Venu
à Beyrouth pour signer avec son homologue libanais un accord de
coopération, le ministre syrien de l’Information s’est permis de
critiquer le communiqué des prélats maronites et a insisté
sur “la nécessité de faire taire les voix sectaires”. Mais
contrairement à ce que croit ce responsable baasiste, ce ne sont
pas les voix auxquelles il pense qui doivent être réduites
au silence.
Nous sommes d’accord avec le ministre syrien de l’Information quand
il formule le souhait “de voir réduire les voix sectaires au silence”.
Mais ces voix ne sont pas celles auxquelles pense M. Adnan Omrane,
quand il commente la controverse instituée autour du retrait militaire
syrien, suite à la diffusion du communiqué de l’assemblée
des prélats maronites.
Venu à Beyrouth, à l’effet de signer un accord de coopération
avec son homologue libanais dans le domaine de l’information, M. Omrane
a soutenu que “l’armée syrienne s’était déployée
au Liban pour mettre fin au sectarisme et sauver une partie de notre peuple
(les chrétiens) de l’anéantissement”.
N’en déplaise au responsable syrien, les voix sectaires qui
se sont élevées ces derniers temps, ne se trouvent pas du
côté chrétien. Faisant montre de complaisance à
l’égard de la Syrie dont elles tirent leur force et qui assure leur
survie politique, ces voix ont interprété à leur manière
le communiqué de Bkerké et les prises de position foncièrement
nationales du chef spirituel des maronites.
M. Omrane et ses amis (libanais) oublient que Bkerké a cautionné
l’accord de Taëf et sans son consentement, ce dernier n’aurait pu
être appliqué - sélectivement, d’ailleurs - preuve
en est que plusieurs hommes politiques, l’ex-président Hraoui en
tête, en avaient réclamé l’amendement.
Est-ce de cette manière qu’on remercie le patriarche maronite
qui a jeté tout son crédit dans cette affaire, au risque
de provo-quer une vague de mécontente-ment au sein de sa communauté?
Au temps du gouvernement Aoun, des dizaines de manifestants ont investi
le siège patriarcal et scandé des slogans hostiles à
l’éminent prélat.
Feu le cardinal Méouchy avait connu le même sort durant
l’insurrection de 58, quand il a reçu à Bkerké des
dignitaires musulmans, qu’en a vu prier dans le grand salon du patriarcat.
Ce qui lui avait voulu le titre de “patriarche des mahométans”.
Puis, pourquoi certains critiquent-ils le communiqué des archevêques
maronites? Est-ce parce qu’il réclame l’application de l’accord
de Taëf, surtout après le retrait israélien du Sud,
ce qui rend la présence militaire syrienne superflue?
Le cardinal-patriarche a évoqué dans une déclaration
à une station radiophonique étrangère, un discours
du président Hafez Assad prononcé un certain mois de juillet,
dont il ressort que “les troupes syriennes étaient entrées
sans autorisation officielle en territoire libanais”.
M. Omrane a évité de répondre à ce point
en se limitant à dire: “J’aurais souhaité qu’on ne me posât
pas cette question, parce que nous parlons aujourd’hui de choses sérieuses”
(sic)...
Pour en revenir à ce même discours, nous nous rappelons
que le défunt président s’était engagé “à
rapatrier ses soldats dès qu’un seul Libanais en formulerait la
demande”...
Oui, il faut faire taire les voix sectaires, mais celles qui induisent
l’opinion publique en erreur, non les voix de Libanais authentiques soucieux
de redonner à leur pays le statut d’Etat indépendant et souverain,
en le libérant de toute tutelle étrangère ou “fraternelle”... |