Les fêtes de fin d’année s’accompagnent d’une consommation d’alcool sous toutes ses formes: champagne, vin, whisky, bière, vodka, arak, etc. Mais quels sont les effets de l’alcool sur votre santé? A quelle dose est-il bon pour le cœur et pourquoi? Connaissez-vous les seuils à ne pas dépasser?
Dans les années 1990, un phénomène cardio-vasculaire a vu le jour: c’est ce qu’un médecin a appelé le “french paradox”, autrement dit le paradoxe français. C’est le fait que les Français ont beaucoup moins de maladies et de mortalité cardio-vasculaire d’origine coronaire que les Américains. L’explication de ce phénomène a été attribuée au fait que les Français sont des gros consommateurs de vin rouge. De là à penser que l’alcool à dose modérée protège des maladies cardiaques, il n’y a qu’un pas et le chemin était donc grand ouvert pour étudier cette théorie. Les moyens par lesquels l’alcool réduit les maladies cardio-vasculaires seraient les suivants: d’abord, il augmente le HDL ou bon cholestérol, tout en diminuant le LDL ou mauvais cholestérol. Ensuite, il diminue le risque de formation de caillots qui bouchent les artères en diminuant l’agrégation des plaquettes, un peu comme le fait l’aspirine. Il diminue aussi le fibrinogène, un autre élément qui forme le caillot de sang. D’autres études montrent qu’il peut aussi diminuer la tension artérielle et augmenter le flux dans les coronaires.
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Ainsi, de nombreuses études très sérieuses indiquent que prendre un à deux verres d’alcool par jour - vin, bière, liqueur ou spiritueux - diminue le risque de troubles cardio-vasculaires d’au moins 30%. L’effet serait observé à partir de la quarantaine chez les hommes et après la ménopause chez les femmes.
Il est difficile de donner des recommandations en matière d’alcool car si la consommation devient excessive, elle s’accompagne de risques majeurs pour la santé. C’est pourquoi, il faut soit recommander de ne pas boire, soit de le faire avec modération en raison de ses bienfaits pour la santé cardio-vasculaire. Interdire la consommation d’alcool reviendrait à se priver de ce bénéfice potentiel.
Il faut savoir qu’une boisson alcoolisée standard équivaut environ à 12 g d’alcool pur et il y a donc autant d’alcool dans une coupe de champagne que dans un verre de vin, une canette de bière, un shot de vodka ou un verre de whisky on the rocks. Il est important de standardiser les boissons pour pouvoir les comparer et tirer des conclusions scientifiques, d’autant plus que plusieurs personnes consomment différentes variétés et non pas un seul alcool.
La “recette” du champagne, créée par le moine Dom Pérignon date du XVIIe siècle. Elle consiste en une première fermentation de raisins noirs et blancs, suivie d’un ajout de sucre et de levures avant la deuxième fermentation, au cours de laquelle se forment les fameuses bulles. Une coupe de champagne apporte environ 10 à 12 g d’alcool, soit autant qu’un verre de vin. Comme celle de toute boisson alcoolisée, la consommation du champagne doit donc être modérée…
Les données scientifiques
Un très grand nombre d’études observationnelles dont une large douzaine prospectives (étude au cours de laquelle on suit les personnes dès le premier jour et non pas a posteriori) ont montré de manière assez constante les mêmes conclusions, à savoir que la consommation d’alcool diminue la mortalité. Cela se voit chez les hommes et les femmes d’âge moyen (la cinquantaine) et plus et le taux de mortalité est le plus bas chez ceux qui prennent un à deux verres d’alcool par jour. La baisse est de 30 à 50%! Elle est surtout liée à une diminution de la maladie coronaire et notamment de l’infarctus chez les femmes. L’argument selon lequel des personnes qui ont déjà une maladie cardiaque arrêtent de boire ce qui fausse les résultats a déjà été examiné et éliminé. Une étude réalisée sur 18.455 hommes suivis pendant 7 ans a montré qu’en augmentant légèrement la consommation d’alcool chez eux, on obtenait une baisse significative de la maladie coronaire. Des résultats de ce type viennent réfuter l’argument selon lequel ce n’est pas l’alcool en lui-même qui réduit le risque.
Quel type d’alcool est le meilleur pour le cœur?
La question a fait l’objet de beaucoup de spéculations. Il est en fait difficile de différencier entre les types d’alcools et les conclusions actuelles sont qu’ils sont tous associés avec une diminution du risque de maladie coronaire. Certaines études suggèrent que le vin rouge serait plus favorable mais il n’existe pas de certitude scientifique, bien que la tendance soit hautement probable.
Gare aux excès!
Par contre, dès que la consommation dépasse 3 verres par jour, la mortalité grimpe rapidement. Les causes en sont alors l’accident vasculaire cérébral lié à l’hypertension artérielle, la cardiomyopathie alcoolique (le muscle cardiaque devient gros et se contracte mal), différents types de cancer, la cirrhose du foie, la pancréatite, ainsi que la violence qui conduit aux accidents, aux suicides et aux homicides.
L’alcool n’est pas un produit ordinaire. Il serait responsable de plus de 23.000 décès directs et associé à 45.000 morts par an en France et 5 millions de personnes auraient des difficultés médicales, psychologiques et/ou sociales en rapport à l’alcool.
En Europe, le trio de tête des consommateurs d’alcool revient aux Italiens, aux Portugais et aux Français. La quatrième place est occupée par les Suisses.
La consommation à risque est définie selon les critères suivants:
Hommes < 65 ans: > 14 verres par semaine ou > 4 verres par occasion.
Femmes et hommes > 65 ans: > 7 verres par semaine ou > 3 verres par occasion.
Aux Etats-Unis, on estime que 100.000 décès sont attribuables tous les ans à l’alcool. Mais d’un autre côté, si tous les consommateurs d’alcool s’arrêtent de boire, il y aurait 80.000 décès supplémentaires environ, ce qui montre la complexité du problème. L’alcool en excès tue les moins de 45 ans alors qu’avec modération, il sauve les plus de 45 ans des complications de la maladie coronaire.
On peut cependant vous donner les recommandations suivantes:
1 Consulter son médecin pour une évaluation des risques et des avantages potentiels concernant votre cas particulier. Bien entendu, les personnes ayant des antécédents d’alcoolisme, d’hypertriglycéridémie importante, de pancréatite, de maladie du foie ou de certaines anomalies du sang, d’insuffisance cardiaque, d’hypertension sévère mal contrôlée, ainsi que les femmes enceintes ou ceux qui prennent des médicaments qui interagissent avec l’alcool devraient s’abstenir de boire.
2 En l’absence de ces contre-indications, une consommation de un à deux verres maximum par jour est considérée comme non dangereuse.
3 Ne pas oublier qu’il ne faut pas boire et conduire, en particulier les gros camions de transport ou tout véhicule à moteur.
4 Il faut régulièrement faire le point sur la consommation d’alcool au cours d’une visite médicale de contrôle. En cas de dérive vers une consommation excessive, les recommandations seront modifiées et les précautions prises.
5 Des mesures particulières doivent être prises chez les adolescents et les jeunes adultes qui ne doivent pas consommer d’alcool. Une information ciblée dans leur direction doit être disponible et encouragée.
Bonne année! Bonne santé!
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