Evacuation massive des étrangers du Liban
Gigantesque opération française
avec quatre navires de guerre le même jour

Le Liban s’est vidé de ses étrangers. Les opérations d’évacuation massives se sont accélérées face aux bombardements et au blocus israélien, à la détérioration de la situation et la menace d’une catas-trophe humanitaire. Londres, Washington et Paris ont mis en place des dispositifs importants pour assurer le départ de leurs ressortissants. La France a réalisé la plus grande opération qui s’est avérée une réussite totale. Comme l’a expliqué l’ambassadeur Bernard Emié, c’est une opération d’aide au départ (et non pas de rapatriement) des ressortissants français de passage ou résidents, volontaires pour quitter le pays.

photo Une image de départ massif souvent répétée depuis le début des bombardements israéliens sur le Liban.

photo L’élégance ne perd pas ses droits, même quand on quitte un pays en guerre!

Dès le début des bombardements, la France a affrété le ferry grec “Iera Petra” avant la mise en place de l’opération “Baliste” groupant 1.500 militaires et quatre navires de la Marine nationale: la frégate Jean-de-Vienne (pouvant embarquer jusqu’à 300 civils), le transporteur de chalands de débarquement “Le Siroco” équipé de deux blocs opératoires, la frégate anti-aérienne “Le Jean-Bart” (300 civils) et le bâtiment de projection et de commandement “Le Mistral” (jusqu’à 4.000 civils).

photo Ce n’est pas un hall d’aérogare mais le grand préau du Lycée franco-libanais de Beyrouth transformé en centre de regroupement des ressortissants français.

photo L’informatique facilite et accélère l’inscription des voyageurs. Les volontaires sont secondés par les militaires français.

UNE MOBILISATION PERMANENTE
Sur le terrain, l’ambassade de France a pu mettre en place toute une structure d’assistance au départ des ressortissants français désireux de quitter le Liban, ainsi que ceux de l’Union européenne ayant la même motivation. L’ambassadeur Bernard Emié et ses collaborateurs étaient mobilisés en permanence pour assurer avec célérité et un grand dévouement, le succès de cette opération de vaste envergure. Dans un même élan de solidarité, de nombreux volontaires appartenant à toutes les associations françaises du Liban, l’UFE en tête suivie de la Société française de bienfaisance, ainsi que les conseillers à l’AFE, MM. Jean-Louis Mainguy, Marcel Laugel et Mme Denise Haddad, ont assuré une participation immé-diate, spontanée et constante.

photo Une voie parallèle est aménagée pour les malades prioritaires. Ici, le président de l’UFE, M. Jean-Louis Mainguy aidant un handicapé.

photo L’ambassadeur Marcel Laugel, conseiller à l’Assemblée des Français de l’Etranger, aidant les enfants non accompagnés avec leurs bagages.

OPERATIONS PRELIMINAIRES
Au centre de regroupement du Grand Lycée franco-libanais, où ont lieu les opérations préliminaires relatives à l’évacuation des ressortissants français, règne une atmosphère fiévreuse de départ. Des familles entières débarquent avec enfants et bagages. Il faut leur assurer l’accueil, le tri, l’enregistrement, le transport des bagages et l’embarquement dans les bus en direction du port. Pour faire face à toute éventualité, un poste de SAMU (Service d’aide médicale d’urgence) est installé dans la cour du lycée. Parmi les volontaires, dont une vingtaine font partie de l’UFE, le colonel Gérard Figuié après nous avoir fait visiter les différentes installations sous le grand préau, nous a expliqué que dès les premiers bombardements israéliens le 13 juillet sur la banlieue-sud de Beyrouth, le président de l’UFE, M. Jean-Louis Mainguy a organisé un point d’accueil et d’hébergement d’urgences à la “Fondation Afif Osseiran” à Fanar, dont la présidente Mme Chouéri a accepté de mettre immédiatement à sa disposition son établissement scolaire doté d’un dortoir de 200 lits. L’UFE assurant la prise en charge du fuel et la mise en place en permanence d’un minibus et son chauffeur pour le transport des réfugiés. “Vingt-cinq Franco-Libanais dont dix-sept enfants furent hébergés et nourris par nos soins entre les 14 et 18 juillet. Le consulat nous mit, également, à contribution pour l’accueil de vingt-cinq personnes hébergées jusque-là à l’ESA et vingt personnes en provenance de l’USJ. Ce fut le premier centre d’hébergement qui a accueilli par nos soins au total cinquante-cinq personnes, dont vingt-cinq enfants”, explique avec une réelle satisfaction notre interlocuteur.

photo Une attention toute particulière a été apportée aux enfants par la volontaire de l’UFE, Wafaa Saadé.

photo Un groupe d’actifs volontaires: Dr Michel Naufal, M. Michel Villar et le colonel Gérard Figuié.

LES ENFANTS DE SARKOZY
Dans le centre de regroupement du Grand Lycée qui s’est, progressivement, vidé de ses voyageurs d’un jour, une jeune volontaire est venue annoncer, vers 15 heures, la clôture des contrôles, à M. Jean-Louis Mainguy en déclarant: “Tout est terminé, il ne manque plus que les enfants de Sarkozy”. Intrigués les quelques journalistes présents se sont enquis si la progéniture du ministre français de l’Intérieur était bloquée au Liban. Renseignement pris, il s’agissait simplement d’un groupe d’enfants libanais invités à passer un mois de vacances en France par le ministre Nicolas Sarkozy à l’initiative du Conseil général des Hauts-de-Seine, en coopération avec l’Association médicale franco-libanaise.

Message du consulat général de France à Beyrouth

En raison du nombre très important des demandes de visa et afin d’éviter les files d’attentes pénibles, le consulat général de France à Beyrouth reprendra la procédure de réception des demandes de visa sur rendez-vous uniquement. Tél.: 1214.
Attention: le délai moyen de délivrance est de 12 jours si le dossier déposé est complet. (Voir la liste à fournir sur le site du consulat: www.ambafrance-lb.org).

UN PREMIER BILAN
Dans l’enceinte du port de Beyrouth, un autre officier de l’UFE à la retraite, le colonel Charles-Louis Mallez nous reçoit chaleureusement. Il a revêtu avec une visible émotion son uniforme rangé depuis quinze ans pour faire partie de l’équipe de l’attaché de Défense avec pour mission de s’occuper de l’aide humanitaire. Il nous entretiendra, aussi, de l’évacuation des ressortissants français, des divers mouvements des navires et dressera un premier bilan de l’opération “Baliste”. “Il y eut jusqu’à ce jour, quatre rotations de navires à destination de Chypre: la première, le 19 juillet par le ferry grec “Iera Petra” avec 900 Français, la deu-xième, le 23 juillet, avec deux bateaux: la frégate Jean-de-Vienne avec 300 passagers et le ferry “Iera Petra” transportant 1.400 Français, la troisième rotation, le 25 juillet avec le Siroco (700 passagers) et le Iera Petra (1.400). Enfin, la quatrième rotation, la plus importante effectuée dans le cadre de l’opération Baliste avec la participation le même jour (le 28 juillet) de quatre navires de guerre: le Mistral, deuxième plus gros bâtiment de la flotte française (avec 1.300 civils), le Siroco (300), les deux frégates anti-sous-marins “Jean-de-Vienne” et antiaérienne “Jean-Bart” (200 passagers chacune). Avec cela, il faut compter les rotations quotidiennes par hélicoptères de Naqoura et Tyr, ainsi que la mise en place par l’ambassade de France d’un convoi sécurisé pour le transfert de Nabatieh vers Beyrouth de 120 personnes”. Selon des sources du ministère français des Affaires étrangères, ce dispositif a permis d’évacuer près de 8.500 personnes, dont 6.700 Français.

AMERICAINS, ANGLAIS ET ONUSIENS
De leur côté, les Etats-Unis ont dépêché au Li-ban neuf navires militaires pour rapatrier leurs ressortissants, dont le nombre était évalué à quelque 25.000, avant les évacuations. Une opération de vaste envergure qui intervient 23 ans après le départ des marines du Liban à la suite d’un attentat à la bombe qui avait causé la mort de 240 marines. Egalement, en direction de Chypre, la plus grosse évacuation de Britanniques du Liban a eu lieu le 20 juillet à bord du Bulwark, un navire de guerre capable de transporter plusieurs milliers de personnes. Cinq avions ont ramené au Royaume-Uni ces réfugiés évalués à beaucoup plus qu’un mil-lier. La veille, un millier de Britanniques avaient, également, été évacués vers Chypre à bord de deux navires de guerre. De même, un bateau affrété par l’ONU a évacué une centaine de membres de familles du personnel de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL) pour la première fois de Tyr, au Liban-Sud. En ce jour le plus long des évacuations, vendredi 28 juillet, après que le dernier passager soit monté à bord de la frégate Jean-de-Vienne, quittant avant la tombée de la nuit, la terre libanaise en détresse, un bénévole demeuré à quai me questionna avec inquiétude: “Et maintenant que va-t-il nous arriver?”

Par Jean DIAB
Article paru dans "La Revue du Liban" N° 4065 Du 5 Au 12 Août 2006
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