Les constantes et doléances libanaises
exposées à Fischer

Par Nadim EL-HACHEM

Cette semaine a été consacrée, au plan local, à renforcer la trêve en vue de permettre au Conseil des ministres de tenir sa séance hebdomadaire dans un climat décontracté, pareil à celui de la semaine dernière, surtout si certains dossiers litigieux devaient figurer à son ordre du jour.

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Le président Lahoud
recevant M.Fischer à Baabda.

Sur le plan médiatique, l’affaire de la NTV a dominé les nouvelles relatives à l’information audiovisuelle, suite à l’ouverture de l’enquête menée par le Parquet, sur la base de plaintes déposées par le directeur général de la Sûreté et le ministre des Travaux publics et des Transports contre cette chaîne de télévision. La tendance dans les milieux officiels est de laisser le palais de Justice délibérer sur ce dossier, sans aucune interférence de la part de parties extérieures. Dans le même temps, le ministre de l’Information s’emploiera à appliquer, rigoureusement, la loi régissant le secteur de l’audiovisuel, en vertu d’une décision en ce sens prise par le Conseil des ministres. En ce qui concerne le mouvement diplomatique, le ministre des Affaires étrangères a résolu de le différer, après avoir conféré à ce sujet avec les chefs de l’Etat, du Législatif et du gouvernement, car il s’agit de pourvoir aux postes vacants, surtout dans les grandes capitales. A ce sujet, M. Ali el-Khalil, président de la commission parlementaire des Affaires étrangères, a déclaré que “le mouvement diplomatique était devenu nécessaire et ne souffrait plus d’aucun atermoiement”. Parmi les dossiers litigieux, celui des véhicules circulant au mazout est le plus urgent à trancher, d’autant que les industriels se sont joints aux propriétaires des vans, les premiers réclamant des mesures destinées à réduire le coût de leur production rendue moins compétitive en raison des tarifs élevés du courant électrique et des prix des carburants. Autres faits à signaler: le problème de l’expropriation a été transmis à une commission ad hoc présidée par M. Issam Farès, afin d’y apporter des modifications sur la base des suggestions proposées par quatre ministres. En ce qui a trait aux dossiers internes requérant des solutions urgentes, le chef de l’Etat a défini sa position à leur égard, en mettant l’accent sur la nécessité d’éviter tous les sujets litigieux dont l’évocation, dans les circonstances présentes, risque de compromettre l’unité nationale.
En ce qui concerne le conflit régional, le président de la République a proclamé, une fois de plus, son attachement aux constantes nationales et réaffirmé son opposition à l’implantation des réfugiés palestiniens dans nos murs, en réclamant la confirmation du droit au retour des Palestiniens de la diaspora.

LAHOUD: “J’AI CONFIANCE EN L’AVENIR”
Le président de la République a proclamé, ensuite, devant une délégation de l’université de Louaïzé, sa confiance en l’avenir du Liban et son optimisme quant à la possibilité pour notre peuple de dépasser la situation actuelle au triple plan politique, économique et social. “Ce qui me rassure, a-t-il ajouté, c’est que dans leur écrasante majorité, les Libanais tiennent fermement à l’édification de l’Etat de la loi et des institutions, en dépit des obstacles qui entravent jusqu’ici sa concrétisation”. M. Lahoud s’est dit, d’autre part, déterminé à prévenir tout mouvement séditieux. “Nous ne permettrons à personne, a-t-il poursuivi, de frapper le pays de l’intérieur et de compromettre le désir de vivre en commun. Nous continuerons à élever la voix pour défendre les acquis du Liban dans tous les domaines; l’intérêt supérieur de la patrie demeure au centre de nos préoccupations, quoi que fassent certains milieux en vue de perturber le climat général, pour susciter le doute dans l’esprit des citoyens”. Le président de la République a mis en garde contre le sectarisme et le confessionnalisme, se disant rassuré de ce que les Libanais ont tiré les leçons des douloureux événements, dont ils ont payé très cher le prix.

Fischer à Beyrouth
Par ailleurs, M. Joshka Fischer, chef de la diplomatie allemande, est venu cette semaine à Beyrouth, pour un échange de vue avec les responsables - le chef de l’Etat en tête - autour des derniers développements de la conjoncture régionale, notamment en Irak, en Palestine; de la “feuille de route” et des chances de son application, étant donné la persistance de la violence sur le terrain en Terre sainte. Le ministre allemand a rappelé la position de son pays envers la crise proche-orientale, affirmant: “Berlin s’est toujours prononcé en faveur d’une paix juste et globale, n’excluant aucun pays ni aucune partie”. Il l’a répété aux chefs du Législatif et du gouvernement à qui il a rendu visite avant son départ pour Damas.
Le président Lahoud a fait état du climat tendu qu’Israël s’emploie à entretenir dans la région et, tout particulièrement, au Liban-Sud, afin de compromettre la sécurité, la stabilité et exercer des pressions sur ses voisins, le Liban en tête, en vue d’obtenir certains acquis et avantages au double plan hydraulique et territorial.
Le chef de l’Etat a informé M. Fischer de l’intérêt que le Liban porte aux réunions du Quartette (Nations unies, Union européenne, Etats Unis et Russie), la toute dernière ayant eu lieu en Jordanie.
Tout en mettant l’accent sur la nécessité de dissiper la tension qui empêche les Palestiniens de mener une vie normale et de mettre un terme aux agressions israéliennes contre un peuple luttant pour obtenir la reconnaissance de ses droits, dont celui du retour de ses fils épars sous tous les cieux et de mettre un terme à leur statut de réfugiés. Le président de la République a rappelé les constantes libanaises et son attachement aux résolutions de la légalité internationale “qui ne doivent pas rester lettre morte”.
Le président Lahoud a, également, expliqué la position du Liban envers la lutte contre le terrorisme, l’avenir de l’Irak et la “feuille de route”, dont le Liban et la Syrie sont exclus.
Il a insisté, spécialement, sur la différence entre le terrorisme et la lutte visant à récupérer les territoires occupés, celle-ci étant menée par les Palestiniens, dont le droit à la résistance à l’occupant est reconnue par la communauté internationale.
M. Fischer a jugé nécessaire, quant à lui, de joindre le Liban et la Syrie à la “feuille de route”, tout en reconnaissant que la paix régionale doit être juste et globale, c’est-à-dire s’étendant à tous les pays. “Quant au problème des réfugiés palestiniens et au problème du Golan syrien, dit-il, ils doivent être réglés dans le cadre de la feuille de route”. Avant d’ajouter: “Dans une seconde étape, ces dossiers seront examinés et tranchés dans le cadre d’un congrès mondial exclusivement consacré au conflit israélo-arabe et feront partie d’une solution définitive.
Ce qui importe pour l’Allemagne, conclut-il, c’est que le Liban vive en paix et jouisse pleinement de la sécurité et de la stabilité. Il est impérieux que les pays de la région vivent selon les règles du bon voisinage, d’autant que Chypre adhèrera prochainement à l’Union européenne et aura, en conséquence, la possibilité de traiter avec tous les Etats arabes”.

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