A
l’occasion des consultations en vue de la désignation du Premier
ministre et de la constitution du nouveau Cabinet, les Libanais s’interogent
sur la nature et la forme du gouvenement et se demandent s’il serait capable
de sortir le pays de la situation si peu enviable dans laquelle il se débat.
Il le pourrait si ses membres étaient choisis parmi les éléments
compétents et capables de faire œuvre utile. Faudrait-il chercher
les ministres en dehors de la Chambre?
A l’occasion des consultations parlementaires en vue de la désignation
du Premier ministre et de la constitution du nouveau gouvernement, les
Libanais bien pensants ont le droit et le devoir de s’interroger sur la
formule à adopter, susceptible de sortir leur pays de la situation
si peu enviable dans laquelle il se débat depuis la fin de la guerre,
en raison de l’application sélective de l’accord de Taëf.
Il y a près d’un demi-siècle et à la suite de
la crise grave ayant provoqué la chute du régime de Béchara
el-Khoury, notre grand confrère, le regretté Georges Naccache
dénonçait en termes particulièrement durs, la démocratie
parlementaire dans les cadres de notre société politique,
disant que “c’est la forme la plus oppressive de gouvernement, parce qu’elle
a hypothéqué la souveraineté nationale, en instituant
la dictature d’un club de notables... Notables de gouvernement et notables
d’opposition sont faits de la même farine”.
Ces notables s’aident, mutuellement et couvrent leurs arrières
pour se maintenir aux postes de commande et se partager les honneurs du
Pouvoir, sans se soucier du brave peuple, de sa sécurité,
de ses libertés et de son avenir.
Peut-on déterminer les responsabilités, alors que chaque
citoyen, qu’il ait agi ou subi par intérêt, complaisance ou
veulerie, est responsable de ce qui lui arrive?
“Le Pouvoir, écrivait encore Georges Naccache, a été
pro-gressivement livré à cette multi-dictature confessionnelle,
in-compétente, vaniteuse et cor-rompue dont le pays subit la tyrannie”...
Et encore: “Ce qui a faussé toute la mécanique du régime
parlementaire, c’est que l’on a prétendu fonder des ma-jorités
et former des gouverne-ments sur des coalitions confes-sionnelles et régionales,
exacte-ment comme si ces groupe-ments étaient des partis”... Où
va le Liban ainsi gouverné? Il va où nous voyons...”.
Nous avons jugé opportun de reproduire ces réflexions
émises à une époque où le pays était
affligé d’une classe politique - pareille à quelques variantes
près à celle d’aujourd’hui - qui se signalait par son insouciance,
son incompétence et son impéritie!
Le chef de l’Etat tient entre ses mains notre ultime chance. Aussi,
certains s’emploient-ils à entraver son action - comme ils l’ont
fait pour la réforme administrative - afin de continuer à
tenir le haut du pavé dans la République et à en manipuler
tous les rouages.
Oui, il faut sortir de cette situation déliquescente qui, si
elle venait à se perpétuer, mènerait le pays à
sa perte. Il faut d’urgence lever cette hypothèque pour pouvoir
dégager une autorité salvatrice, digne de ce nom.
D’aucuns pourraient se plaindre de la pénurie d’hommes. C’est
faux. Les hommes existent; il s’agit de les trouver et de les placer aux
postes correspondant à leur qualité et compétence.
Peut-être fraudrait-il les chercher en dehors de l’hémicycle
et mettre fin au cumul des charges mi-nistérielles et parlementaires,
pour assainir notre climat poli-tique et, partant, permettre au Pouvoir
de jouer son rôle, loin de toutes les compromissions, “l’anarchie
étant partout, quand la responsabilité n’est nulle part.” |