LE COUVENT SAINT JEAN MARON À KFARHAY:
Un antique centre de rayonnement spirituel et culturel

Fête du fondateur et patron de la communauté maronite, la solennité de la Saint Maron prend la dimension d’un enrichissant pèlerinage aux sources au couvent Saint Jean Maron de Kfarhay, fondé au VIIème siècle.

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Niché au cœur de la montagne de Batroun, ce couvent historique porte le nom de son fondateur Saint Jean Maron, premier patriarche élu par la communauté maronite en 686. C’est actuellement le siège de l’archevêché de Batroun ayant à sa tête Mgr Paul Emile Saadé. De par son histoire et sa place chez les maronites, ce haut lieu offre un double intérêt: d’avoir été édifié par le premier patriarche de l’Eglise constitutive du Liban et d’abriter le précieux legs des reliques de Saint Maron (dont une partie du crâne et des ossements ont été rapatriés d’Italie, l’année dernière). Dès lors, la ferveur populaire en a fait un lieu de pèlerinage à l’échelle nationale.

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Saint Jean Maron, fondateur et patron du couvent.
 
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Les reliques de Saint Maron exposées à la vénération des fidèles, scellées dans un buste en bronze.

TREIZE SIÈCLES D’HISTOIRE
S’il existe des “hauts lieux où souffle l’Esprit”, comme disait Barrès, le couvent de Kfarhay occupe une place privilégiée. Quand on y pénètre et que l’on parcourt ses couloirs aux voûtes et dalles séculaires, on est tout de suite imprégné d’une atmosphère de spiritualité mystique et de réconfort moral qui rapproche du Créateur. Dans le vaste salon aux murs tapissés des portraits des serviteurs de Dieu qui se sont succédé à la direction de ce couvent, Mgr Saadé nous retrace l’évolution historique de ce monastère qui a été une forteresse de la foi ayant connu les vicissitudes de l’Histoire (pour avoir été détruit à plusieurs reprises) mais qui fut, aussi, un centre de rayonnement culturel ayant formé des générations de moines dans son célèbre séminaire. “Ce couvent a eu une grande influence sur la vie spirituelle et nationale tout au long de treize siècles. Des historiens rapportent que jusqu’aux Croisades il était resté intact mais fut par la suite détruit. Vers la fin du XIIIème siècle, les notables maronites (“Moukaddamoun”) y ont tenu un important congrès sous la présidence de leur patriarche, après avoir vaincu les mamelouks. C’est au XVIIème que le couvent a connu son expansion, après avoir été restauré de sorte qu’il put héberger une quarantaine de moines. A la fin du XVIIIème siècle, sous le patriarcat de Mgr Youssef Estephan, l’édifice fut rénové grâce à la collaboration des fidèles maronites. C’est en 1812 qu’il fut transformé en école sous le mandat du patriarche Mgr Youhanna el-Hélou”.

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Le plus illustre des supérieurs du couvent, Mgr Youssef Freifer (1818-1889).
 
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Archevêque de Batroun, Mgr Paul Emile Saadé promoteur de l’ultime restauration.

LES PATRIARCHES HOYECK ET ARIDA FORMÉS À KFARHAY
Selon les témoignages, dans la liste des vingt supérieurs s’étant succédé à la direction de ce séminaire, le plus illustre fut Mgr Youssef Freifer, sacré archevêque en 1872 et décédé en 1889. Il a enrichi le patrimoine du couvent par des acquisitions de terrains, de sorte que l’on y comptait deux cents métayers. Parmi les autres supérieurs, notre distingué interlocuteur nous cite les chorévêques Boutros Arsénios (de Kour), Mgr Joseph Sakr (de Zahlé), l’archevêque Mgr Elias Chédid (de Eddé-Batroun) et le chorévêque Youssef Abi Saab (de Mazraat). Au nombre des anciens élèves, figurent les patriarches Elias Hoyeck et Antoun Arida, le célèbre critique littéraire Maroun Abboud et le député Massoud Younès... De six étudiants en 1813, le collège accueillera jusqu’à une centaine de pensionnaires en 1879, après la rénovation des locaux par Mgr Youssef Freifer. En plus des disciplines académiques traditionnelles y étaient enseignées plusieurs langues: syriaque, arabe, français, latin, italien, turc et anglais.

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Une des façades intérieures et l’église entièrement restaurées.
 
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Une des anciennes ailes du couvent.

DES RELIQUES RESTITUÉES APRÈS NEUF SIÈCLES
L’ultime restauration qui s’échelonna sur dix ans, de 1986 à 1996, a été entreprise par l’actuel archevêque de Batroun, Mgr Paul Emile Saadé. On lui doit aussi l’heureuse initiative du rapatriement des reliques de Saint Maron de la ville italienne de Foligno. Ainsi, après neuf siècles, une partie importante et précieuse de ces reliques (emportées en 1130 par l’abbé bénédictin Michel et conservées en Italie) fut restituée au couvent Saint Jean Maron de Kfarhay. En treize siècles d’une plénitude d’existence spirituelle et de rayonnement culturel, ce couvent a formé d’éminents patriarches, prélats, hommes de lettres et politiciens. Il a été édifié par les disciples de Saint Maron (mort en 410), selon les règles du monastère de l’Oronte, pour sauvegarder leur foi et leur liberté, après s’être réfugiés dans la montagne libanaise. Aujourd’hui, en commémoration des fêtes de Saint Maron (9 février) et de Saint Jean Maron (2 mars), le couvent de Kfarhay doit retrouver sa place privilégiée et renaître en pleine lumière sous les feux de solennités nationales patronnées par S.Em. le cardinal-patriarche Nasrallah Sfeir, selon le vœu fervent des fidèles.

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