Le Liban en deuil fait ses adieux à Elias Hraoui

Dixième président de la République libanaise, Elias Hraoui est décédé vendredi 7 juillet, des suites d’un cancer à l’âge de 80 ans. Dans un coma depuis quelques jours, il s’est éteint à l’hôpital américain de Beyrouth, où il avait été admis depuis environ un mois. A l’annonce de la triste nouvelle, un deuil national de trois jours a été décrété, alors qu’un registre de condoléances a été ouvert au palais présidentiel de Baabda.

photo

Zahliote au franc-parler légendaire, l’ancien chef de l’Etat, dont le mandat inaugure la Deuxième République, laisse le souvenir d’un homme qui a assumé la difficile mission “d’arrêter le canon et d’entamer le processus de réunification du pays”.
Deuxième président après l’accord de Taëf, Elias Hraoui, est né le 3 septembre 1926 à Hoch el-Omara à Zahlé. Son père, Khalil Hraoui, est un grand propriétaire terrien, alors que sa mère Hilané Harb, est originaire de Baskinta. Après des études primaires et secondaires à la Faculté orientale basilienne à Hoch el-Omara; ensuite, au collège de la Sagesse à Beyrouth, il décroche de l’université Saint Joseph une licence en études commerciales et se lance dans l’action coopérative et agricole dans la Békaa. Il fonde, ainsi, en 1970 la première coopérative pour les agriculteurs de la betterave et introduit au Proche-Orient la première usine agroalimentaire spécialisée dans la déshydratation des légumes.

photo Passation des pouvoirs entre les présidents Hraoui et Lahoud.

photo Le président Hraoui avec feu René Moawad...

En 1971, il préside la Fédération des coopératives agricoles du Liban. En 1974, il préside la délégation libanaise au Congrès international sur l’alimentation à Rome. Il sera à la tête de la délégation libanaise près de la FAO, dès 1975 et ce, jusqu’à son élection à la présidence de la République.
Marié une première fois en 1947 à Evelyne Salim Chidiac, il devient père de trois enfants Réna, Georges et Roy. Il s’en séparera en 1959, pour épouser en 1961 Mona Jammal, dont il aura trois enfants: Zalfa, Roland et un garçon mort en bas âge.

photo ... Elias Sarkis.

photo ... Et Charles Hélou.

Elias Hraoui se découvre tôt un penchant pour la chose publique. En cela, il ne déroge pas aux traditions. Puisqu’il s’inscrit dans la grande lignée d’une famille qui s’est adonnée à la politique depuis l’Indépendance. A commencer par son oncle, Youssef Hraoui, élu trois fois député de Zahlé (1943, 1951 et 1964), son frère Georges élu député de Zahlé et de la Békaa en 1953, 1957 et 1960, son deuxième frère Joseph, élu en 1964 à la place de Youssef Hraoui mort peu après son élection, enfin, Antoine Hraoui, député de Hermel-Baalbeck en 1968.

photo Moment fort du mandat Hraoui: la visite du Pape Jean-Paul II et la publication de l’Exhortation apostolique.

photo Malgré les divergences, Hraoui maintient les relations avec Bkerké.

Sa carrière politique commence dans sa ville natale où il est élu, en 1963, membre de la municipalité de Zahlé. Mais rêvant toujours d’aller plus loin, ce fervent “chamouniste” se présente en 1968 aux législatives et essuie un échec avant de se faire élire, quelques années plus tard en 1972, sur la liste de Joseph Skaff en qui il a trouvé un fort allié.

Le président Lahoud rend hommage à son prédécesseur

Suite à l’annonce de son décès, le président Emile Lahoud et son épouse Andrée, se sont rendus au domicile du disparu pour présenter leurs condoléances à sa veuve et aux membres de la famille.
En quittant les lieux, le président Lahoud a inscrit ces lignes dans le registre des condoléances: “Le nom du président défunt sera toujours associé à la fin de la guerre et à l’établissement de la paix civile, à l’unification du pays et des institutions étatiques. L’Histoire retiendra que c’est sous son mandat que l’accord de Taëf a été appliqué, introduisant le Liban dans une nouvelle ère de son histoire moderne.” Le chef de l’Etat avait, auparavant, fait part au peuple libanais de la disparition de son prédécesseur. Dans un communiqué officiel, il lui rend un dernier hommage: “Le président Elias Hraoui s’en va à l’heure où le Liban a plus que jamais besoin de ses grandes figures politiques nationales et publiques. Citoyen authentique, il s’est taillé une place particulière sur la scène politique, d’abord, sous l’hémicycle où il s’est évertué à représenter fidèlement ceux qui l’ont élu; puis, en endossant les responsabilités ministérielles jusqu’à ce que son patriotisme suscite l’unanimité et le fait accéder à la présidence de la République.”
Le président Lahoud a reconnu en Elias Hraoui, “l’homme engagé au service de la nation et des causes arabes, profondément convaincu de l’importance de la coexistence entre les différentes communautés libanaises, cause qu’il a défendue tout au long de sa carrière politique, en travaillant sans cesse au renforcement et à la consolidation de l’unité nationale et à la réunification de l’armée.”
Le numéro 1 de l’Etat a rendu enfin hommage “à l’homme clair et franc, dévoué à sa famille, parti rejoindre le cortège des grandes figures qui ont empreint l’Histoire du Liban.”

Cependant, l’alliance ne dure pas et le jeune député, cherchant à se démarquer du chef de son Bloc parlementaire, se rapproche du président de la République, Elias Sarkis. Sa manœuvre aboutit, puisque le 25 octobre 1980, il est nommé ministre des Travaux publics et des Transports dans le Cabinet de Chafic Wazzan. Un poste qui lui a permis, d’ailleurs, d’œuvrer davantage pour sa région. Ceci n’a pas eu l’heur de plaire à Joseph Skaff qui voyait en lui un concurrent. Elias Hraoui rejoint donc le Bloc des députés maronites indépendants formé, alors, de Boutros Harb, Auguste Bakhos, Gebran Taouk, Habib Kayrouz et Elias el-Khazen.

photo Avec le président de la Chambre Nabih Berri.

photo Rafic Hariri, compagnon de ses années au pouvoir.

Proche des Syriens, en particulier du président Hafez el-Assad, il a présidé, en 1981, la délégation libanaise à Damas chargée par le président Elias Sarkis de négocier la levée du blocus syrien sur Zahlé. Autre fait marquant de son parcours parlementaire, la signature, à Damas le 18 décembre 1985, de l’accord tripartite à laquelle il a assisté. Des années plus tard, précisément en novembre 1989, suite au huis clos de Taëf en Arabie saoudite auquel il a pris part, il se porte candidat à la présidence, mais René Moawad l’emporte. Ce dernier, assassiné la veille de l’Indépendance, Elias Hraoui, le plus favori, est élu le 24 novembre 1989, dixième président de la République libanaise: c’est au Park Hotel de Chtaura que se déroule le scrutin. Le nouveau chef de l’Etat est élu au second tour par 47 voix sur 53 et cinq bulletins blancs. Obligé de résider à la caserne d’Ablah, c’est lui qui donne le feu vert à l’attaque syrienne visant à déloger le général Michel Aoun du palais présidentiel de Baabda, le 13 octobre 1990. Toutefois, ce n’est que le 5 janvier 1990 qu’il quitte la Békaa et occupe à Ramlet el-Baïda (Beyrouth), un appartement mis à sa disposition par Rafic Hariri.

photo Elias Hraoui accueillant Saëb Salam.

photo En compagnie du président de l’Ordre
des journalistes Melhem Karam.

Quelques jours plus tard, le 21 janvier, il effectue une première visite à Damas en tant que chef d’Etat accompagné de MM. Salim Hoss et Nabih Berri.
Si l’ancien chef de l’Etat a le mérite d’avoir arrêté les hostilités, dissout les milices (sauf le Hezbollah), réunifié l’armée et œuvré pour l’instauration du mariage civil, il n’en demeure pas moins que son mandat controversé, restera marqué par une consécration de la mainmise syrienne sur le Liban et une marginalisation accrue des chrétiens à travers le Traité de fraternité, de coopération et de coordination signé en 1991, qui officialise les relations privilégiées entre les deux “Etats frères”. Ensuite, à travers le maintien du statu quo au Liban-sud avec la décision en Conseil des ministres (1993) d’empêcher l’armée de s’y déployer. Puis, avec des lois électorales taillées sur mesure au profit des alliés locaux de la Syrie (1992 et 1996), suivies par un boycottage du scrutin par les chrétiens.
Et par la naturalisation de milliers de Palestiniens et de Kurdes, musulmans en grande majorité, créant des déséquilibres démographiques et communautaires. Enfin, par l’incarcération en 1994, du chef des FL, Samir Geagea après l’attentat contre l’église Notre-Dame de la Délivrance à Zouk.

photo Mona Hraoui pleurant le départ de son compagnon.

photo A Saint Maron les trois présidents veillant sur le cercueil de l’ancien chef de l’Etat.

Marqué, également, par l’arrivée de Rafic Hariri au pouvoir en 1992, son mandat témoigne des failles de l’accord de Taëf avec l’apparition de la fameuse “troïka” et la mise en place d’un pouvoir hybride tricéphale qui expose le Liban aux tiraillements politiques.
Enfin, le bilan s’alourdit avec la prorogation de trois ans de son mandat par décision du président syrien Hafez el-Assad lui-même. Première dans l’Histoire libanaise, la Constitution est amendée “pour une fois” le 19 octobre 1995. Elias Hraoui est de nouveau président avec 111 voix contre 11 et 7 abstentions.

photo Le cortège funèbre se dirigeant vers la cathédrale Saint Georges.

photo La famille entourant le cercueil
pour un ultime adieu.

Obsèques nationales
Dimanche matin, jour des funérailles, sa famille lui fait des adieux émouvants mais discrets. Le cortège funèbre, dont le départ est salué par un escadron des FSI, quitte à 9 h 30 la demeure du président disparu à Baabda, où depuis deux jours sa dépouille repose entourée des membres de sa famille et des amis. Encadré par les FSI, il se dirige vers l’église Saint-Maron à Gemmayzé. Conformément aux directives des FSI, la route menant jusqu’au centre-ville est bouclée, les voitures étant interdites de stationnement.
A Saint-Maron, une chapelle ardente est montée. Des prières, des cierges et de l’encens brûlé accueillent le cercueil enveloppé du drapeau libanais et encadré par quatre officiers. Au fur et à mesure que l’heure avance, l’église se remplit et l’autel se garnit de couronnes et de corbeilles de fleurs aux couleurs nationales. Officiels et diplomates se pressent. Suivant le protocole, à 11h45 arrive le vice-président du Cabinet Elias Murr, suivi du vice-président de la Chambre, Farid Makari. A 11h55, le chef du gouvernement Fouad Sanioura arrive à son tour; puis, le président de la Chambre Nabih Berri. A 12h5, le président de la République Emile Lahoud pénètre dans l’église et se recueille devant la dépouille du disparu.

Jacques Chirac présente ses condoléances...
Dans une lettre adressée à sa veuve, Mme Mona Hraoui, le président français Jacques Chirac a présenté ses condoléances, saluant la mémoire de “cette grande figure politique qui avait su pleinement s’engager au service de son pays.” “Je salue, dit-il, la mémoire d’un homme qui, après tant d’années de souffrances, au lendemain de l’assassinat du président René Moawad, s’est consacré à la difficile mission de faire passer son pays de la guerre à la paix et d’entamer l’indispensable processus de réconciliation, de redressement et de reconstruction.” Et d’ajouter: “Je rends hommage à l’ami de la France qu’était M. Elias Hraoui, à l’ami personnel qu’il était également.”

...Bernard Emié aussi
Dans une lettre qu’il a adressée à Mme Mona Hraoui, l’ambassadeur de France au Liban, Bernard Emié a dit:
“C’est avec une immense tristesse que je viens d’être informé du décès du président Elias Hraoui. Je vous présente, ainsi qu’à tous les membres de votre famille, mes très sincères condoléances. Avec le départ du président Elias Hraoui, c’est une page de l’Histoire du Liban qui se tourne, le départ d’une personnalité éminente qui avait su, au lendemain de la guerre civile, jouer tout son rôle dans les processus de redressement du Liban. J’ai eu le privilège de rencontrer le président Elias Hraoui à de nombreuses reprises, lorsque j’étais le collaborateur du président Jacques Chirac, à l’Elysée au mois de juin 1995, quand votre mari décida de venir très vite à Paris au lendemain de l’élection de notre Président, pour lui transmettre ses félicitations très personnelles et l’assurer de l’engagement du Liban dans son amitié séculaire avec la France. J’ai à l’esprit le rôle éminent que joua le président Hraoui pour renforcer les relations franco-libanaises et participer au lancement de nombre de projets de coopération en plein accord avec les gouvernements de l’époque. J’ai toujours eu un grand plaisir depuis mon arrivée au Liban comme ambassadeur, à retrouver et discuter avec le président Hraoui pour profiter de son expérience et de sa sagesse. C’est une grande personnalité libanaise qui s’en va mais, aussi, un ami sincère de la France et de son Président, qui avait su nouer avec notre chef de l’Etat, à l’occasion de ses différentes visites officielles au Liban, une relation personnelle de confiance et de coopération. Dans ces très douloureuses circonstances, permettez-moi, en mon nom, comme en celui de mon épouse et au nom de toute la communauté française du Liban, de vous adresser toutes mes condoléances et de pleinement partager votre immense chagrin.
En vous disant de nouveau toute ma tristesse, je vous prie de croire, Madame, à l’expression de mes très respectueux hommages.

12h10, le cortège se dirige à pied vers la cathédrale Saint-Georges des maronites. Précédé par les motards, la fanfare de l’armée, les porteurs des couronnes et des médailles et les prélats, le cercueil est placé sur un affût de canon encadré par deux véhicules de l’armée et de deux escadrons et suivi des trois présidents, des membres de la famille et des officiels.
Dans la cathédrale, des personnalités libanaises et étrangères attendent. Représentant le patriarche maronite, Mgr Boulos Matar, archevêque maronite de Beyrouth, préside l’office funèbre assisté de NN.SS. Elias Audé, métropolite de Beyrouth, représentant le patriarche Ignace IV Hazim et Youssef Kallas, évêque melkite de Beyrouth, en présence d’une foule de prélats, dont le patriarche des syriaques orthodoxes, Zakka Ier Iwass, NN.SS. Kegham Khatchérian, Francis al-Baisari, Youssef Dargham, Elias Nassar, Georges Khodr, Athénasios Ephrem, Boulos Nazha, Salim Ghazal, Tanios Joseph Merhej et Michel Aoun.
Après l’évangile, Mgr Youssef Taouk, secrétaire général du patriarcat maronite, donne lecture du message patriarcal. Retraçant la vie du disparu, il rappelle que le président Hraoui a assumé les fonctions de la présidence à une période difficile de l’Histoire du Liban. “Il a risqué sa vie et pris à sa charge la mission de réunifier le pays au moment où ce dernier était disloqué et attendait que quelqu’un vienne rassembler ses fils et ses parties. Il était obsédé par l’unification du pays et de l’Etat. Il a, ainsi, réunifié l’armée après la dissolution des milices. Il s’évertua à faire participer tout le monde au pouvoir. Il a, aussi, pris des décisions critiques et pénibles en arrêtant la guerre et les hostilités et en sortant les gens des abris. Ceci grâce à sa malléabilité et à sa capacité de résoudre les problèmes les plus compliqués en toute franchise et sans atermoiements. Au cours de son mandat, il insista à maintenir des relations avec le patriarcat maronite, malgré certaines divergences des points de vue. Basées sur le respect, ces relations ont perduré, même après qu’il eut délaissé la politique (…)”.
L’oraison funèbre achevée, les présidents Lahoud, Berri et Sanioura réunis autour de la famille Hraoui reçoivent les condoléances. Sont également présents aux obsèques, l’ambassadeur de France au Liban, Bernard Emié, représentant le président Jacques Chirac; le ministre syrien des Affaires présidentielles, Hassan Lahham représentant le président Bachar el-Assad; l’ambassadeur d’Egypte au Liban, Hussein Darrar, représentant le président égyptien Hosni Mobarak; le ministre d’Etat saoudien, Abdallah Zein Ali Rida, représentant le roi Abdallah Ben Abdel-Aziz Al-Saoud.
L’ancien président de la Chambre Hussein el-Husseini, les anciens Premiers ministres Amine el-Hafez, Rachid Solh, Omar Karamé, Salim Hoss et Najib Mikati; MM. Charles Rizk, Tarek Mitri, Jihad Azour, Khaled Kabbani, Elias el-Murr, Ahmad Fatfat, Faouzi Salloukh, Jean Oghassabian, Michel Pharaon, Mohamed Safadi, Nehmé Tohmé et Marwan Hamadé, ministres, ainsi que les représentants du corps diplomatique et consulaire, dont l’ambassadeur des Etats-Unis à Beyrouth, Jeffrey Feltman, l’ambassadeur de Grande-Bretagne James Watt et le chef de la délégation de l’Union européenne, Patrick Renauld; les représentants des organisations internationales à Beyrouth; Ghassan Tuéni, Elias Skaff, chef du Bloc populaire; Hassan Yaacoub, Elias Atallah, Robert Ghanem, Atef Majdalani, Riad Rahal, Hagop Pakradounian, Abdel-Latif el-Zein, Ghazi el-Youssef, Bassem el-Chab, Georges Kassarji, Pierre Serhal, Gilberte Zouein, Nader Souccar, Mohamed Hajjar, Boutros Harb, Ali Ammar, Mohammad Raad, Yeghia Jerjian, Ali Osseiran, Mohammad Kabbani, Salim Aoun représentant le chef du Bloc du changement et de la réforme Michel Aoun; Ghassan Moukhaiber, Kassem Abdel-Aziz, Pierre Daccache, Solange Gemayel, Samir Azar, Nabil Boustani, Fouad el-Saad, Henri Hélou, Nicolas Fattouche, Assem Araji, Michel Murr, députés; Nassib Lahoud.
Ont brillé par leur absence, le chef des FL, Samir Geagea, ainsi que les députés de son Bloc parlementaire, la ministre Nayla Moawad, ainsi que l’ancien numéro 1 de l’Etat, Amine Gemayel et le ministre de l’Industrie, Pierre Gemayel.
Etaient présents, le commandant en chef de l’Armée le général Michel Sleiman à la tête d’une délégation d’officiers; le directeur général des FSI le général Achraf Rifi présidant une délégation d’officiers; le directeur général de la Sécurité de l’Etat, le brigadier Elias Keikati; le président du CSM Antoine Kheir, le procureur général Saïd Mirza; le président de l’Ordre de la Presse, Mohamed Baalbaki, le président de l’Ordre des Journalistes, Melhem Karam, accompagnés des membres des conseils des deux Ordres; ainsi qu’une foule de directeurs généraux, de présidents des municipalités, de représentants d’organisations syndicales sociales, culturelles et médiatiques.

Zahlé fait ses adieux
Endeuillée, Zahlé, ville natale du président, réserve à son preux fils des obsèques populaires et officielles. Peu après 16 heures, le cortège funèbre arrivé aux portes de la ville, est accueilli par des pétales de rose, du riz et les Zahliotes descendus en masse depuis Mreijat, jusqu’à Hoch el-Omara pour rendre un dernier hommage au grand disparu. La fanfare et des “Khayalés” montés sur leurs chevaux ouvrent le chemin devant le corbillard. Des applaudissements fusent et se mêlent au glas. Quelques instants après, les membres de l’armée (MP) cèdent le cercueil du président enveloppé du drapeau libanais, aux habitants de la ville qui se relayent à le porter à bout de bras.
Suivant le protocole, un escadron des FSI salue la dépouille. L’hymne aux morts précédé de l’hymne national suivent. Aux alentours de 16h30, la dépouille fait son entrée, alors que la cloche sonne le glas en l’église de Mar Elias. Les membres de la famille, les habitants et des officiels sont là. Mgr Mansour Hobeika, archevêque maronite de Zahlé, préside l’office funèbre à la fin duquel M. Georges Hraoui, fils aîné du disparu, prononce le mot de la famille: “Je vous remercie tous de nous avoir entourés au dernier adieu de mon père, homme de paternité en toute circonstance. Ayant foi dans les valeurs familiales, il a veillé sur chacun des membres de sa famille, petit ou grand. Ayant foi dans Zahlé et ses gens, il leur a ouvert sa porte et son cœur. Ayant foi dans le Liban, pays de la convivialité, de la fraternité, de la liberté et de la dignité, il s’est attaché à la “démocratie de l’équilibre” et a refusé la politique des deux poids deux mesures, se fiant à sa conscience et à sa conviction que la pureté du but ultime est plus noble que les infimes détails des circonstances imposées (…)”. Il rappelle que le président disparu visait l’intérêt général dans tout ce qu’il entreprenait: “Président, il a œuvré pour l’avenir du pays et pour la mise en place d’un Etat civil refusant le sectarisme et le fanatisme. Il ne cessait de répéter: “J’ai reçu une boule de feu, j’en ai fait un Etat; bâtissez-le de sorte qu’il soit digne du Liban et de son avenir”.
Enfin, remerciant le patriarche maronite Mar Nasrallah Sfeir, NN.SS. Boulos Matar et Mansour Hobeika, les dignitaires religieux des différentes communautés, ainsi que les trois présidents, les officiels en particulier le député Elias Skaff, les Zahliotes et tous ceux qui ont partagé le deuil de la famille, il annonce que cette dernière exécutera le dernier vœu d’Abou Georges, à savoir la pose, le 20 juillet, date de la fête de Mar Elias, de la première pierre de l’église Saint-Maron à l’archevêché maronite de Ksara.
Un dernier hommage est, enfin, rendu au président Hraoui. L’hymne aux morts, ainsi qu’une salve de 21 coups de canon accompagnent l’inhumation de sa dépouille dans sa dernière demeure. Elias Hraoui n’est plus. Mais son souvenir marquera à jamais et la mémoire des Libanais et l’Histoire contemporaine du Liban.

Par Micheline ABI-KHALIL
Article paru dans "La Revue du Liban" N° 4062 Du 15 Au 22 Juillet 2006
Editions Speciales Numéros Précédents Contacts Recherche