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Interviewer
Amin Maalouf est un bonheur et un privilège à la fois. Après
un hiver de dur labeur et un printemps marqué par la sortie de son
dernier roman à succès: “Le Périple de Baldassare”,
sa présentation dans toutes les grandes villes de France et certains
pays d’Europe (Italie, Espagne, Luxembourg, Grèce) et avant son
départ pour son refuge de rêve, l’île d’Yeu, il nous
fait un tour d’horizon sur son œuvre, sa vie, ses croyances et sa philosophie
de l’existence. Un entretien passionnant, où les trois heures se
sont passées à une vitesse inouïe, tant mon interlocuteur
est prenant dans sa façon de raconter les choses, en toute simplicité,
avec érudition, le tout mêlé d’un humour fin et d’un
charisme particulier.
Maalouf est un de ces Libanais internationalement connus, grâce à ses livres: “Les Croisades vues par les Arabes, 1983”; “Léon l’Africain, 1986”; “Samarcande, 1988”; “Les Jardins de Lumière, 1991”; Le Premier Siècle après Béatrice, 1992”; “Le Rocher de Tanios, 1993 (Prix Goncourt)”; “Les Echelles du Levant, 1996”; “Les Identités Meurtrières, 1998” et “Le Périple de Baldassare, 2000”. Tant de romans à succès font de leur auteur un être exceptionnel, dont le Liban doit être fier. |
LABEUR CONTINU
En dépit de toute l’admiration qu’il suscite, il n’en demeure
pas moins modeste, profondément attaché à ses racines
libanaises. Son affabilité fait sa richesse et le place parmi les
grands écrivains.
Il m’a reçue dans son coquet appartement du 17ème arrondissement
de Paris, où règne une atmosphère “cosy” mais, surtout,
très littéraire par les livres qui s’y trouvent, les tableaux
et objets rares ramenés surtout du Moyen et Proche-Orient, ainsi
que d’Afrique.
UN LIVRE TOUS LES DEUX ANS
Que devient Amin Maalouf depuis le Prix Goncourt 93?
En 93, j’ai passé quelques mois à voyager un peu partout
et j’ai repris à travailler assez vite en 94 sur plusieurs choses
en même temps. J’ai publié, en 96, “Les Echelles du Levant”;
en 98, “Les Identités Meurtrières” et, cette année,
“Le Périple de Baldassare” sur lequel j’avais déjà
commencé à travailler en 94, tout en écrivant aussi
d’autres œuvres non encore publiées.
Dans l’ensemble, je continue à travailler comme avant, de la
même manière avec une moyenne d’un livre tous les deux ans;
parfois, cela peut tomber jusqu’à un an et demi. Je pense que c’est
un bon rythme quand on se consacre entièrement à l’écriture.
Est-ce vrai que vous venez de signer un opéra qui va bientôt
être joué à Salzbourg?
Oui, en plus des livres que j’ai publiés après 93, j’ai
terminé l’année dernière un livret d’opéra:
“L’amour de Loin”. C’est une commande du festival de Salzbourg qui doit
y être joué cet été. C’est l’histoire d’un troubadour
ayant vécu dans la région de Bordeaux. Sa bien-aimée
vivait du côté de Tripoli et a passé sa vie à
chanter cette personne qu’elle n’avait jamais rencontrée.
C’est une légende vraie. En fait, l’idée de cet opéra
vient de la compositrice Kaïja Saariaho, une Finlandaise qui a découvert
ce personnage du nom de Jaufré Rudel, ayant vécu à
Blaye, à côté de Bordeaux. Ce troubadour du XVIIème
siècle a toujours chanté une dame qu’il n’avait jamais connue.
La compositrice a eu l’idée d’écrire un opéra à
partir de cette histoire; elle en a parlé au directeur du festival
de Salzbourg, Gérard Mortier, dont l’ami, le metteur en scène
américain, Peter Sellars a suggéré mon nom pour écrire
le livret, ce fut fait et l’opéra sera joué à partir
du 15 août à Salzbourg.
Serez-vous à la première?
Oui, bien sûr.
C’est agréable d’écrire des opéras; peut-être
est-ce moins dur qu’un roman?
Cela m’a beaucoup intéressé; d’abord, ce n’est pas le
même type d’écriture qu’un roman, c’est moins long. Mes romans
vont de 300 à 500 pages, alors qu’un livret d’opéra est constitué
de 40 à 50 pages. Il n’y a pas que le nombre de pages, mais ce n’est
pas le même type de travail; un roman, je le travaille pendant trois,
quatre, cinq ou six ans, alors que pour un livret d’opéra c’est
plutôt quelques mois de travail; c’est une curiosité pour
moi, car je n’ai jamais écrit ce genre de texte et cela m’a beaucoup
intéressé d’explorer une nouvelle voie d’écriture.
Posant près du portrait de son père
Ruchdi avec qui il entretenait une relation privilégiée.
TOUJOURS INSATISFAIT
Je pense que ce genre de texte vous convient parce qu’en général,
vos écrits sont une musique.
En fait, il y a une contrainte supplémentaire quand on écrit
pour l’opéra et on doit tenir compte du fait que le texte va être
à côté d’une musique. Ce n’est pas la même manière
d’écrire, ni le même type de phrase.
En tout cas, je suis très curieux de voir ce que sera le résultat.
En général, vous vous documentez beaucoup avant d’écrire
un livre. Combien de temps vous faut-il pour en finir un?
Cela dépend, il y a des livres au cadre historique assez précis
pour lesquels je dois me documenter assez fort pour m’imprégner
un peu de l’époque. D’autres ne présentent pas ce type de
contrainte, donc la documentation est plus limitée et mes efforts
vont davantage vers la construction de l’histoire et, bien entendu, vers
l’écriture. Je suis quelqu’un qui écrit, relit et retravaille
beaucoup le texte. Il n’y a pas un paragraphe que je publie sans l’avoir
lu 40 ou 50 fois et corrigé tout autant.
Il y a donc tout un aspect du travail qui est commun à tous
les livres, dont certains exigent des recherches historiques plus importantes
que d’autres.
Vous êtes un perfectionniste?
En tout cas, je ne suis pas facilement satisfait; je dirais même
que je suis rarement satisfait. J’ai toujours envie de travailler et retravailler
et ne fais jamais confiance au premier jet d’un texte. J’ai toujours le
sentiment qu’il reste beaucoup de choses à changer, à améliorer.
MON PÈRE A JOUÉ UN RÔLE
DANS MA VIE
On remarque que votre père est toujours présent dans
vos livres; est-ce parce qu’il vous a beaucoup marqué dans votre
vie?
Oui, sûrement; c’est vrai qu’il y a une présence généralement
indirecte, c’est vrai qu’il a joué un rôle dans ma vie. Déjà
du seul fait de le voir écrire quand j’étais petit, j’ai
toujours considéré que travailler c’était écrire
et je n’ai jamais pensé à un autre type de travail.
Votre père était journaliste, mais a-t-il écrit
des romans?
Nous n’avons pas écrit la même chose. Lui a écrit
de la poésie, c’est ce qui l’a fait connaître surtout à
un moment de sa vie. Il a, aussi, rédigé des articles et
beaucoup de livres de critique sociale; il avait même préparé
un livre de critique musicale qu’il n’a jamais publié. Dans ces
domaines, je n’ai rien fait; en revanche, mon père n’a jamais écrit
de livres-fiction, ni de romans, ni de nouvelles. Pourtant, il racontait
très bien, alors que l’essentiel de mon œuvre est constitué
de fiction. Nous avons écrit tous les deux, mais dans des domaines
complètement différents et des langues différentes.
Lui a publié, pratiquement, tout en arabe et un livre en anglais,
alors que j’ai tout rédigé en français. On a fait
les mêmes choses, mais autrement.
Amin Maalouf nous montrant la précieuse bible
datant
de 1640 et ayant appartenu au roi James d’Angleterre.
UNE SYNTHÈSE DE L’ORIENT ET DE L’OCCIDENT
Pour vous enfant, le seul métier qu’on pouvait faire, c’était
d’écrire?
Oui, car autour de moi les gens écrivaient; c’était une
tradition familiale. Il y avait l’écriture et l’enseignement, c’étaient
les deux choses qui se pratiquaient dans ma famille. Quand j’ai commencé
à travailler, je ne me suis jamais posé de questions; j’allais
faire comme mon père; j’ai commencé dans le journalisme et
il m’est même arrivé qu’on écrive dans le même
journal pendant une période; lui en première page et moi
dans les pages intérieures. C’était une belle période
de laquelle je garde de beaux souvenirs. En plus, c’était l’époque
ayant précédé la guerre du Liban et ce sont des moments
qu’on se rappelle toujours avec nostalgie.
J’AI PARCOURU BEAUCOUP DE SIÈCLES
Votre père devait être très fier de vous?
Oui, je crois qu’on avait une relation très proche. Souvent,
il passait me voir au journal quand il venait remettre son article et on
allait se promener ensemble. C’était une période sympathique;
puis, la guerre est venue et on s’est dispersé. Nous sommes partis
en France et il venait nous voir de temps à autre, mais ce n’était
plus exactement comme avant; il y avait toujours chez chacun de nous comme
un serrement de cœur lié à tout ce qui est arrivé
dans le pays. Il est décédé depuis bientôt vingt
ans, le 17 août 1980.
Quelles sont en général, vos sources d’inspiration
et y a-t-il des périodes dans l’année plus propices que d’autres
pour écrire?
J’ai écrit des livres qui se passent à des périodes
très différentes. Quand je découvre un personnage
intéressant ou une époque propice, je me plonge dedans et
j’y trouve des choses passionnantes. Je dirai qu’on peut découvrir
des choses très intéressantes à toutes les époques.
J’ai déjà écrit des livres qui se passent à
des siècles différents. Ainsi, j’ai parcouru beaucoup de
siècles.
Vous êtes très branché sur les temps anciens
et sur l’Histoire, le futur ne vous intéresse-t-il pas?
Si, j’ai écrit un ouvrage d’anticipation: “Le Premier Siècle
après Béatrice”. Je m’intéresse à beaucoup
de choses et je fais mon choix en fonction du temps dont je dispose, de
priorités, de mes capacités de travail, mais si je faisais
la liste de tous les sujets dont j’aurais envie de parler, ce serait illimité.
Vous êtes par excellence une synthèse de l’Orient et
de l’Occident; votre succès est-il dû à cela?
Je ne sais pas si je suis une synthèse. On est très nombreux
à avoir une identité mélangée, avec toutes
sortes d’appartenances venant d’un peu partout. Je n’aime pas trop parler
de succès, c’est un mot qui n’a pas de sens pour moi, j’ai surtout
tendance à travailler, à essayer d’écrire des livres
que j’ai envie de publier et à essayer de bâtir quelque chose.
Mais le succès est très capricieux; il va et vient, ce n’est
pas important. L’important c’est, surtout, la possibilité de se
consacrer à l’écriture, d’avoir le temps et la liberté
de le faire.
Comment arrivez-vous à concilier votre vie sociale et familiale
et votre besoin d’écrire tout le temps?
Je trouve que je n’écris pas assez et que je devrais consacrer
beaucoup plus de temps à l’écriture; je n’ai jamais senti
qu’il y avait un conflit entre ma vie personnelle, ma vie familiale et
l’écriture.
Et la vie sociale?
Si on entend par là vie mondaine, je n’en ai pas, donc le problème
est résolu (rires). Pour le reste ou les choses importantes, la
famille, les amis, j’ai toujours du temps. Avoir un carnet plein de mondanités
n’a aucun intérêt pour moi; ma seule préoccupation
est d’essayer de trouver toujours des conditions qui me permettent de bien
travailler, d’avoir un bon niveau de concentration et de pouvoir m’adonner,
entièrement, au livre que je suis en train d’écrire.
Parlez-nous d’une de vos journées-type?
Généralement, je me lève le matin sans réveil-matin
que j’ai en horreur. Je ne me bouscule pas pour me lever et il m’arrive
de me réveiller tôt ou tard. Je prends un bon petit déjeuner;
puis, je rentre dans un tout petit bureau dans lequel j’essaie d’écrire
autant que je peux, généralement jusqu’au milieu de l’après-midi.
Après, je vais me promener; puis, je lis un peu, je parle avec des
amis, je règle de petites choses en suspens et le lendemain, je
recommence de la même manière.
Maalouf feuilletant “La Revue du Liban” en compagnie
de notre correspondante, Marie Bteiche.
UN ÊTRE SILENCIEUX ET SOLITAIRE
Parlez-nous un peu de l’île d’Yeu où vous habitez une
bonne partie de l’année; est-ce là que vous écrivez
le plus gros de vos œuvres?
Oui, mais je n’y vais pas aussi souvent que je devrais, vu mes fréquents
voyages et mes engagements à Paris. C’est un endroit très
calme. A l’exception de la Corse, c’est l’île française la
plus éloignée de la côte. Elle est dans l’Atlantique
et je traverse 500 km de Paris pour arriver à l’endroit où
je prends le bateau qui met une heure et quart pour m’y emmener. L’île
est petite (8kmx3), compte 5.000 habitants en hiver et elle est très
bien préservée; pas d’immeubles élevés, ni
de constructions désordonnées; tout est très réglementé.
Une partie de l’île interdite à la construction reste
très sauvage. Je suis dans une zone complètement isolée
et très calme; quand trois bicyclettes passent dans la même
journée, je sors voir ce qui se passe.
C’est donc l’endroit idéal pour pouvoir écrire?
Oui, si on est par tempérament porté sur la solitude
et le calme. Je connais des gens parmi mes amis qui ne supportent pas de
se trouver sur une île et se sentent étouffés. Je peux
passer ma vie là-bas, cela ne me dérange pas, tant que j’arrive
à travailler. J’ai toujours été quelqu’un de silencieux,
d’assez solitaire et si on m’enfermait dans une pièce de 2mx3 pendant
deux ans pour travailler, je ne serais pas dérangé.
De quel signe du zodiaque êtes-vous?
De quel signe du zodiaque... (éclats de rires). Je suis né
le 25 février.
Poissons, alors?
Ah! oui, c’est peut-être pour cela que je suis allé dans
l’Atlantique, pour y nager comme un poisson dans l’eau.
Etes-vous croyant?
En quoi? (Rires).
En Dieu,... et quel est l’impact du clergé sur vous, car il
apparaît beaucoup dans vos livres?
Je m’intéresse au phénomène religieux, mais je
n’aimerais pas étaler mes croyances. Le mot croyant n’est pas un
mot que j’utilise. A mon avis, un croyant est quelqu’un qui croit en certaines
valeurs; d’abord, en la dignité de l’être humain, indépendamment
du fait qu’il associe cette croyance à une religion ou pas.
Quelqu’un qui a une croyance religieuse et ne croit pas en la dignité
de l’être humain, n’est pas pour moi un croyant; quelqu’un qui n’a
pas d’appartenance religieuse, mais croit en la dignité de l’être
humain est un croyant. Ce que j’ai donc envie de demander aux gens, ce
n’est pas de quelle foi êtes-vous, mais en quoi croyez-vous réellement?
J’aimerais les juger sur leur véritable croyance, leur attitude
à l’égard des autres et de la vie.
C’est pourquoi, le mot croyant ne veut rien dire réellement
pour moi. Si on parle de dogmes, ils ne m’intéressent pas; si on
parle de préoccupation, du sort des autres, de libertés de
croyance, de libertés religieuses, de spiritualité et de
l’aspiration de l’être humain à quelque chose de plus élevé,
oui cela m’intéresse.
S’il s’agit d’une réflexion sur la finalité de la vie
sur ce qu’il y a au-delà, sur l’interrogation sur ce que nous sommes
en train de faire sur terre, d’où nous venons, où nous allons,
tout cela m’intéresse profondément. Mais qu’on ne me demande
pas d’aligner les dogmes auxquels je crois, je dirais que profondément
cela ne m’intéresse pas, car j’y suis indifférent.
LA BIBLE DU ROI JAMES
Mais vous croyez quand même qu’il y a une force dans cet univers
qui
nous gère?
Je l’espère, mais je n’en sais rien. Je ne crois pas aussi spécifiquement
au destin. Je pense que nous ne contrôlons pas tout ce qui se passe
dans nos vies pour des raisons évidentes: je n’ai pas choisi de
naître, ni la famille, ni l’endroit ou le milieu où je suis
né, je ne vais pas choisir le jour de ma mort. Il y a beaucoup de
choses dans ma vie qui sont essentielles et que je ne choisis pas; donc,
je ne veux pas faire semblant d’être maître de mon destin.
Mais qui gère ce destin?
Je ne sais pas. Si on me dit: c’est Dieu, je dirai: peut-être.
Si on me dit: c’est le hasard, je m’interroge. Si on me demande: est-ce
que tu es athée? Je répondrai non. Si on me dit: est-ce que
tu crois qu’il y a quelque chose après la mort? Je dis j’espère.
Est-ce que je le sais, je dis non, j’espère; le jour où je
mourrai, je serai très curieux de savoir ce qui va se passer. Soit
il ne se passe rien et je n’aurai pas de regrets parce que je ne pourrai
pas être conscient, soit il se passera quelque chose et je serai
très heureux. Mais que je dise: “Je sais”, non, je ne sais pas;
je pense que le mystère est là. Je ne sais pas, j’attends,
j’espère, je ne voudrais pas que tout se termine dans la poussière;
mais je ne sais pas, je n’ai pas aucun moyen de savoir.
Est-ce vrai que vous possédez une bible datant du XVIIème
siècle?
Oui, elle a été publiée en 1640, à Londres
et a appartenu au roi James. Je l’ai achetée en 1965, il y a 35
ans dans une petite boutique de Porte Bello Road; quand je suis venu en
France, j’étais parti du Liban en catastrophe et je n’avais pas
emporté de livres avec moi. Un jour, mon père est venu me
voir m’apportant cette bible qui, pourtant, était assez lourde à
porter, mais il savait que j’y tenais tellement. Elle était dans
ma chambre quand j’étais chez mes parents et depuis elle est exposée
ici sur un lutrin, comme cela, tout le temps, elle n’est jamais loin de
moi.
UN LIVRE CONTRE LA SUPERSTITION
Dans “Le Périple de Baldassare”, on sent que vous vous inspirez
un peu de la guerre du Liban, du fanatisme des gens, d’autres qui accèdent
au Pouvoir sans vraiment le mériter, d’autres qui s’enrichissent
subitement, est-ce vrai?
Honnêtement, dans ce dernier livre, moins que d’autres, je dirai
que les événements du Liban n’ont pas été loin
de mes pensées, même si je n’en parle pas directement; c’est
moins évident. C’est plutôt un livre contre la superstition
et l’obscurantisme.
Et le personnage est inquiet, toujours à la recherche d’un
monde meilleur?
Oui, il me ressemble, il ne sait pas; il se demande, espère,
doute et n’affirme jamais détenir la solution.
Mais il est attachant, on le sent authentiquement sincère...
Il doit être sincère. C’est un homme de raison qui ne
sait pas vraiment où il se trouve. Il est influencé par tout
ce qui se dit autour de lui et vit une époque difficile où
il n’est pas aisé de garder la tête froide. J’ai passé
six ans avec ce personnage et j’étais content de le fréquenter.
Quels sont vos projets futurs?
Maintenant, j’essaie de me consacrer le plus possible, entièrement
à mes livres, mais j’ai des caisses pleines de projets que j’ai
envie de faire avancer. Cela m’occupe beaucoup et m’occupera durant tout
le temps qui me reste à vivre.
Auriez-vous aimé vivre à l’époque de Baldassare?
Non, je m’intéresse plutôt au passé, mais je n’aurais
jamais voulu vivre au XVIème siècle. Il suffit de penser
si je devais aller chez un dentiste à cette époque, cela
m’aurait découragé. Non, je suis content de vivre aujourd’hui
et de m’intéresser au passé.
Que pensez-vous de toutes ces nouvelles technologies, ce progrès
inouï que vit le monde avec dernièrement la découverte
du génome humain?
Je trouve cela passionnant. On a de la chance de vivre une époque
comme celle-ci et la génération qui nous suivra, aura encore
plus de chance. On réalise des progrès énormes dans
tous les domaines. On a la chance de pouvoir combattre des maladies jusque-là
rebelles et demain, on les combattra encore mieux; on a de la chance de
vivre plus longtemps, en meilleure santé, plus libre et plus épanoui
que les générations qui nous ont précédés.
Je trouve cela merveilleux. J’ai l’impression que tout ce que nous avons
vécu jusque-là, c’était de la préhistoire et
que la vraie histoire de l’humanité ne fait que commencer. Il faut
s’en réjouir.