Chirac, sortie du premier tome de ses Mémoires
sur fond d’affaires judiciaires

Naturellement, la justice doit suivre son cours, mais il arrive qu’avec l’épreuve du temps, elle soit en décalage avec la réalité. Concernant l’ex-président Jacques Chirac, renvoyé devant le tribunal correctionnel dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris, elle ne semble pas répondre aux sentiments des Français. Actuellement, Jacques Chirac, 40 ans de vie politique, 12 ans à l’Elysée, bénéficie d’une cote de popularité de 76%. De fait, c’est l’homme politique le plus populaire de France. D’ailleurs, un récent sondage TNS-Sofres Logica pour Europe 1 révèle que 43% des Français jugent que son renvoi en correctionnelle donne une mauvaise image de la France à l’étranger, tandis que seuls 1,65% d’entre eux jugent bon ce renvoi.

photo Chirac signant son livre à la Foire de Brive-la-Gaillarde.

photo L’ex-président recevant Sarkozy à sa fondation, rue de Lille.

Protégé pendant douze ans (1995-2007) par son immunité de président, Jacques Chirac sera le premier ex-chef d’Etat à être traduit en justice. Maire de Paris de 1977 à 1995, il devra répondre de 21 supposés emplois fictifs entre 1992 et 1995 à la mairie de Paris sur un total de 481 emplois examinés par la justice. Ce renvoi en justice qui a jeté un malaise autant à droite qu’à gauche, ne semble apparemment pas perturber le “premier retraité de France” qui s’adonne dorénavant à sa Fondation pour le développement durable. “J’irai tout naturellement, comme tout citoyen a le devoir de le faire, m’expliquer devant le tribunal et ceci (…) avec sérénité et détermination, car je n’ai rien à me reprocher”, a-t-il déclaré sur Europe 1, ne demandant “ni clémence, ni indulgence (parce que ce serait) tout à fait hors de question et de propos”. Dans une longue interview au Figaro, il a affirmé: “Je souhaite pouvoir établir rapidement la réalité des faits et que cette page soit définitivement tournée. Tranquillement je dirai la vérité, ce que je sais, ce que je pense”.
En attendant, Jacques Chirac a sorti le premier volume de ses Mémoires Chaque pas doit être un but édité chez NiL (maison d’édition où il a déjà publié Une nouvelle France et La France pour tous, ouvrages de sa campagne présidentielle) et dans lequel il raconte sa longue carrière jusqu’à sa victoire à la présidentielle de 1995. Il a signé son ouvrage le week-end dernier à la Foire du livre de Brive-la-Gaillarde en Corrèze et a mesuré de nouveau sa grande popularité. Prochaine étape, une séance de dédicaces à Bordeaux, ville dont son ami l’ex-Premier ministre Alain Juppé est maire.

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L’homme si pudique d’ordinaire, voire secret s’agissant de sa vie privée, se livre sans concessions ni pour lui-même, ni pour les autres. Il évoque pour la première fois la maladie de sa fille Laurence, sujet pénible que son épouse Bernadette avait déjà abordé dans son livre Conversations. De Bernadette, il dit notamment: “Bernadette a son franc-parler et ses opinions peuvent être tranchantes, parfois trop à mon goût, surtout quand elles me concernent (…) Son intuition, sa capacité d’écoute et son sens politique, son expérience de tous les milieux, des plus modestes aux plus fortunés, lui valent souvent d’avoir raison avant tout le monde, y compris moi”.
Guère tendre envers l’ex-président Valéry Giscard d’Estaing dont il fut Premier ministre, Chirac estime qu’il l’a empêché de gouverner et qu’après 1981, “il n’aura plus de cesse, désormais, que de remâcher ses griefs et de me désigner comme le seul coupable de son renvoi de l’Elysée”. Dans son interview au Figaro, il relève qu’“au-delà des problèmes de personnes, c’est sur le fond et les choix de politique gouvernementale que nous nous sommes séparés”.
Paradoxalement, Chirac fait les éloges de François Mitterrand “un homme d’une grande culture et d’une grande intelligence”. Tout naturellement, il se situe “dans le droit fil de la tradition gaulliste”. “Ma ligne directrice, c’est une certaine idée de la France, une certaine idée des Français”.
Quant à ses changements de cap, il les justifie: “Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. On peut changer d’avis quand la situation change”.

Article paru dans "La Revue du Liban" N° 4236 Du 14 Au 21 Novembre 2009
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