Après la déformation d’une déclaration de l’ambassadeur du Liban à Ottawa
Qui veut nuire aux relations libano-canadiennes?
Zeina EL-TIBI

photoAu début de décembre 2002, le gouvernement fédéral du Canada a décidé d’ajouter le “Hezbollah” à sa liste des “organisations terroristes illégales”. Cette décision a été prise à la suite d’une campagne de plusieurs mois menée par des organisations sionistes, le parti canadien d’extrême-droite (Canadian Alliance) et le journal “National Post“.

Le “National Post” appartient au groupe de communication Can West Global, dont le propriétaire est Israël Asper. Ce journal s’était distingué pour avoir protesté contre la présence du dirigeant du “Hezbollah“, cheikh Hassan Nasrallah, lors du sommet de la francophonie de Beyrouth. Le “National Post” est une feuille à scandale d’extrême droite, très alignée sur les Etats-Unis et connue pour sa haine anti-québécoise et anti-francophone, une haine qui frise le racisme. C‘est, précisément, ce journal qui est à l’origine d’un récent coup monté contre le Liban.

Un coup monté contre le Liban
A l’occasion des vœux de fin d’année, l’ambassadeur du Liban au Canada, M. Raymond Baaklini a accordé un entretien à un magazine paraissant en arabe à Montréal, “Sada el Machrek”. Dans cet entretien, l’ambassadeur libanais souhaitait défendre la position du Liban et expliquer que la communauté arabe au Canada n’était pas menacée et que personne ne devait nourrir de craintes à cet égard.
Cet entretien a été édité en reproduisant, d’une façon inexacte, les propos de l’ambassadeur auquel le texte publié n’a pas été soumis. Ainsi, les propos du diplomate ont été systématiquement déformés sur plusieurs points.
Quelques jours plus tard, le “National Post” reproduisait les propos tronqués de l’ambassadeur Baaklini et l’accusait d’antisémitisme, dans un long article polémique et d’une totale mauvaise foi. On ne peut qu’être surpris que le “National Post”, un journal anglophone paraissant à Ottawa, s’intéresse à une petite publication de Montréal éditée en arabe à quelques centaines d’exemplaires. On ne peut que se demander qui a traduit et transmis le texte du journal arabe au “National Post” et dans quel but?
Certes, on pourrait parler de tempête dans un verre d’eau, si l’article du “National Post” n‘avait été utilisé par le parti extrémiste (Canadian Alliance) pour tenter de provoquer un scandale et, finalement, conduit à une rencontre entre l’ambassadeur du Liban et un haut responsable du ministère canadien des Affaires étrangères.
Cette rencontre a fait l’objet d’une dépêche tendancieuse d’un correspondant de l’AFP qui a prétendu que l’ambassadeur avait été convoqué par le ministre, alors même que ce dernier avait invité le diplomate afin de l’informer de la position canadienne concernant le “Hezbollah”. En réalité, il n‘y a aucun malaise entre le Liban et le Canada, même si Beyrouth regrette la position prise par Ottawa à l’égard d’un parti libanais légal et siégeant au parlement.
Une certaine presse a donc dramatisé les choses. Il est clair que nous sommes en présence d’une affaire montée de toutes pièces par certains groupes qui cherchent à créer, artificiellement, un problème entre le Liban et le Canada. Il s’agit, pour ces groupes, de ternir l’image de marque du Liban au Canada et de nuire au gouvernement libanais. Selon des informations de bonne source, les personnes qui ont déformé les propos de l’ambassadeur pour créer un malaise entre Beyrouth et Ottawa, sont déjà connues des autorités canadiennes qui devraient faire connaître leurs noms.

Prélude à des menaces contre BEYROUTH?
Selon des milieux bien informés, la thèse du complot contre le Liban est d’autant plus crédible, qu’il s’avèrerait que toute l’affaire aurait été montée en liaison avec un groupuscule libanais affilié aux Etats-Unis et à Israël. Le correspondant de l’AFP rapporte, d’ailleurs, que le gouvernement canadien se serait intéressé à la question à la suite de “protestations émises par des organisations juives et libanaises du Canada”. Il faut croire que lesdites organisations libanaises sont liées aux organisations juives, puisqu‘elles auraient effectué les mêmes démarches visant le Liban et son gouvernement.
Certains analystes français estiment qu’il existe un plan américain visant à remodeler le Proche-Orient à la faveur d’une guerre contre l’Irak. L’un des volets de ce plan viserait à profiter de la crise dans la région et des frappes américaines contre l’Irak, pour encourager une attaque israélienne contre le “Hezbollah” et favoriser la partition du Liban sur des bases religieuses.
Est-ce un hasard si l’on retrouve des personnes liées à ce plan américain dans l‘affaire du “National Post”? Cette affaire est-elle le prélude à de plus grandes menaces contre le Liban? La question reste posée.

Article paru dans "La Revue du Liban" N° 3880 - Du 18 Au 25 Janvier 2003
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