Dernier ultimatum à Fateh el-Islam
“La reddition ou l’élimination militaire”

Les options de Fateh el-Islam se limitent à deux: la reddition ou bien l’élimination militaire. L’ultimatum de M. Elias Murr, ministre de la Défense, reflète sans l’ombre d’un doute, la détermination du gouvernement d’en finir avec le groupuscule terroriste. Encerclés depuis une semaine, isolés militairement et politiquement, les miliciens islamistes sont désormais acculés au pied du mur. Surtout que l’Armée libanaise n’a aucune intention de lever son blocus autour du camp de Nahr el-Bared. En effet, avançant jusque-là fermement mais avec prudence et sagesse, Yarzé ne se laissera pas faire. A l’heure où les tractations politiques et concertations libano-palestiniennes se poursuivent et que l’on évoque que 250 éléments armés palestiniens dépêchés à Baddawi se chargeront eux-mêmes de la neutralisation de Fateh el-Islam, le commandement de l’Armée a appelé ses troupes à se tenir prêtes pour toute nouvelle mission. Dans un communiqué intitulé “Donner sa vie pour le Liban”, la direction de l’orientation de l’Armée libanaise a affirmé (...) “qu’en dépit de la profondeur des blessures et l’horreur de ce qui s’est passé, l’Armée reste et restera garante de la vie de nos frères palestiniens à l’intérieur comme à l’extérieur des camps”. Et le texte d’ajouter “l’Armée qui représente la volonté nationale, ne se montrera pas clémente, quelles que soient les circonstances envers ces bandes de terroristes et ne leur permettra pas de transformer les camps en base pour semer la discorde.” Rendant hommage à l’action des soldats, le communiqué appelle les troupes à “se tenir encore prêtes pour exécuter les différentes missions qui lui sont imparties car sans l’Armée, le pays ne peut vivre!”

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L’Armée a payé le prix fort au début des affrontements.

Un calme précaire et fragile règne au Liban-Nord. Après trois jours d’affrontements acharnés entre les forces de l’ordre et les éléments de Fateh el-Islam à Tripoli et à Nahr el-Bared, la “trêve humanitaire” entamée mardi en début de soirée, s’est poursuivie permettant l’évacuation de plus de 13.000 Palestiniens vers le camp voisin de Beddawi et les différentes localités tripolitaines. Elle a, aussi, facilité l’entrée au camp de quatre camions de l’Unrwa chargés d’aides humanitaires. Les secouristes ont pu, également, retirer les cadavres des rues et transporter malades et blessés dans les hôpitaux.
Profitant de cette accalmie, hommes, femmes et enfants ont commencé un nouvel exode. Effrayés par une éventuelle reprise des hostilités, surtout que selon des rumeurs quelque 300 hommes issus des différentes factions palestiniennes s’apprêtent à entrer dans le camp pour éradiquer Fateh el-Islam, des milliers de réfugiés palestiniens ont fui le camp de Nahr el-Bared. Entre-temps et sur le terrain, l’Armée libanaise qui a réussi à récupérer ses positions, resserre toujours son étau autour du camp palestinien, contrôlant toutes ses entrées et les collines avoisinantes.
S’étendant sur moins d’un kilomètre le long du littoral, le camp de Nahr al-Bared abrite plus de 30.000 réfugiés et des centaines de fondamentalistes de Fateh el-Islam. Il a été, cette semaine, le théâtre de violents accrochages entre les troupes régulières libanaises et les intégristes salafistes qui y ont élu domicile.

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L’Armée autorisant un couloir humanitaire, 4 convois de l’Unrwa ont délivré des vivres aux civils.

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Retranchées dans des immeubles résidentiels, les cellules terroristes ont mené des combats de rue dans les ruelles de Tripoli.

Une perquisition qui dégénère…
Déclenchés dimanche à l’aube, une heure après que les FSI eurent entamé une chasse à l’homme à l’issue du hold-up d’une branche de la Banque Méditerranée à Amioun (caza de Koura), les affrontements ont vite pris de l’ampleur, particulièrement après le martyre d’une vingtaine de soldats libanais dans des attaques-surprises. Echaudée en 2000 à Denniyé, l’Armée libanaise, dont les vieilles blessures ont été rouvertes, riposte, décidée d’en finir une fois pour toutes avec le groupe terroriste.
Tout commence lorsque, suite à des informations reçues, les FSI décident de poursuivre les auteurs du vol de la BankMed jusqu’à leur lieu de résidence à Tripoli, précisément dans le quartier dit d’Al-Mitayne, le quartier le plus huppé de la ville. Croyant avoir affaire à une opération de perquisition ordinaire, le commandant de l’opération, Bassem al-Ayyoubi, n’a pas vraisemblablement averti l’Armée libanaise. Encerclant l’immeuble Badawi où les criminels se sont réfugiés, les éléments de son unité tentent de les déloger. Cependant, ces derniers ouvrent le feu depuis le cinquième étage et le rez-de-chaussée. Prises de court, surprises par l’ampleur de la riposte et la présence de tout un réseau affilié au groupe salafiste Fateh el-Islam, les forces de sécurité alertent l’armée et exigent des renforts.

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A Beddawi, un jeune manifestant brûle des pneus.

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Plus de 13.000 Palestiniens ont évacué le camp de Nahr el-Bared.

Moins d’une heure plus tard, les clashes tournent en véritables combats de rue. Assiégés par des forces spéciales des FSI et de l’Armée, les intégristes entrent en contact avec d’autres cellules jusque-là dormantes et retranchées dans deux autres quartiers résidentiels de Tripoli, à Zahiriyya et Tell, ainsi que le réseau de Nahr el-Bared. Alertés, ces derniers se mobilisent. Des batailles de rue sanglantes se déroulent, alors, dans le pourtour du centre “Ruby Rose” et de l’immeuble “Abdo”. Des francs-tireurs barricadés dans des immeubles résidentiels, ouvrent le feu sur les forces de sécurité. Parallèlement, d’autres groupuscules tendent des embuscades à l’Armée en diverses positions, principalement sur l’autoroute de Qalamoun reliant Tripoli à Beyrouth où sept soldats trouvent la mort; à Qalhat, ainsi qu’aux abords du camp de réfugiés.
Tôt dans la matinée, quatre soldats libanais sont lâchement liquidés dans leur caserne. D’autres, regagnant leurs domiciles, sont interceptés par des éléments armés et tués, décapités. Au total, une vingtaine de soldats trouvent la mort, avant que la bataille soit véritablement engagée. Face à ces débordements, les renforts en hommes et en matériels affluent vers le Nord et sur l’ensemble du territoire, les militaires sont alertés.

L’Ordre des journalistes condamne l’agression contre l’Armée

Dans un communiqué, l’Ordre des journalistes a vivement condamné l’acte lâche commis à l’égard des troupes libanaises à Nahr el-Bared, Minyé, Tripoli et Qalhat, appelant les autorités libanaises à éradiquer tout phénomène terroriste, quelle qu’elle soit son origine. Soulignant que l’islam est innocent de ces criminels qui s’en sont pris à nos enfants, le texte du communiqué précise que “l’institution militaire a été de tout temps et restera la garante de l’unité, de la coexistence et de la paix civile libanaises.”
L’Ordre des journalistes a exhorté toutes les parties libanaises, opposants et loyalistes, de cesser les accusations et les polémiques, de s’unir autour de l’Armée (..)
“Les mains criminelles ne se sont pas contentées de ce qu’elles ont commis contre l’Armée. A l’heure où tous se préoccupaient des carnages survenus au Nord et des moyens de les confronter, le crime a frappé à Achrafieh, à Verdun et à Aley. Sachant que cette succession des événements dramatiques soulève des interrogations à plus d’un égard quant à ses objectifs. Ceci dit, l’Ordre des journalistes considère que la solution consiste à inciter les Libanais à se rencontrer, à dialoguer et à discuter entre eux des moyens susceptibles d’éviter au pays le gouffre”, poursuit le communiqué. Saluant les martyrs de l’Armée libanaise dans l’espoir que leur sang versé pave la voie à une paix véritable, l’Ordre a enfin exprimé sa profonde affliction quant à la mort de ce corps d’élite et présenté ses condoléances aux familles des soldats ainsi qu’à l’institution militaire. L’Ordre a également regretté la mort de la victime innocente lors du lâche attentat à Achrafieh, souhaitant un rapide rétablissement à tous les blessés.

Combats au mortier
A Tripoli, les attaques aux mortiers et aux mitraillettes permettent aux premières heures de la matinée de tuer plusieurs fondamenta-listes de diverses nationalités, dont un Yéménite et un Bangladais. Parmi eux “Abou Yazan” numéro trois du groupuscule et Saddam el-Haj Dib, recherché en Allemagne pour avoir projeté de saboter une voie ferrée lors de la Coupe du monde de football en 2006.

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Les soldats procèdent à des fouilles systématiques.

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Les funérailles du sergent Mehdi al-Mazbouh à Ali al-Nahré.

Quelques kamikazes barricadés dans l’immeuble “Abdo” résistent. L’après-midi, les forces de l’ordre réussissent à les neutraliser et ratissent la ville. Ailleurs, deux autres islamistes prennent deux enfants en otage. Encerclés, un premier se rend, alors que le second se suicide. Au total, une vingtaine d’islamistes sont capturés, alors qu’une vingtaine sont tués. Simultanément, aux abords du camp de Nahr al-Bared, les combats font rage. L’Armée, équipée de blindés et d’artillerie lourde, notamment de mortiers et des obus de chars, s’efforce de regagner ses positions, de maîtriser les entrées du camp et les collines donnant sur la route principale de Tripoli-Abdé.
En fin de journée, malgré le lourd tribut qu’elle a payé, l’Armée réussit à recouvrer ses positions, assiège le camp, boucle ses entrées et réplique aux tirs des éléments armés. Les échanges de tirs se poursuivent par intermittence les jours suivants, alternés par des pauses et des trêves, sans cesse violées.

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L’enterrement du sergent Mazen Fawzat al-Aawar à Kornayel.

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Les soldats au garde-à-vous lors de l’enterrement à Richmaya
de leur compagnon d’armes, l’adjudant Elie Maurice Maalouf.

Les Palestiniens des camps évoquent la présence de civils armés qui tirent sur l’Armée et sur Fateh el-Islam. Bien qu’ils condamnent ledit groupe, ils demandent à l’armée d’arrêter le bombardement du camp, invoquant une raison socio-humanitaire. En effet, à maintes reprises, les terroristes s’en prennent aux secouristes du Croissant-Rouge et de la Croix-Rouge. Lundi en début de soirée, le groupuscule salafiste lance une nouvelle attaque-surprise contre une position de l’Armée libanaise à l’entrée nord du camp, entraînant la mort de trois militaires. Mardi, des islamistes cachés dans un véhicule évacuant des familles ouvrent le feu sur un barrage de l’Armée. Alors qu’à Tripoli, un kamikaze qui a réussi à se cacher dans l’immeuble “Abdo” durant trois jours, se fait exploser blessant plusieurs éléments des FSI. Il s’agit de “Abou Yassine”, expert numéro un en explosifs du groupuscule. Mercredi soir, à Bab el-Tebbané, un clash oppose Bilal Riad Mahmoud dit “Abou Jandal” à une patrouille de l’Armée. Propriétaire du véhicule qui a servi dans le cambriolage de la BankMed, ce dernier est grièvement blessé alors qu’il tentait de s’enfuir. Il décède à l’hôpital. Par ailleurs, l’Armée a fait échec à une tentative de fuite du camp par voie maritime. Ceci dit, le corps du numéro deux de Fateh el-Islam, surnommé Boumedienne, a été retrouvé à Abdé. “L’émir” du groupuscule, le fils de Chaker Absi a été également tué. En outre, selon un témoin oculaire, Chaker Absi lui-même est blessé au bras. En début de soirée, les accrochages aux abords du camp ont repris, laissant craindre une reprise des hostilités.

Solidarité internationale

Aux niveaux international et arabe, l’appui au Liban, dès les premières heures des affrontements, était unanime.
Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-Moon a condamné les attaques menées par les miliciens islamistes. Le secrétaire général de l’ONU qui s’est déclaré “préoccupé” par la situation au Liban, s’est félicité de la position commune prise par les factions palestiniennes au Liban. Il a en outre appelé les Libanais à s’unir. De son côté, Terje Roed Larsen, émissaire onusien chargé de l’application de la 1701 a mis en garde toutes les parties libanaises contre un “effondrement total de la situation”. Il a en outre estimé que “l’Armée libanaise doit prendre les mesures nécessaires pour contrôler toutes les régions du pays.”
Au cours d’une visite-éclair à Beyrouth, M. Javier Solana, haut représentant de l’UE pour la politique extérieure a estimé que l’Armée libanaise est à même de contrôler la situation. Rappelant l’engagement de l’Union européenne à l’égard du Liban, le responsable européen a, en réponse aux questions des journalistes, affirmé qu’il ne possédait pas de “preuves” sur une implication de la Syrie dans l’escalade de la violence au Liban.
Face à la tentative de déstabilisation de la sécurité au Liban, les Etats-Unis ont de leur côté, réitéré leur appui au gouvernement Sanioura. Commentant les affrontements, le président américain Georges W. Bush a déclaré qu’il fallait maîtriser les “extrémistes qui tentent de renverser” la démocratie libanaise.
La France a dépêché à Beyrouth M. Bernard Kouchner, nouveau ministre des Affaires étrangères pour réaffirmer sa solidarité avec le Liban et avec sa population dans cette période critique. Auparavant, le nouveau président Nicolas Sarkozy, s’adressant au Premier ministre libanais, a dit: “Nous ne devons pas céder au chantage. Ce serait envoyer un mauvais signal à ceux qui veulent la déstabilisation du Liban que de céder à leurs injonctions. Ne pas agir reviendrait à céder aux menaces et à l’intimidation”. A Moscou, le porte-parole du ministère des Affaires russes a exprimé son inquiétude au sujet des affrontements au Liban-Nord condamnant toute action visant à déstabiliser le pays. Faisant part de leur “profonde inquiétude” la Grande-Bretagne tout comme l’Espagne ont apporté leur soutien aux troupes libanaises.
Par ailleurs, réunis au Caire pour discuter des derniers développements au Liban, les délégués des pays membres de la Ligue arabe ont publié un communiqué stigmatisant l’agression qui a ciblé les forces régulières libanaises. Pour sa part, le chef de l’Organisation de la Conférence islamique (OCI) Ekemledine Ihsanoglu a, dans un communiqué, rendu hommage à l’Armée libanaise dans sa lutte contre les terroristes.
Exprimant leur inquiétude, l’Arabie saoudite et le Koweït ont appelé “à préserver la souveraineté et la stabilité du Liban et à soutenir tout ce qui est de nature à consolider sa sécurité”.
De son côté, Walid Moallem, ministre syrien des Affaires étrangères, a nié tout lien entre son pays et Fateh el-Islam. “Nous renions le groupe Fateh el-Islam. Des membres de ce groupe sont recherchés par les services de sécurité syriens”, a-t-il affirmé.
Notons que le pays du Cèdre figurera également sur l’agenda du Quartette international pour le Proche-Orient le 30 mai à Berlin.

Les Palestiniens critiquent l’armée
Durant des jours, une épaisse fumée s’est élevée au-dessus du camp. Le quartier al-Safouri, situé dans la partie nord, proche de la frontière syrienne, où se concentrent les combattants intégristes, est le plus visé par les bombardements de l’Armée. Soucieuse d’épargner les civils, cette dernière, à maintes reprises, appelle les Palestiniens à ne pas abriter les éléments armés, ni les laisser se poster dans leurs maisons et immeubles pour éviter de devenir la cible des tirs des soldats. Bien qu’appuyée par les leaders des différentes factions qui ont, d’abord, soutenu à l’unanimité toute mesure décidée par les autorités libanaises pour éradiquer Fateh el-Islam, les représentants des Palestiniens ne tardent pas à se retourner contre l’Armée, lui reprochant le bombardement intensif du camp. Contrairement aux manifestations anti-Jund el-Cham qui devaient être organisées à Aïn el-Héloué et vite réprimées pour éviter une extension des tensions dans les autres camps, des manifestations contre l’Armée sont organisées dans les camps de Aïn el-Héloué, à Saïda; de Rachidiyyé à Tyr et de Beddawi, non loin de Tripoli. Conspuant Saad Hariri, chef du Courant du Futur et Fouad Sanioura, Premier ministre, des civils palestiniens descendent dans la rue, avec les islamistes barbus de Jund el-Cham et de Isbat al-Anssar, pour protester contre le bombardement des civils par l’Armée. Ces marches interviennent après que Sultan Aboul-Aïnayn, secrétaire général de Fateh au Liban a, au cours d’une conférence de presse, laissé entendre “qu’une nouvelle intifada éclaterait dans les camps, si les affrontements devaient durer longtemps”. Il avoue craindre que “les choses échappent aux chefs des factions palestiniennes, en raison de la grande pression que subissent les Palestiniens du camp de Nahr el-Bared”. Aussi, appelle-t-il le commandement de l’Armée “à cesser le pilonnage des civils”. “Il n’y a pas moyen, dit-il, de parvenir ni à un dialogue ni à des négociations tant que les bombardements se poursuivent.”
Par ailleurs, commentant les rumeurs concernant une éventuelle incursion de l’Armée dans les camps, Oussama Hamdane, représentant de Hamas, au Liban souligne que “toute décision prise en dehors de l’unanimité palestinienne, menace la sécurité des camps.”
Malgré que Abbas Zaki, représentant de l’OLP à Beyrouth qui a multiplié les contacts avec les responsables libanais et s’est même rendu à Bkerké, avait indiqué qu’il ne s’opposerait pas à une décision du gouvernement libanais d’envoyer l’Armée au camp de Nahr el-Bared. Interrogé sur le point de savoir s’il soutient l’entrée de l’Armée au camp après l’évacuation des civils, M. Zaki a estimé “qu’il appartient aux Libanais de prendre cette décision. Nous sommes en faveur de tout ce qui sert l’intérêt du Liban”. Critiquant les Palestiniens qui s’en sont pris à l’Armée et aux autorités libanaises, il a soutenu que son peuple considère que “les forces régulières constituent une ligne rouge”.

Khaled Aref: “Nous restons solidaires des Libanais”

photo“Nous ne permettrons pas que les camps palestiniens se transforment en zones perturbées menaçant la sécurité du Liban et sa stabilité, assure M. Khaled Aref, secrétaire de l’OLP et de Fateh au Liban-Sud. Fateh el-Islam ne fait pas partie du tissu palestinien. L’Islam et la Palestine n’ont aucun rapport ou lien avec ce groupe terroriste”.
M. Aref qui nous a reçus dans son bureau au camp de Aïn el-Héloué, a expliqué en ces termes l’inertie des Palestiniens du camp de Bared où les terro-ristes s’étaient établis depuis un certain temps: “Cette formation est composée d’éléments disparates de différentes nationalités. On ne peut ni ne doit donc faire assumer à nos frères palestiniens la responsabilité de leur comportement répréhensible.
En tant qu’hôtes du Liban, nous sommes soucieux autant que nos frères libanais, de la sécurité et de la stabilité de ce pays. Le seul fait de s’attaquer à l’Armée libanaise est à notre avis un crime que nous réprouvons. Aussi, demandons-nous à l’Armée d’agir avec fermeté contre cette bande de criminels. Je n’ai pas besoin d’affirmer que les Palestiniens du Liban soutiennent sans réserve le gouvernement et l’Armée, dans leur répression des agissements de ce rassemblement hétéroclite de hors-la-loi”.
Interrogé sur le point de savoir si les remous de Bared pourraient se transposer au camp de Aïn el-Héloué, M. Aref a répondu: “Nos efforts visent à prévenir une telle éventualité. En coopération avec les forces islamiques, les cheikhs et les chefs de quartier, nous combattons avec vigueur toute tentative de sédition. Nous ne laisserons pas les déviationnistes et les dissidents entraîner nos camps dans des opérations susceptibles de compromettre leur sécurité. Toutes les organisations palestiniennes réagiront comme un seul homme en cas de violation de la décision tendant à maintenir nos camps en dehors des affrontements internes”.

Ali Fayçal: “Libanais et Palestiniens
sont dans la même tranchée face à Israël”

Quant à M. Ali Fayçal, membre du bureau politique du Front démocratique pour la libération de la Palestine (FDLP), il a fait la déclaration suivante: “Depuis l’apparition de Fateh el-Islam, toutes les organisations palestiniennes ont adopté à son égard, une attitude ferme et négative, parce qu’elles l’ont considéré comme un groupe répudié par la société palestinienne dans son ensemble. Nous en avons donné la preuve palpable, en levant toute couverture politique dont ce mouvement terroriste pouvait se prévaloir pour entreprendre des opérations déstabilisatrices.
“Les attaques perpétrées contre les effectifs de l’Armée libanaise qui se sont soldées par plusieurs martyrs, ont été condamnées par tous nos frères. D’autant que nous entretenons avec l’institution militaire des liens fraternels et la considérons comme une armée nationale.
“Nous nous trouvons dans la même tranchée face à l’ennemi israélien. Il n’est donc de l’intérêt d’aucun Palestinien de compromettre nos relations avec la Grande Muette. Toutes les organisations palestiniennes sont fermement déterminées à n’épargner aucun effort pour sauvegarder la paix civile. De plus, Libanais et Palestiniens sont résolus à mener un même combat pour assurer le retour des réfugiés de la diaspora en Terre sainte, en vertu de la résolution 194 du Conseil de sécurité”.

Soutien inconditionnel aux troupes
Unanimes à appuyer l’Armée, les loyalistes et les opposants divergent lorsqu’il s’agit de définir les responsabilités. Alors que la majorité accuse sans ambages la Syrie, l’opposition critique le laxisme des dirigeants et l’absence de coordination entres les différentes institutions militaires. Sachant que du fait des accrochages, les dossiers de la sécurité, du règlement des armes hors et dans les camps palestiniens, du contrôle des frontières et la présence sur le territoire de groupes intégristes affiliés à al-Qaëda ont refait surface accentuant les tiraillements politiques. C’est dans cette atmosphère tendue, enve-nimée par trois attentats que l’Armée a fait ses adieux à ses martyrs. Bien que sollicitées sur multiples fronts, les forces de sécurité ont renforcé leur surveillance sur l’ensemble du territoire. L’Armée multipliant les barrages, points d’inspection et patrouilles.

Par Micheline ABI-KHALIL
Article paru dans "La Revue du Liban" N° 4107 Du 26 Mai Au 2 Juin 2007
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