Lundi dernier, le doyen d’âge de l’Assemblée, M. Kabalan
Issa el-Khoury (98 ans), a invité la nouvelle législature
à siéger le mardi 17 octobre, aux fins d’élire le
président de la Chambre et de constituer le bureau.
Les consultations parlementaires en vue de la désignation du
nouveau Premier ministre pourront, alors, commencer. Jusqu’ici, le président
Nabih Berri est assuré de se succéder à lui-même
et sera réélu d’office. Il en est de même de M. Elie
Ferzli, vice-président de la Chambre, à moins qu’un portefeuille
ministériel - celui des Affaires étrangères qu’il
convoite selon sa coterie - lui soit confié!
Le bureau du parlement serait reconduit, sauf deux de ses membres (non
élus), ceux-ci devant être remplacés par leurs successeurs,
à savoir: MM. Farid el-Khazen (à la place de M. Camille Ziadé);
Sebouh Hovnanian, en remplacement de Jacques Jokhadarian. M. Ayman Choucair
assumerait la charge de secrétaire du bureau, alors que MM. Antoine
Haddad et Abdel-Rahman Abdel-Rahman seraient désignés commissaires.
Après sa réélection, le chef du Législatif
évoquerait dans son discours des principes et des constantes qui
semblent devoir constituer les grandes lignes de la déclaration
ministérielle du futur Cabinet.
HARIRI OU MIKATI?
D’après des sources renseignées, le président
du Conseil désigné, en l’occurrence M. Hariri, se trouverait
devant l’alternative suivante quand il aura à procéder
à la répartition des portefeuilles ministériels: prendre
en charge le ministère des Affaires étrangères ou
celui des Finances, à moins de confier ce dernier à un député
de son bord.
On prête aux milieux chiites l’intention de réclamer le
portefeuille des Finances à un titulaire de leur communauté,
à moins que celui de la Défense lui soit attribué,
comme c’est le cas actuellement.
Jusqu’ici, seul M. Hariri serait chargé de former le nouveau
gouvernement. Cependant, certains milieux n’écartent pas la possibilité
qu’il soit fait appel in extremis à M. Najib Mikati, ministre des
Travaux publics et des Transports, au cas où des difficultés
de dernière heure viendraient à se poser.
Pour renforcer ses chances, M. Hariri aurait, dit-on, renoncé
à “l’équipe homogène” qu’on lui prêtait l’intention
de former, pour rallier ceux qui plaident en faveur d’un gouvernement politique
d’entente, en insistant sur la nécessité d’accorder à
ce dernier des pouvoirs exceptionnels, surtout dans certains domaines,
économique notamment, exigeant de la rapidité dans la prise
des décisions et de leur application.
De toute manière, la nouvelle équipe gouvernementale
devra, selon les milieux proches des hautes autorités, se conformer
scrupuleusement aux directives et décisions du Conseil des ministres,
les institutions étatiques n’étant pas empêchées
d’exercer leur droit de contrôle, en application du système
démocratique, contrairement à ce qui se passait sous le précédent
régime. De fait, le chef de l’Etat ne cesse de souligner l’importance
de réactiver les organismes de l’Etat, lesquels régissent
les institutions et définissent les attributions des responsables.
Aussi, le président Berri s’emploie-t-il à rapprocher
le président de la République de M. Hariri, pour prévenir
tout malentendu entre eux.
LES BLOCS PARLEMENTAIRES SE CONCERTENT
En prévision des consultations parlementaires que le chef de
l’Etat entreprendra à partir du 17 courant, les blocs de l’Assemblée
commencent à se concerter, à l’effet de définir leur
choix quant à la personnalité appelée à assumer
les charges de Premier ministre et, partant, aux membres du Cabinet.
D’ores et déjà, se pose avec acuité la question
de la représentation des partis, étant donné que certaines
communautés voudraient être représentées au
sein du gouvernement par des éléments non affiliés
à des partis politiques, quels qu’ils soient, afin de conserver
leur liberté d’action.
Quoi qu’il en soit, le président Lahoud et il l’a rappelé
cette semaine au cours de sa rencontre hebdomadaire avec le chef du Législatif,
le mécanisme pour la désignation du chef du gouvernement
étant clairement défini par la Constitution, il se conformera,
scrupuleusement, au texte constitutionnel et se tient à égale
distance de tous les “présidentiables”.
Aussi, exigera-t-il des députés de citer, nommément,
leur candidat à la présidence du Conseil. Les présidents
Lahoud et Berri sont d’accord sur la nécessité d’épargner
au pays d’éventuelles secousses en rapport avec le problème
gouvernemental. Et ce, en favorisant la mise sur pied d’une équipe
ministérielle apte à redresser la situation dans tous les
domaines et, en premier lieu, dans le domaine socio-économique.
Cependant, le président Berri ayant déclaré que
la difficulté dans le problème gouvernemental réside
moins dans la désignation du Premier ministre que dans la formation
du Cabinet, les milieux politiques en ont déduit que des obstacles
pourraient entraver la constitution du gouvernement, inhérente à
la répartition des portefeuilles entre les communautés, surtout
en ce qui concerne les portefeuilles des Affaires étrangères
et des Finances.
M. Berri a laissé entendre que le nouveau Cabinet sera politico-parlementaire
élargi, formé d’un nombre de ministres variant entre vingt-quatre
et trente membres; de manière à en faire un gouvernement
d’entente nationale dans toute l’acception du terme.
À QUAND LA RENCONTRE LAHOUD-HARIRI?
Pour en revenir à la rencontre entre le président Lahoud
et M. Hariri, les cercles politiques se perdent en conjectures quant à
la date exacte à laquelle elle aura lieu. Mais ils pensent que lorsque
celle-ci sera fixée et connue, cela prouvera que tout obstacle sera
éliminé en ce qui concerne le choix des membres du futur
Cabinet.
Par ailleurs, le fait que le président Bachar Assad ait préféré
reporter sa visite au Liban, dans le cadre de sa tournée arabe,
jusqu’après la formation du nouveau gouvernement, témoigne
de son souci de ne pas interférer dans les tractations en cours
autour de ce problème.
Pendant ce temps, plusieurs sujets de diversion sont maintenus au centre
du débat politique, entre autres ceux relatifs à la présence
militaire syrienne, à l’abolition du confessionnalisme politique
et, tout dernièrement, aux prérogatives présidentielles
dans la désignation du Premier ministre et du choix des membres
du gouvernement. Ainsi, le problème gouvernemental serait traité
loin des feux de la rampe et à l’abri d’éventuelles ingérences
de la part de certains cercles influents qui voudraient placer des ministrables
de leur bord.
Il nous revient que les responsables syriens qui sont restés
à l’écart des élections législatives et tout
en préconisant la constitution d’un “gouvernement d’entente”, sont
décidés à ne pas intervenir dans tout ce qui concerne
l’échéance gouvernementale.
HAZIM PREND LE PARTI DE BKERKÉ
Enfin, par rapport à la controverse autour du “communiqué
des prélats maronites”, il importe de relever une prise de position
ferme et claire de S.B. Mgr Ignace IV Hazim, patriarche grec-orthodoxe,
qui a pris le parti de Bkerké, en défendant le droit des
Libanais d’exprimer leur opinion envers toutes les questions vitales engageant
l’avenir de la patrie.
“Ce qui nous intéresse, a dit l’éminent prélat,
est le contenu et non les réactions qui ne sont pas souvent au niveau
d’un Etat et d’un peuple riches par leur intelligentsia et leurs universitaires.
Les réactions prétendûment suscitées par des
appels, des communiqués ou des déclarations sont inspirées
de l’extérieur. Et si les instances religieuses parlent, c’est parce
que les politiciens gardent le silence, au lieu de dénoncer les
dangers et périls qui menacent la patrie.”