemment, la séparation du corps ou le divorce avec dommages et intérêts ou pension alimentaire. 
Me Georges Jallad s’exprime en détail sur les procédures à suivre: “La première phase de la procédure s’ouvre par une requête auprès du tribunal religieux. En base de cette requête, le président du tribunal entame une tentative de conciliation. Si les époux se réconcilient, il n’y a pas lieu de poursuivre le procès. Sinon, le président l’ajourne d’un mois pour les besoins de la procédure. Lorsque le tribunal prononce le divorce trouvant des causes péremptoires aux torts exclusifs de l’époux, il y aura lieu de régler certains problèmes: garde des enfants, sanctions contre le coupable, notamment sa condamnation au versement d’une pension alimentaire à l’épouse et des dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel ou moral subi par le conjoint. Les procédures dans ce cas, sont presque similaires pour toutes les communautés chrétiennes et aboutissent au même résultat avec, toutefois, une différence chez les communautés catholiques où la séparation du corps est considérée comme temporaire et où le jugement de divorce, est plus sévère. Le droit pénal, commun à tous les Libanais dans ce domaine, implique de son côté des sanctions pénales pour quiconque maltraite, blesse ou frappe son conjoint” ajoute-t-il. Toutes les législations spirituelles et temporelles libanaises ont ainsi adopté presque les mêmes sanctions face à ce problème. 
LA LOI LIBANAISE, POUR OU CONTRE LA VIOLENCE?
Bien que la Charte internationale des Droits de l’homme et la Constitution libanaise ont toutes   deux consacré le principe de l’égalité entre tous les citoyens par devant la loi, sans distinction de sexe et aussi leur jouissance absolue de tous les droits sans aucune discrimination entre eux, la position de la femme au Liban vis-à-vis des droits est toujours inférieure à celle de l’homme.
Me Maguy Rahmé nous éclaire sur ce point: “Les textes juridiques libanais sont si injustes envers la femme et ouvrent grande la porte sur le “libertinage” de la violence contre elle”. Me Rahmé s’arrête sur les exemples les plus marquants dans les différents domaines du droit:
l. L’âge prématuré du mariage qui va de 9 à 14 ans, suivant les lois relatives aux dix-huit différentes religions libanaises. Nous parlons ici de contrainte de la part des parents en vue de choisir le conjoint, l’immaturité physique et psychique de la fille.
2. La possibilité que donne l’article 522 du code pénal à l’auteur d’un enlèvement, viol ou toutes autres formes de violence, de se dérober de la sentence si un contrat de mariage valide est conclu entre l’auteur d’un de ces crimes et la victime; de cette façon, l’auteur du crime se dérobe de la sentence et la victime acceptera malgré elle, pour étouffer le scandale et satisfaire la société.
3. Le crime d’honneur: conformément aux dispositions de l’article 562 du Code pénal, l’homme profite de l’excuse atténuante s’il surprend son épouse ou un de ses ascendants ou descendants ou sa sœur commettant l’adultère ou un rapport sexuel illicite et commet le meurtre d’un d’eux ou lui porte atteinte sans le préméditer. Cet article a été modifié en février 1999 et au lieu de le supprimer totalement, on a remplacé l’excuse absolutoire par l’excuse atténuante.
4. Concernant le crime d’adultère sanctionné par le Code pénal (Art. 487, 488), on trouve une discrimination concernant la sentence, beaucoup moins lourde pour l’homme et pour le même crime.
5. Concernant les procès de divorce, beaucoup de problèmes coincent la femme dans un niveau inférieur, notamment le cadre étroit quant à la demande du divorce par rapport au cadre attribué à l’homme pour le même volet.
Au cas où les conditions de la demande du divorce se réunissent, la femme fera face aux problèmes des dépenses et charges juridiques très élevées, en plus de la lenteur du déroulement des formalités juridiques.
6. Le grand problème que la femme affronte concerne les effets du divorce qui la dénude de tous ses droits:
• La garde des enfants: l’âge de la garde est très précoce, en général 7 ans pour le garçon et 9 ans pour la fille (Les chiites, 2 ans pour le garçon et 7 ans pour la fille).
• La pension: au cas où on juge en faveur de la femme d’une pension précise, mais l’époux n’a pas de bonne situation, ce qui entraîne l’impossibilité de l’exécution qui se reflète, négativement, sur la famille.
• La maison conjugale: la loi libanaise ne comporte pas de texte sur ce sujet. La divorcée se trouve sans abri, surtout que la plupart des parents ne supportent pas leur fille et pour différentes raisons.
7. La violence des rapports sexuels: l’article 503 du Code pénal libanais stipule que celui qui force quiconque, outre son conjoint, par la violence et la menace à maintenir un rapport sexuel, est condamné aux travaux forcés pour une durée de cinq ans au moins. Cet article exclut l’épouse et offre à l’homme la possibilité de violer sa femme “légalement”.
8. La nationalité: Les enfants acquièrent la nationalité libanaise à travers leur père et non leur mère, sauf si l’enfant est illégitime. Alors que le Libanais qui épouse une étrangère lui octroie la nationalité libanaise un an après l’enregistrement du mariage.
 


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