MALGRÉ L’EFFRITEMENT DE LA COALITION GOUVERNEMENTALE EN ISRAËL
UN ACCORD POSSIBLE AVANT LE 13 SEPTEMBRE!
Même si Camp David n’a donné aucun résultat concret, nul ne veut baisser les bras. Le “God Father” américain autant que les protagonistes ont exprimé leur attachement à la poursuite du dialogue. Le président Bill Clinton se dit toujours déterminé à aboutir à un accord avant la fin de l’année et voudrait faire une sortie en beauté de la Maison-Blanche. Le Premier ministre israélien, Ehud Barak et le chef de l’Autorité palestinienne, Yasser Arafat affirment, aussi, la nécessité de poursuivre les négociations et mènent une vaste action diplomatique pour expliquer leurs points de vue respectifs. M. Barak doit travailler à conforter sa position à l’intérieur, surtout après la démission de son ministre des A.E., David Lévy. M. Arafat, pour sa part, essaye de trouver auprès des pays arabes un appui à ses thèses, notamment sur la question-clé de Jérusalem.
 
Mobilisation arabe pour Jérusalem.
Lévy: Le perpétuel insatisfait.
Moshé Katsav, 
nouveau président israélien.

Pour le Premier ministre israélien, la situation est loin d’être de tout repos. Il fait face à des élections anticipées et son Cabinet est très fragilisé, même s’il a tout juste bénéficié d’un répit en surmontant une nouvelle motion de censure, la deuxième en l’espace d’un mois, déposée par le Likoud.
La droite accuse Barak d’avoir accordé trop de “concessions” aux Palestiniens au sommet de Camp David II. A la tribune de la Knesset, Barak s’est défendu en déclarant “qu’aucune concession portant sur Jérusalem n’avait été faite”.
Pourtant, David Lévy avait affirmé que “pour la première fois, un gouvernement israélien est prêt à diviser Jérusalem”, soulignant qu’il s’opposait à la politique de Barak.
Pour l’heure, la marge de manœuvre du Premier ministre est très limitée, d’autant plus que la coalition gouvernementale s’est disloquée. Trois partis de sa majorité, le “Shass”, le parti russophone “Israël Be Aliya” et le parti national religieux l’avaient abandonné, au moment où il se rendait à Camp David, pour rallier l’opposition.
Mais si Ehud Barak a réussi à sauver, provisoirement, son équipe, il a reçu un cinglant camouflet avec l’élection de Moshé Katsav, candidat de la droite à la tête de l’Etat, entraînant la défaite de Shimon Pérès. La Knesset a refusé la présidence de l’Etat hébreu à l’ex-Premier ministre travailliste, “prix Nobel de la paix” pour élire, à la surprise générale, le candidat de la droite.
Peu connu sur le plan international, le candidat du Likoud a été élu au deuxième tour du scrutin avec 63 voix contre 57 à Pérès et devient le huitième chef de l’Etat hébreu et le premier de droite.
Né en Iran en 1945, d’une famille de huit enfants, il est arrivé en Israël peu après 1948 et a vécu dans un modeste camp pour nouveaux immigrants au sud de Tel-Aviv. Il fait son entrée à la Knesset en 1977 et se donne une image de modéré, en raison de son ton mesuré et de son pragmatisme. Partisan du Grand Israël, c’est un opposant de vieille date, des accords d’Oslo.
“J’ai l’intention de contribuer à la réduction des tensions au sein de notre société et je serai le représentant de toutes les couches et de toutes les classes sociales”, affirme-t-il après son élection.
 
Barak: Un gouvernement fragilisé.
Jérusalem au centre des discussions 
d’Arafat avec le roi Mohamed VI, 
qui préside le comité “Al-Qods”.

“L’avenir de Jérusalem n’est pas seulement une responsabilité palestinienne. C’est, aussi, une responsabilité arabe, musulmane et chrétienne”. Tel est le nouveau thème de l’action qu’entreprend le chef de l’Autorité palestinienne au niveau occidental et arabe.
A Paris, il a été reçu par le président Jacques Chirac et le Premier ministre Lionel Jospin, sachant que la France préside, depuis le premier juillet et pour six mois, l’Union européenne. D’après les informations données sur ces entretiens, M. Chirac aurait encouragé les parties à poursuivre leurs efforts. “Si, dit-il, les négociations de Camp David n’ont pas abouti, l’espoir qui est né est toujours là et les derniers obstacles peuvent être aplanis”.
La France est consciente du rôle qu’elle peut jouer en cette phase cruciale du processus de paix. Tel que l’a indiqué l’Elysée, la veille de sa rencontre avce Arafat, M. Chirac s’était entretenu, par téléphone, avec le Premier ministre israélien et après avoir reçu le leader palestinien, il a eu de même une conversation téléphonique avec son homologue égyptien, le président Hosni Moubarak, autre acteur important œuvrant pour le rapprochement des positions des parties antagonistes.
Après Paris, M. Arafat a entamé une longue tournée dans le monde arabe, afin de le mobiliser face aux échéances cruciales. L’Arabie saoudite fut la première étape de son périple. Le chef de l’Autorité palestinienne a été reçu par le roi Fahd et le prince héritier Abdallah. Il s’est rendu à Sanaa; puis, au Maroc où il a été reçu par le roi Mohamed VI qui préside le comité de Jérusalem au sein de l’organisation de la Conférence islamique. A Rabat, il a rencontré, aussi, le roi Abdallah II de Jordanie en visite au Maroc pour les festivités marquant le premier anniversaire de l’intronisation du jeune monarque chérifien.
Le leader palestinien affirme avoir reçu des soutiens solides de la part des dirigeants qu’il a rencontrés avant de poursuivre sa tournée en  Algérie et en Tunisie. Tous ont réaffirmé leur appui aux droits du peuple palestinien à l’autodétermination et à un Etat indépendant sur son territoire national ayant Jérusalem comme capitale.
Concernant la proclamation de l’Etat palestinien annoncée, en principe, pour le 13 septembre, on relève un certain assouplissement dans la position de M. Arafat qui semble prêt à “s’en remettre à l’avis des Etats frères”. Il pourrait donc reporter cette annonce à une date ultérieure. Il serait de même intéressant de rappeler qu’au début de juillet, lors d’une rencontre avec le leader palestinien, le président Chirac avait averti “qu’il ne serait pas chose facile de convaincre les quatorze autres membres de l’UE de reconnaître un Etat palestinien, si les Etats-Unis s’opposaient à une telle initiative”. Le message est bien clair.
Le président américain a, d’ailleurs, réitéré cette position dans une interview accordée à la télévision israélienne après Camp David.
M. Clinton a mis en garde Arafat contre toute proclamation unilatérale d’un Etat indépendant .“Je pense, a-t-il affirmé, que ce serait une grave erreur d’agir de manière unilatérale et de se retirer du processus de paix. Si cela se produisait, il y aurait, inévitablement, des conséquences non seulement ici mais dans le monde entier”.
La mise en garde américaine, les conseils de la France et de l’Egypte sont en train sans doute de porter leur fruit. Arafat met de l’eau dans son vin. Mais peut-il faire face au courant islamiste et d’opposition au sein de l’entité palestinienne? Au cours de sa tournée arabe, il a évoqué la possibilité de la tenue d’un sommet arabe restreint ou élargi, sur la question de Jérusalem et d’y faire participer, si possible, des pays islamiques.
La Ville Sainte a été de même au cœur des entretiens au Caire entre le président Moubarak et le roi Abdallah de Jordanie.
Le temps presse. La date butoir du 13 septembre n’est plus très éloignée et le président Clinton est toujours décidé à parvenir à un accord de paix avant la fin de l’année. Les propos tenus lors de l’interview exclusive qu’il a accordée à la télévision israélienne, sont explicites: “Le processus de paix est évolutif. Si nous ne terminons pas cette année, les positions pourront changer par la suite. Si cet accord n’intervient pas d’ici à la fin de l’année, je veux du moins être sûr que j’ai fait tout mon possible. Ce n’est pas facile, mais c’est une affaire énorme et importante. Les deux parties doivent s’accorder sur le fait qu’il existe une solution. C’est leur intérêt vital”.
Le chef de l’Exécutif US a donc dépêché dans la région, M. Edward Walker, secrétaire d’Etat adjoint pour le Proche-Orient, en vue de poursuivre le dialogue entre les deux parties.
Reçu au Caire par le président Moubarak, en présence de M. Amr Moussa, chef de la diplomatie égyptienne, M. Walker a fait preuve d’optimisme affirmant qu’il était “certain” qu’Israéliens et Palestiniens parviendront à un accord définitif avant le 13 septembre.
Pour l’heure, les protagonistes ont repris le dialogue pour discuter de l’application des accords intérimaires. Les négociateurs israélien et palestinien, Oded Eran et Saëb Erakat, se sont retrouvés à Jéricho pour “discuter de la majorité des questions intéressant le processus de paix après Camp David”. De même, ils ont parlé de la libération des prisonniers palestiniens, du troisième redéploiement israélien en Cisjordanie et de questions économiques.
A Gaza, Shlomo Ben Ami, ministre israélien de la Sécurité intérieure, a rencontré le colonel Mohamed Dahlan, chef de la police préventive palestinienne, afin de mettre au point des mécanismes permettant d’organiser des rencontres entre des responsables des deux côtés, afin de poursuivre les négociations.
Tout indique que, du côté israélien comme du côté palestinien, il existe un réel désir d’aboutir à un accord de paix. Reste à savoir comment vont être réglées les questions-clés sur lesquelles a buté Camp David, notamment l’avenir de Jérusalem qui fut la pierre d’achoppement des négociations.

NELLY HELOU

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