Historique et inédite
La visite au Liban du président Sarkozy et d’une imposante délégation française: un appui inconditionnel de la France au Liban tout entier

Samedi 7 juin a été la “Journée de la France au Liban”, dans une initiative historique et inédite, “qui n’a aucun précédent”, selon les propres termes du chef de l’Etat français.
Le président Sarkozy a invité la France, “dans toutes ses factions et ses diversités”, à venir en sa compagnie, le temps d’une journée-express, si riche en symboles, pour exprimer son appui et sa solidarité inconditionnels au Liban tout entier et à son nouveau président, Michel Sleiman.
Trois avions français, dont celui du président Sarkozy venant d’Athènes, où il était en visite officielle et deux autres transportant le Premier ministre, François Fillon et le reste de la délégation, ont atterri à 10h15 sur la piste nÞ17 de l’aéroport international Rafic Hariri. Sur les trois avions flottaient les drapeaux français et libanais. Dans l’air on respirait beaucoup de soulagement et un espoir renaissant. Qu’elle était belle la France, la “Douce France”, venue dans toutes ses factions manifester les constantes d’une longue et solide amitié séculaire, remontant au roi Louis IX! C’est ce qu’a voulu exprimer le président Michel Sleiman dans son discours devant son hôte français: “Que les pensées des Libanais se tournent vers l’Europe et elles se portent naturellement vers la France”.

photo Les présidents Sarkozy et Sleiman, au garde-à-vous écoutant les hymnes nationaux français et libanais.

photo A l’aéroport, les deux présidents passant en revue la garde républicaine de l’Armée libanaise.

Le général de Gaulle n’a-t-il pas lui-même déclaré un jour: “Le cœur de la France bat au rythme de celui du Liban?”
Ce sont ces sentiments qu’a voulu réaffirmer samedi dernier le président Sarkozy accompa-gné des ténors de toutes les composantes de la politique française, dont le Premier mi-nistre François Fillon; le ministre de la Défense, Hervé Morin; le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner; François Hollande (P.S), François Bayrou (Modem), Marie-Georges Buffet (P.C.F), Patrick Devedjian (U.M.P), Jean-Pierre Raffarin, vice-président de l’UMP et ex-Premier ministre; Jean-François Copé, chef de file des députés UMP; Cécile Duflot (Verts), Christiane Kammermann, sénatrice des Français de l’étranger; Amine Maalouf, écrivain franco-libanais, originaire de Kfarakab (Metn), lauréat du Prix Goncourt 1998 et une importante délégation de la presse française et libanaise.

photo Sur le tapis rouge entrant au salon d’honneur de l’aéroport Rafic Hariri.

photo Conversation entre les deux chefs d’Etat en présence de MM. Nabih Berri et François Fillon.

Premier chef d’Etat occidental à fouler le sol libanais après l’élection, le 25 mai, du président Michel Sleiman, M. Sarkozy a été accueilli à sa descente d’avion par le chef de l’Etat, entouré du président de la Chambre, Nabih Berri et du Premier ministre Fouad Sanioura, ainsi que de l’ambassadeur de France, André Parant et des membres de l’ambassade.

photo Premier aparté entre Sarkozy et Sleiman, où il fut question des fermes de Chebaa et de l’aide à l’Armée libanaise.

photo Mini Conseil dans les salons du palais de Baabda, les présidents Sarkozy et Sleiman, MM. Nabih Berri, Fouad Sanioura et Faouzi Salloukh.

Il a eu droit au tapis rouge réservé aux hôtes de marque, a pu saluer la garde présidentielle et écouter au garde-à-vous, les hymnes nationaux français et libanais.
Au salon d’honneur de l’aéroport, il a déclaré: “Ce qui se passe aujourd’hui, est important pour les Libanais et le monde entier vous regarde. Que chacun soit, alors, présent au rendez-vous”.
Le président français a félicité, vivement, le président Sleiman pour son élection l’assurant que “la France se tenait à ses côtés”.

Texte intégral du discours du président Nicolas Sarkozy

photoMonsieur le président de la République,
Dans un geste qui, je crois, n’a aucun précédent, j’ai proposé au Premier mi-nistre, à plusieurs ministres et aux dirigeants des principaux partis politiques français, d’accomplir cette visite officielle au Liban à mes côtés. Je les remercie d’avoir accepté. Leur présence est un message : en ce moment d’espoir fragile pour le Liban, c’est toute la nation française dans ses différentes sensibilités politiques, qui vient à Beyrouth adresser au peuple libanais, dans toutes ses composantes - sans exception - un message d’amitié, de solidarité, de fraternité. Un message d’espoir et d’engagement.
Pour nous, Français, le Liban est, et doit rester, le plus beau creuset des civilisations et des religions, le symbole même de l’ouverture et de la diversité assumée. Et si depuis tant de siècles, une relation unique rapproche nos deux peuples, c’est bien parce que nous partageons les mêmes valeurs de tolérance, de respect de l’autre, d’acceptation de la différence. Ces valeurs qui fondent votre démocratie et doivent permettre à des citoyens de toutes origines, de toutes confessions, de vivre et de gouverner ensemble, dans le dialogue et la recherche permanente de l’accord au bénéfice de tous.
Que les Libanais, comme hier, se déchirent, que souffre le Liban, alors votre souffrance est la nôtre et nous n’avons de cesse de vous apporter notre soutien, pour trouver avec vous et avec toutes les parties concernées, les voies d’un apaisement et d’un règlement. Ce fut le sens de notre action à l’été 2006 pour faire en sorte, avec la résolution 1701, que le conflit s’arrête et que votre pays puisse se consacrer à sa reconstruction. Ce fut le sens de cette formidable solidarité humaine et financière déployée, sous notre impulsion, lors de la Conférence de Paris III et le sens des efforts inlassables de Bernard Kouchner avec la réunion de La Celle-Saint-Cloud et ses visites à Beyrouth.
Que le Liban se réconcilie, trace un chemin d’espoir et de raison, alors nous, Français, nous partageons son espérance et sa volonté de reconstruire. Nous avons foi dans le génie de tous les fils de ce pays pour que la vie reparte, pour que de nouveaux projets voient le jour, pour que la créativité et la force des Libanais soient mises au service de la prospérité de tous.
Monsieur le président,
Votre brillante élection marque pour le Liban l’entrée dans une ère nouvelle. Elle est un gage d’espoir pour tous les Libanais, qui apprécient les grandes qua-lités qui ont fait votre réputation à la tête de l’Armée. Une Armée garante de la liberté d’expression, lors des immenses manifestations populaires du printemps de Beyrouth; une Armée composante essentielle de l’Etat et de sa défense; une Armée désormais déployée au Sud, en coordination avec la Finul, pour y exercer la souveraineté de l’Etat. Une Armée courageuse et opérationnelle, fer de lance de la lutte contre le terrorisme, comme elle l’a montré à Nahr el-Bared. Et surtout, une Armée institution majeure et respectée, symbole de l’unité nationale.
Ces qualités, Monsieur le président, vous allez les mettre au service de tâches encore plus grandes: celles d’assurer dans la durée la stabilité du pays et de ses institutions; de promouvoir la liberté et la prospérité de tous les citoyens dans le respect de leur diversité culturelle et religieuse; de rendre, enfin, au Liban toute la place qui lui revient dans la région et dans le monde. Ce sont là les légitimes objectifs que vous avez fixés dans le remarquable discours d’investiture que vous avez prononcé le 25 mai.
C’est toute la France qui veut vous aider à réussir la pleine reconstruction de l’Etat. A faire en sorte que l’Etat libanais s’impose à tous. Un Etat fort. Un Etat d’autant plus respecté qu’il sera doté d’institutions solides et se mettra pleinement au service des citoyens et de leur liberté. Toute la France mais, aussi, l’Union européenne veulent vous aider à atteindre ces objectifs, car ils conditionnent la concorde et la paix civile, éloignent les menaces et les drames qui pèsent depuis trop longtemps sur votre pays et sur la région; ils déterminent l’avenir du peuple libanais.
Après l’épreuve récente, dans l’amitié et la confiance qui nous unissent, nous allons enrichir ensemble la relation entre la France et le Liban, déjà si forte et si féconde. Nous avons été à vos côtés dans les bons et les mauvais jours avec, notamment, l’engagement constant du président Jacques Chirac. Nous le resterons avec la même détermination, pour participer aux immenses chantiers qui s’ouvrent. Car, une fois les institutions stabilisées, il faudra s’atteler à la reconstruction de l’Etat et à la dynamisation de l’économie, en mettant en oeuvre les réformes qui permettront au Liban de bénéficier pleinement des acquis de Paris III. Ce sera, notamment, la responsabilité du président du Conseil des ministres, M. Fouad Sanioura, à qui je souhaite rendre un hommage particulier.
Nous resterons à vos côtés pour promouvoir la cause du Liban dans les instances internationales, que ce soient les Nations unies ou les organismes financiers multilatéraux.
Nous le resterons pour renforcer les capacités de l’Armée libanaise dans le cadre de l’élaboration, par un dialogue sincère entre Libanais, d’une stratégie de défense nationale qui ne peut plus être différée.
Nous le resterons pour que la mort de Rafic Hariri et la longue litanie des attentats qui ont frappé depuis octobre 2004 tant des meilleurs fils du Liban, ne demeurent pas impunis. C’est tout le sens de la création du Tribunal à caractère international.
Nous le resterons, enfin, pour que l’accord de Doha, couronnement d’un processus où la France a tenu toute sa place, trouve sa pleine application dans toutes ses clauses.
A l’aube de votre mandat, au moment où le Liban s’engage sur le chemin de l’espoir et doit saisir cet instant de sa longue Histoire pour jeter les bases de la réconci-liation nationale, je souhaite vous redire, Monsieur le président, toute mon estime et toute la détermination qui sera la mienne et celle de mon gouvernement, à vous appuyer dans tous les domaines où vous le souhaiterez, pour l’avènement d’un Liban désormais pleinement indépendant, libre, stable, uni et souverain.
Je lève mon verre à l’avenir de ce Liban que nous aimons et à l’éternelle amitié entre nos deux pays et nos deux peuples.
Vive le Liban
Vive la France

ÉLECTION, SYNONYME D’ESPOIR
“L’élection de Michel Sleiman est synonyme d’espoir pour tous les Libanais sans exception. Il aura la grande responsabilité de conduire à terme la réconciliation nationale et il est pour cela essentiel que toutes les forces politiques libanaises traduisent dans les faits leur engagement à dialoguer.
“Le Liban vient de traverser une grave crise et de connaître de longs mois de paralysie dans ses institutions. Aujourd’hui, grâce aux efforts de tous, de la Ligue arabe, du Qatar et de la France, l’accord de Doha a permis de débloquer la situation et de jeter les bases d’une véritable réconciliation”, a-t-il poursuivi.

photo “Pour nous, Français, le Liban est et doit rester le plus beau creuset des civilisations et des religions” dit Sarkozy dans son discours.

photo “Votre visite marque les liens puissants d’amitié et de confiance forgés au long de l’Histoire entre la France et le Liban”, dit Sleiman dans son discours.

“Il y a eu trop de souffrances au Liban, trop de malheurs, trop de morts. Est venu le temps de se tourner vers l’avenir, un avenir qui passe par le dialogue où chaque Libanais trouvera sa place”, a affirmé M. Sarkozy.
Puis, le convoi officiel a gagné le palais de Baabda qui, grâce à la visite du président français a retrouvé tout son panache d’antan.
Un grand déjeuner y a été offert où se sont retrouvés tous les partis et représentants des blocs parlementaires au Liban. Ce tableau de retrouvailles nationales, à Baabda, qu’on n’avait plus revu depuis belle lurette, a été rendu possible sous les auspices de la France.

photo Les toasts sont portés à la santé de la France et du Liban.

photo MM. Samir Geagea, André Parant, Marwan Hamadé, Bernard Kouchner, Saad Hariri et Walid Joumblatt.

Dans l’aparté qui a eu lieu entre les présidents français et libanais, il a été question de la stratégie de défense, de l’instauration d’un Etat palestinien et du retour des réfugiés dans leur terre, lorsqu’un compromis sera trouvé, ainsi que d’une aide mi-litaire à l’Armée libanaise.
Le président Sleiman a répondu à son homologue français en précisant que la stratégie de défense sera examinée après le retrait israélien de la région de Chebaa et des collines de Kfarchouba.

Discours du président Michel Sleiman

photoMonsieur le Président,
C’est pour moi un immense plaisir de vous accueillir en ce jour au palais de Baabda. Je tiens à saluer la présence du Premier ministre, du ministre des Affaires étrangères, du ministre de la Défense et des éminentes personnalités qui vous accompagnent.
Votre visite marque les liens puissants d’amitié et de confiance, forgés au long de l’Histoire entre la France et le Liban.
Que les pensées des Libanais se tournent vers l’Europe et elles se portent tout naturellement vers la France. Que Libanais et Français se rencontrent et c’est le cœur qui parle.
Cet attachement particulier du Liban et de son peuple pour la France, tient aux valeurs fondamentales de liberté, d’égalité et de fraternité, que votre grande nation a répandues, qu’elle entretient et soutient à travers le monde.
Le Liban a prouvé son attachement indéfectible aux grandes valeurs humaines que sont la démocratie, les droits de l’Homme et les libertés publiques. Nous n’avons jamais cessé de manifester notre souci de défendre ces valeurs et de les renforcer. Notre engagement pour combattre le terrorisme et toutes les formes de fanatisme, nous l’avons prouvé et nous continuerons à le faire en vue d’assurer à nos jeunes un avenir plein d’espoir.
Aujourd’hui, le Liban, ce pays-message, lieu de rencontre des civilisations et havre du pluralisme, s’engage à se lancer dans le grand chantier de la réforme et de la modernisation de son Etat. La politique du Liban, outre la relance économique, passe aussi et surtout par la réforme des institutions politiques, administratives, sécuritaires, judiciaires et sociales, afin de récupérer sa place et son rôle dans le concert des nations.
Monsieur le Président,
Le Liban est reconnaissant à la France pour avoir mobilisé la communauté internationale et organisé Paris III. Il entend très prochainement, répondre aux attentes de ses partenaires et des institutions financières internationales.
Les moments difficiles et douloureux que nous avons traversés sont derrière nous. L’accord de Doha, où la France a tenu toute sa place, a rfgénéré la stabilité politique tant attendue et souhaitée. Cet accord nous incite à revitaliser le rôle des institutions constitutionnelles.
Et, désormais, c’est au sein de ses institutions et, à travers le dialogue que tout différend politique trouvera solution.
Monsieur le Président,
Pour votre grand projet “Processus de Barcelone: Union pour la Méditerranée”, le Liban vous assure de son plein soutien. Ce grand projet a toutes les chances de réussir, si le Proche et le Moyen-Orient dans leur ensemble, recouvrent la stabilité et retrouvent la paix. Le Liban compte sur votre concours personnel, afin de récupérer ses territoires occupés et de mettre en application le droit au retour des réfugiés palestiniens.
La France sous votre présidence, de par sa place et son rôle dans le monde ne manquera pas, j’en suis convaincu, d’épargner de nouvelles souffrances aux peuples de la région qui aspirent si légitimement à la paix, à la sécurité et à la prospérité.
Je lève mon verre en votre honneur, en l’honneur de votre délégation et à l’éternelle amitié entre la France et le Liban.
Vive la France,
Vive le Liban.

ACCUEIL CHALEUREUX DE LA COLONIE FRANÇAISE
Après Baabda, le président Sarkozy et la délégation française se sont rendus à la résidence des Pins où la colonie française leur a réservé un accueil chaleureux.
“Je vous ai amené toute la France!”, a lancé d’emblée le président Sarkozy, avant de présenter sous un tonnerre d’applaudissements, les membres de la délégation qui l’accompagnaient. Puis, ce fut pour le président un mini bain de foule sous un soleil ardent, où des photos-souvenirs ont été prises et des propos amicaux échangés. Ensuite, M. Sarkozy a contacté, par téléphone, S.Em. le cardinal Sfeir pour s’excuser de n’avoir pu le visiter vu l’exiguïté du temps, pour lui dire toute son estime et promettre de lui rendre visite lors de son prochain voyage à Beyrouth qu’il espère dans le plus bref délai.

photo MM. Hagop Pakradounian, François Hollande, Ghazi Aridi, François Bayrou, Mohamed Khalifé et Elias Skaff.

photo Sur cette table, on reconnaît M. Jean Oghassabian, Mme Christiane Kammermann, sénatrice des Français de l’Etranger, Hassan Sabeh et Sami Haddad.

Le président français a remercié en public les efforts de son ministre des Affaires étrangères, “de son engagement vis-à-vis du Liban”. Il a promis que son Premier ministre, François Fillon viendra deux fois au Liban, en premier pour une aide de la France dans le domaine de l’éducation et une autre dans le domaine d’une aide économique.
Il a, ensuite, fait part de son estime et de son émotion à l’égard de l’Armée libanaise “qui a fait preuve d’unité et de beaucoup de sacrifices, surtout ces derniers temps”.
Ses cinq heures intensives libanaises terminées, le président Sarkozy a regagné l’aéroport de Beyrouth où l’attendaient pour les adieux les présidents Sleiman, Berri et Sanioura.

photo A la Résidence des Pins, le président Sarkozy entouré des membres
de la délégation politique et des Français du Liban.

photo Accolades chaleureuses entre les présidents Sleiman et Sarkozy.

A noter les accolades chaleureuses entre les présidents Sleiman et Sarkozy qui a invité son homologue à participer à la Conférence des pays de la Méditerranée (les 12 et 13 juillet) où, d’ailleurs, se trouvera le président syrien Bachar Assad.
Le président Sarkozy s’est déclaré très satisfait de sa visite libanaise, laquelle a réaffirmé, unanimement et avec force, tout l’engagement de la France vis-à-vis du Liban qu’elle ne lâchera pas. Un baume sur le cœur blessé des Libanais et un bon augure pour un sexennat au cours duquel la réconciliation nationale se réalisera et où le Liban revivra en paix. Vive l’amitié franco-libanaise!

MARIE BTEICHE
Article paru dans "La Revue du Liban" N° 4162 Du 14 Au 21 Juin 2008
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