SPOTS MULTICOLORES SUR L’AUTRICHE
“AU CŒUR DU CŒUR DE L’EUROPE”
Le charme de la ville baroque allié aux effets de l’Art Nouveau nous pénètre déjà de toutes parts. Progressivement, nous allons réaliser que cette ville a non seulement appartenu à un vaste empire, mais qu’elle en a gardé le style. L’extraordinaire déploiement de ses palais, musées (100), cathédrales, la panoplie de ses opéras, théâtres (50), expositions, concerts (par milliers), ballets, bals (200 par an), festivals n’auraient pas présenté leur relief séduisant, n’étaient-ce la courtoisie et l’élégance de ses citoyens. Nos guides, la souriante Helga Gerbl et l’érudit Erwin Pulka se chargeront de nous faire découvrir la capitale des Habsbourg.
Premier contact, l’Hôtel Impérial sur le Kärtner Ring où nous attend Helga Gerbl, représentante de l’Office de tourisme de la ville de Vienne, autour d’un petit déjeuner viennois pour, ensuite, nous emmener visiter les lieux, accompagnée de la directrice des relations publiques, Mme Petra Engl-Wurzer. Inauguré le 28 avril 1873, à temps pour accompagner l’Exposition internationale qui s’est tenue la même année à Vienne, l’hôtel eut pour premier hôte l’empereur Dom Pedro II du Brésil et reçut en 1879 la visite de l’empereur François-Joseph qui vint y accueillir le prince Otto von Bismarck. Depuis, de nombreux hôtes prestigieux séjournèrent à l’hôtel dont Elisabeth II, Indira Gandhi, les présidents Tito, John et Robert Kennedy, Nixon, Bush, Chirac, Hillary Clinton, etc... et les vedettes du show-biz, ainsi que les figures du jet-set international. Dans ses suites dont la nuitée peut s’élever à 5.000 dollars, on palpe de près la munificence impériale qui marque de son empreinte ses majestueux escaliers de marbre, ses salles d’apparat, ses plafonds à caissons dorés à la feuille et, aussi, ses anciennes écuries converties en salons de réception dont les plafonds à voûtes croisées sont peints à la main.

VIENNE VUE D’EN HAUT
Oubliées les heures sans sommeil; nous voici au Prater, parc d’amusement haut en couleurs qui dispense la fantaisie et la détente à toutes les saisons de la vie. Embarqués dans la Grande Roue qui se présente à l’intérieur comme un petit café où Helga débouche en notre honneur une bouteille de champagne, nous voici emmenés dans l’espace ayant vue sur Vienne dans les hauteurs.
On retrouve les traces du bassin viennois en remontant à hauteur de 400 ans avant J.-C. sur les pas des Celtes suivis des Romains, des Lombards, des Slaves. La première mention de la ville date de 1137. Elle devient vers 1155 la résidence des ducs de Babenberg et, progressivement, depuis 1282, le centre de gravité de la monarchie des Habsbourg dont l’empire se prolonge sur six siècles et ne prend fin qu’en 1918 au cours de la Première Guerre mondiale.
Néanmoins, le premier des Habsbourg qui s’estimait réellement viennois était, en 1358, comme il le prétendait, le “fondateur” Rudolph IV. C’est lui qui donna le coup d’envoi de l’embellissement de la ville. Certains des empereurs qui marquèrent de leur empreinte l’Histoire du pays ont leurs noms inscrits au château de Schönbrunn, résidence d’été des empereurs d’Autriche: Maximilien Ier (1434-1519), Charles Quint (1500-1558) à la tête d’un empire “où le soleil ne se couche jamais”, Marie-Thérèse (1717-1780), la seule femme qui eût régné sur l’Autriche sans se faire couronner (elle eut 5 fils et 11 filles) à l’origine de nombreuses réformes et de l’âge d’or traversé par le pays, Joseph II, son fils (1741-1790) apôtre de la tolérance religieuse et François-Joseph (1830-1916, époux de Sissi) à qui Vienne doit la Ringstrasse. C’est le 20 septembre 1857 que l’empereur François-Joseph fit démolir les remparts qui encerclaient la ville intérieure et les remplacer au cœur de Vienne par une superbe avenue à quatre voies. C’est à “l’Epoque de la Ringstrasse” que la capitale doit les magnifiques édifices de l’opéra, des musées, palais, salles de concert remplaçant l’espace vert de ce qu’on appelait le Glacis, tous associés à la gloire de l’empereur omniprésent dans l’esprit de ses descendants.
Sa mort au château de Schönbrunn en 1916 (il y est né en 1830) après un règne de 68 ans, annonce le déclin de l’empire. L’assassinat de son neveu l’archiduc François-Ferdinand, héritier du trône, le 28 juin 1914 par un Serbe à Sarajevo, déclenche la Première Guerre mondiale. Son frère Charles Ier renonce en 1918 au trône après la défaite de l’Autriche.
En 1918, Vienne est la capitale de la République autrichienne. Après l’annexion de l’Autriche par l’Allemagne, elle est transformée en “Reichsgau” et ne retrouve son véritable statut qu’en 1945. Depuis 1967, Vienne est l’un des trois sièges des Nations Unies (aux côtés de New York et Genève). Depuis 1995, c’est l’une des quinze capitales de l’Union européenne. C’est une ville prisée par les congrès et fortement recherchée par les touristes. Ses 1,6 million d’habitants ont reçu en 1999, 3,1 millions de visiteurs, alors que l’Autriche qui compte 8 millions d’habitants, en a reçu 17 millions.


Le groupe de presse libanais devant l’Hôtel Impérial.
G.-D.: Jeanne Massaad, Joseph Kosseyfi, Fady Bou-Dagher,
Georges Kahy, Evelyne Perucic-Massoud et Josette Bahsali.

D’ABORD UNE ATMOSPHÈRE ROMANTIQUE
A Vienne, il existe une atmosphère romantique à nulle autre pareille. Alimentée, tout d’abord, par la géographie. Un des neuf Länder de l’Autriche, composée de vingt-trois arrondissements, la ville a réussi à préserver les espaces verts sur la moitié de ses 415 km2. C’est en effet la capitale la plus verte d’Europe où les parcs dont le Stadtpark (abritant la statue dorée de Johann Strauss) forment avec les prairies, les espaces boisés du Prater, l’immense jardin du château de Schönbrunn, la forêt viennoise, les vignobles, les exploitations maraîchères et les forêts fluviales longeant le Danube, une symphonie qui s’allie à l’air du temps que l’on respire partout, que ce soit en bus, en voiture, en métro ou à pied.
Il suffit de déambuler dans la zone piétonne du centre de Vienne, tout particulièrement dans la Kärtnerstrasse, de lever les yeux sur ses façades sculptées, de jeter un coup d’œil sur ses monuments grandioses et d’y pénétrer, de suivre les flux et reflux des passants, de s’arrêter devant les vitrines des magasins, de déguster une spécialité du pays dans une taverne, un restaurant ou un café, de s’attabler dans un “heuriger” où le vin de la meilleure récolte est servi par des hôtesses en “dirndl” (costume national autrichien) et accompagne un bon repas animé par des musiciens à la verve intarissable, pour savourer le charme d’une ville tranquille où la culture, les arts, la musique, les loisirs tiennent une si large place. L’Etat, semble-t-il, entretient cette atmosphère en allouant à la culture et aux loisirs des budgets assez élevés.
Sans prétendre donner une idée exhaustive de la ville, nous ne pouvons que livrer en vrac des impressions, projeter quelques spots lumineux sur ce que nous avons pu voir, pressentir ou deviner en regardant défiler tant de monuments, Opéra, Hofburg (palais impérial), cathédrale de Saint-Etienne, parlement, Burgtheater, etc... Nous avons pénétré dans les dédales du Musée des Beaux-Arts construit il y a 120 ans par les Habsbourg, orné d’une double coupole à caissons dorés à la feuille et qui contient la plus grande collection de Brueghel au monde, ainsi que les joyaux de la couronne. Nous avons découvert certaines parties du château de Schönbrunn (le site le plus visité de Vienne) où la splendeur dont s’étaient entourés les Habsbourg, rejaillit dans l’enfilade de pièces fastueuses chargées de dorures et sculptures où resurgit le spectre de Napoléon. Celui-ci occupa Vienne en 1805 et 1809 et y séjourna à deux reprises, épousant en 1810 Marie-Louise, la fille de François Ier qui lui donna un héritier “l’Aiglon”, lequel mourut au château des suites de la tuberculose en 1832 à l’âge de 21 ans. Ce n’est qu’en 1940 que sa dépouille fut transportée à Paris aux Invalides, afin qu’il y repose aux côtés de son père. Schönbrunn est plus qu’un monument; c’est un témoin de l’Histoire. C’est là qu’eurent lieu à l’occasion du Congrès de Vienne (1814-1815), de l’Exposition internationale de Vienne (1873) des fêtes somptueuses dignes de l’Empire. C’est là que fut signé en 1955 le Traité d’Etat libérant l’Autriche. Et là encore qu’eut lieu en 1960 le sommet Kennedy-Khroutchev.
Arrêt au Belvédère, deux monuments entourés d’un magnifique jardin construits par le prince Eugène de Savoie (1663-1736), à la suite de ses glorieuses campagnes militaires, pour en faire une résidence d’été. Actuellement, il abrite la galerie d’art autrichienne réunissant, notamment, les œuvres de Gustav Klimt, Egon Schiele et Oscar Kokoschka, artistes qui furent à l’origine de l’art moderne qui a traversé les frontières autrichiennes.
Soirée passée au Musikverein, grande salle de concerts aux lustres en cristal, murs chargés de statues et plafonds à caissons dorés. On y joue du Mozart et l’ensemble des musiciens sont en habits d’époque. Gare à celui qui échangerait une réflexion. Les grands mélomanes que sont les Viennois ne le supporteraient pas. Aux moments de silence, on y entendrait presque une aiguille tomber. Fort curieusement, un buffet est servi gracieusement à l’auditoire pendant l’entracte.
Vienne mérite son titre de capitale de la musique. Elle a inspiré de grands compositeurs à l’instar de ses propres fils Schubert, Strauss, Schoenberg, Berg. D’autres comme Haydn, Mozart, Beethoven, Brahms, Mahler en ont fait leur patrie... Ici, quels que soient les âges et les générations, on adore la musique sans être insensible aux vagues modernes et à leurs excentricités.
 
Vue plongeante sur la vallée de 
Gastein depuis le téléphérique.
Au centre de Vienne, un citoyen 
portant un costume d’époque vend 
des billets d’un concert Mozart.

QUELLE ÉTAIT VERTE MA VALLÉE!
Nous poussons plus loin l’aventure en prenant le train qui nous emmène à Bad Gastein. Des heures de chemin de fer passent rapidement tant le spectacle qui défile à notre gauche et à notre droite pousse à l’émerveillement. L’espace vert semble dessiné main et les maisons s’y sont incrustées comme des bijoux dans un écrin de verdure. Quelle harmonie et quelle paix!
Nous voici dans les Alpes autrichiennes. Notre hôtel se situe à 1000 mètres d’altitude. L’air y est bien pur. Non loin de là coulent des cascades dont la musique parvient jusqu’à nos oreilles. Et toujours à notre portée, une bouteille d’eau gazeuse. La vallée de Gastein est réputée pour ses sources, 19 rien que dans notre localité qui fournissent, dit-on, 4 à 5 millions de litres par jour. La région est réputée pour ses eaux qui jaillissaient du ventre de la terre depuis 3.500 ans. Leur température, alors, est de 42 à 46 degrés Celsius. Le gaz radon qu’elles contiennent s’est révélé particulièrement curatif. Il agit sur le métabolisme, stimule la circulation du sang et améliore l’absorption de l’oxygène par les cellules. Conscient des valeurs thérapeutiques des eaux de Gastein, l’empereur François-Joseph et Sissi, ainsi que les nobles de l’époque, y venaient pour des cures. Les établissements dispensant ces cures, notamment le tunnel curatif de Gastein, se sont multipliés dans la vallée et ont perfectionné leurs méthodes. On y accourt de toutes parts, notamment en hiver où les cures peuvent être conjuguées à la pratique du ski sur les hauteurs. Un groupe d’entre nous a suivi une de ces cures et en est ressorti particulièrement revigoré. Tous nous avons pris le chemin exaltant des hauteurs à l’aide d’un téléphérique (l’un des 53) qui nous a conduits jusqu’à plus de 2.000 mètres. Nous avions pour guide un vrai moniteur de ski, particulièrement affable qui a pu nous mener sur les hauteurs (2.200 mètres) où était plantée, comme sur tous les pics montagneux autrichiens, une croix.
Nous avons réussi à nous engager sur les sentiers montagneux et avons connu l’exaltation des hauteurs. Petits pas et arrêts réguliers pour embrasser du regard le paysage, des entrelacs de vallées, de lacs et de montagnes où résiste encore la neige qui recouvre les sommets. Les neiges éphémères de septembre viennent la renforcer. Elle ne reprend sa vigueur qu’en novembre pour envelopper de son manteau blanc, à perte de vue, le paysage. Sur les sentiers que marquent nos pas, un curieux mélange de mousse, de fleurs sauvages, mauves, blanches, jaunes, de roches ocres et verdâtres. Des sapins s’incrustent à flanc de montagne et de loin nous parvient le carillon des clochettes suspendues au cou des vaches. Le paysage de toute beauté rappelle l’univers de Heidi, petit conte qui a bercé les rêves de nos enfants.
La descente est non moins exaltante. Nous avons l’impression de plonger à travers le téléphérique dans les villages sortis de la légende. Celle-ci se poursuit par petites touches dans la découverte de la localité et spécialement dans le parc national Hohe Tauern, riche en faune et flore, cascades et rigoureusement protégé par les autorités.
A Bad Gastein, nous avons eu droit à une soirée au casino où le directeur Dr Peter Fürlinger nous a réservé un accueil particulièrement chaleureux. En nous offrant une petite bourse de couleur rouge contenant des jetons, il nous a permis de tenter notre chance à la roulette et aux machines à sous. Fort curieusement, certains d’entre nous en sont sortis gagnants.
Les casinos d’Autriche (douze) installés dans des bâtiments luxueux, voire dans des châteaux, réaménagés selon des critères modernes, créent une atmosphère feutrée qui dispense la détente. Ils constituent une chaîne puissante et ont essaimé dans le monde à travers Casinos Austria International.
 
Retrouvailles de Gerhard Skoff, 
de la direction des casinos d’Autriche 
et de Evelyne Perucic-Massoud.
La Getreidegasse à Salzbourg.

Notre guide Marlène Winkler, originaire de Salzbourg, s’est coupée en quatre pour nous faire découvrir le maximum en si peu de temps. Le dernier soir, elle a porté, à notre grande joie, le costume national autrichien.
En route pour Salzbourg! A bord du train, Jeanne, notre consœur, se rend compte qu’elle a oublié sur le quai de la gare, une valise à main contenant tous les souvenirs qu’elle venait d’acheter. Elle était consternée, non point parce qu’elle avait perdu une petite valise, mais parce que celle-ci contenait des objets qu’elle avait choisis avec amour. Fady Bou-Dagher a aussitôt appelé de son téléphone portable le bureau de tourisme de Badgastein pour lui signaler l’incident. A notre grand étonnement, un jeune homme qui nous avait devancés, nous attendait déjà sur le quai à Salzbourg, la petite valise à la main.
Escale de quelques heures à Salzbourg, ancienne ville romaine qui fut détruite à la fin du Vème siècle et sur les ruines de laquelle les princes-archevêques fondèrent vers la fin du VIIème siècle une ville baptisée la “Rome du Nord” et fondée en 1920 sur laquelle ils régnèrent jusqu’au début du XIXème siècle. Cette ville tirait autrefois sa richesse du sel ou l’or blanc ayant donné son nom “Selz” à la Salzack qui la traverse de part en part. Il faut traverser le jardin Mirabell dessiné par le même architecte que celui de Schönbrunn pour atteindre la Getreidegasse où se trouve au numéro 9, la maison natale de Mozart (il y a vu le jour le 27 janvier 1756) et déboucher sur les sanctuaires où se déploie le Festival de Salzbourg, fondé en 1920 et jouissant d’une audience internationale. Une myriade d’activités artistiques et de concerts jalonnent les saisons de Salzbourg qui attirent les mélomanes du monde entier.
Le temps nous est désormais compté. Juste une nuit à Vienne avant le retour. C’est là où nous avons la joie de rencontrer un ancien (et toujours) ami du Liban, Gerhard Skoff, aujourd’hui à la direction des casinos d’Autriche et époux du beau et talentueux soprano libanais d’audience internationale, Sona Ghazarian qui lui a donné deux beaux garçons, leur fierté commune.
C’est là aussi que nous faisons la rencontre d’un des rares Libanais d’Autriche, Badih Senno, un homme jovial doué du génie des affaires, ayant réussi dans le commerce du bois et ouvert à Vienne un restaurant huppé le Franco’s Club. Il nous invite à déguster les spécialités raffinées de la maison et même à pousser jusqu’à sa discothèque, le Scotch Club, ouvert de 11 heures du matin jusqu’à 7 heures du matin.
Mais il faudra se lever tôt au matin du dimanche. Vienne est encore endormie. Nous voilà partis. Auf wiedersehen Wien!

Par EVELYNE MASSOUD

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