Deux événements dominaient la scène politique au début de la semaine: la visite mercredi du président Nabih Berri à Damas et le Conseil des ministres le même jour qui devait reprendre le débat autour du dossier des faux témoins. Cependant, un compromis en ce qui concerne le second dossier paraissait difficile. Aussi, s’attendait-on à un nouveau report de ce dossier, dans l’espoir que le chef du Législatif ramènera quelque projet de solution à son retour de Damas. Des résultats des délibérations ministérielles, on pouvait se prononcer sur le degré de réussite du sommet syro-saoudien.

Sleiman fixe au 4 novembre le nouveau round du dialogue national.
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Une chose est certaine: les ministres du 8 mars restent sur leur position et vont continuer à réclamer de saisir la Cour de justice dudit dossier, alors que les forces du 14 mars persistent à soutenir que cette instance n’est nullement habilitée à juger en la matière. Quoi qu’il en soit, le vote paraissait exclu et la réunion était censée se dérouler dans le calme car les membres du gouvernement sont supposés se pencher sur tant de questions qui intéressent les citoyens dans leur vie quotidienne.
Entre-temps, le président Saad Hariri a reçu mardi M. Hussein Khalil, conseiller politique de sayyed Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah, pour la première fois depuis plusieurs semaines. Toujours est-il que le chef du gouvernement paraît déterminé à ne pas dévier de ses quatre constantes: non à l’annulation du Tribunal spécial pour le Liban; non aux ingérences dans l’acte d’accusation, non au changement de Cabinet, non à la discorde, le dialogue devant prévaloir dans les circonstances présentes.
Sur le plan international, la tendance est réaffirmée sur le point ci-après: la sécurité au Liban est une ligne rouge qu’aucune partie n’a le droit de perturber.
A cette occasion, il y a lieu de faire état de la reconstitution en Gironde, en France, de l’attentat du 14 février 2005, ce qui porte à penser que l’acte d’accusation dans l’affaire Hariri n’est plus très éloigné...
De Washington, Mme Hillary Clinton, chef du département d’Etat, a communiqué, téléphoniquement avec le président Michel Sleiman; pour le rassurer sur le fait que “les tentatives visant à affaiblir la mission du TSL ne doivent pas être tolérées”. De plus, elle a réaffirmé l’attachement des Etats-Unis à la souveraineté, à l’indépendance et à la stabilité du Liban”.

Rencontre Bachar Assad - Nabih Berri.
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BERRI À DAMAS
Pour en revenir à la visite du président Berri à Damas, on apprend que le chef du Législatif avait reçu la veille à Aïn el-Tineh l’ambassadeur d’Arabie saoudite, M. Ali Awad Assiri, avec lequel il a échangé les vues sur les dossiers litigieux qui menacent la stabilité politique au Liban.
M. Berri a également, conféré avec M. Ibrahim Najjar, ministre de la Justice, à propos du rapport qu’il a élaboré sur les faux témoins. Et ce, avant d’échanger les vues à ce sujet avec M. Walid Joumblatt.
Les deux hommes s’emploient à rapprocher les positions des parties en litige à propos du dossier des faux témoins, considéré comme un problème conflictuel qui pourrait s’étendre à d’autres pays arabes!
A cet effet, le président de la Chambre et le leader du PSP se préoccupent de dissiper les sujets qui perturbent l’atmosphère intérieure. Aussi, visent-ils à hâter la visite que le président Saad Hariri a promis au président Ahmadinajed d’effectuer en Iran. Celle-ci devrait intervenir avant la fin de l’année.
En ce qui a trait au sommet libano-syrien, il a été décidé au terme de contacts effectués entre Baabda et Damas, de le reporter jusqu’après le sommet francophone de Montreux, en Suisse (du 22 au 24 octobre). De ce fait, le sommet bipartite serait fixé au début du mois prochain.
Aoun revient à la charge: le TSL, illégal.
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Joumblatt: l’axe syro-saoudite garant de notre stabilité.
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Gemayel: pas de transaction sur le tribunal international.
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LE HEZBOLLAH JETTE DU LEST
Cela dit, on constate que le Hezbollah jette du lest pour faciliter le règlement des conflits. Ainsi, deux de ses membres: Mohamed Raad et Mohamed Fneich ont changé de ton, affirmant que le dossier des faux témoins ne doit pas faire l’objet d’un sujet conflictuel, disant que si le sujet avait été traité d’une manière pondérée, il n’aurait pas suscité tant de remous.
“Des dossiers beaucoup moins importants, ont-ils observé, ont été réglés sans tracas, alors qu’ils présentaient des aspects beaucoup plus complexes que les faux témoins”.
De son côté, M. Raad a déclaré à l’issue d’un entretien avec le président Omar Karamé: “Toutes les parties sont acquises à un dialogue franc à propos des questions conflcituelles pour parvenir à des résultats positifs à leur sujet”. le président Karamé a, quant à lui renchéri: “Le dossier des faux témoins est très important et fondamental parce qu’il concerne la sécurité de la nation. Il faut donc le trancher par le dialogue et non par un autre moyen”.
Quant à M. Mahmoud Comaty, membre du bureau politique du Hezbollah, il pévoit une rencontre prochaine entere le président Saad Hariri et sayyed Hassan Nasrallah.
Sur le plan parlementaire, le président Nabih Berri a convoqué l’Assemblée à une réunion qui a été consacrée au renouvellement du bureau de la Chambre et des commissions parlementaires, sans que beaucoup de changement soit apporté à leur constitution.
AOUN: LE TSL, ILLÉGAL
Pour ne pas déroger à la coutume, le général Michel Aoun comme à son habitude a pris à partie la façon dont sont gérées les finances publiques depuis 1993 et a demandé à interroger les ministres des Finances qui se sont succédé à la tête de ce département ministériel pour leur réclamer des comptes.
Du TSL, le chef du CPL a dit qu’il était illégal, “parce qu’il n’a pas été soumis pour approbation aux institutions constitutionnelles. De plus, il a jugé d’étrange l’appui de l’Administration américaine au tribunal international et son refus de coopérer avec les enquêteurs du TSL. “Près de dix Etats membres de l’ONU refusent de fournir des détails sur les renseignements dont ils disposent, alors que d’autres protègent les faux témoins”.
Par ailleurs, le Courant du futur a réitéré sa position envers le dossier des faux témoins à l’issue de sa réunion hebdomadaires, tenue sous le présidence de M. Fouad Sanioura, estimant qu’il sera possible après la parution de l’acte d’accusation par le TSL, de se faire une idée des charges portées contre ces témoins et d’identifier les personnes qui les ont mobilisés pour engager l’enquête sur de mauvaises pistes.
Le communiqué publié à cette occasion, se félicite de l’attitude adoptée par les chefs de l’Etat et du gouvernement, après la visite du président Ahmadinejad, quant aux critères sur base desquelles doivent être établies les relations entre le Liban et la République islamique, sans perdre de vue l’attachement du Liban à l’application de la résolution 1701.
De même, le Courant du futur a jugé sage et positive l’attitude du président du Conseil quant au principe sur lequel le Liban doit asseoir ses relations avec les Etats étrangers, les organisations régionales et internationales sur base de l’action arabe commune.
De son côté, le Dr Samir Geagea, chef des Forces libanaises, s’est prononcé sur le sommet saoudo-syrien, disant qu’il n’a abouti à rien de concret en ce qui concerne le Liban.
Joumblatt: “L’axe syro-saoudite garant de notre stabilité”
En ce qui a trait au sommet syro-saoudite et alors que le Dr Samir Geagea juge qu’il n’a débouché sur aucun résultat concret, M. Walid Joumblatt soutient que “l’axe syro-saoudite se répercute, positivement, sur la stabilité dans notre pays”, qualifiant de “très réussie la visite du président iranien Mahmoud Ahmadinejad”, appelant au calme et au dialogue pour franchir cette étape délicate.
Au cours d’une tournée dans les villages du haut Metn et d’Aley, le leader du Parti socialiste progressiste a dit: “Oui au Tribunal international, mais non à un acte d’accusation piégé pour amorcer la sédition... Aujourd’hui, nous comptons beaucoup sur la rencontre à Riyad du roi Abdallah et du président Bachar Assad, parce qu’elle peut contribuer à rétablir le calme dans nos murs”.
Quant au général Jamil Sayyed, il a déclaré que le dossier des faux témoins est celui d’une affaire morale et non confessionnelle, l’enquête du TSL étant restreinte à deux sujets: la Syrie et le Hezbollah... “L’entente au Liban est un leurre, car il existe une partie qui considère l’intérêt du pays dans la modération des Arabes et une autre qui voit l’intérêt du Liban dans la résistance jusqu’à l’instauration de la paix”.
Il estime que les juges désignés auprès du TSL par le gouvernement Sanioura devraient être démis de leurs charges. Et ajoute-t-il: “Du moment que le tribunal international pour le Liban est constitué de la même manière, il peut réitérer les erreurs commises par le premier procureur général, Mehlis.” Aussi, a-t-il réaffirmé sa détermination à réclamer la destitution de M. Ralph Riachi.
Abadi chez Lahoud
D’autre part, M. Ghazanfar Asl Roknabadi, ambassadeur d’Iran, qui a rendu visite au président Emile Lahoud, a déclaré à l’issue de l’entretien qu’il avait évoqué la question de la fourniture aux forces armées libanaises d’équipements par la République islamique. Il a ajouté que toutes les parties qu’il a rencontrées après la visite du président iranien, sont acquises à la nécessité de faire régner l’entente et la stabilité en terre libanaise.
De plus, il a qualifié les relations saoudo-iraniennes d’excellentes. “Avant de venir à Beyrouth, a-t-il poursuivi, le président Ahmadinejad a eu un entretien téléphonique avec le roi Abdallah et a échangé les vues sur les derniers développements de la conjoncture régionale spécialement sur la scène libanaise et ces contacts seront poursuivis”.
Interrogé sur le point de savoir si le président Hariri avait demandé au président iranien d’intervenir à propos du TSL et de l’acte d’accusation, le chef de la mission diplomatique iranienne a répondu: “Ce qui est important, c’est que le climat de la rencontre était excellent. Le président Ahmadinejad a promis de traiter tous les sujets conflictuels entre les Libanais par la logique et la rationalité”, tout en révélant que le président Hariri se rendra prochainement en visite officielle à Téhéran.
Le président Emile Lahoud a qualifié “d’historique” la visite du chef de l’Etat iranien et contribuera à renforcer la position du Liban.
Gemayel: “Pas de transaction
sur le TSL”
Quant au président Amine Gemayel qui a eu un entretien téléphonique avec M. Jeffrey Feltman, il a déclaré: “J’ai obtenu la certitude du responsable américain qu’aucune transaction ne se fera autour du TSL et la parution de l’acte d’accusation n’est plus très éloignée.
“M. Feltman a réaffirmé la détermination des Etats-Unis de soutenir les institutions étatiques libanaises, l’Armée en tête et les FSI et de consolider la stabilité du Liban”.
Par ailleurs, les Kataëb ont pris l’heureuse initiative d’organiser cette semaine un congrès “pour repenser le travail municipal” au palais de Dbayeh. Ces assises sont les bienvenues à une époque où le problème de l’environnement a besoin de beaucoup de soins pour l’engager sur la bonne voie. D’autant que le pays est en train de perdre, progressivement, sa verdure. En effet, le béton est en train de supplanter la végétation et celle-ci est décimée par les incendies qui se déclarent partout durant la saison chaude.
Le ministre de l’Intérieur a abordé le sujet de la décentralisation, rappelant que “le sujet des municipalités est l’unique forme de décentralisation qui nous pousse à son élargissement”.
De plus, il a fait état de ses multiples tentatives de faire passer une loi sur la décentralisation qui a bénéficié, pourtant, d’un consensus. Aussi, a-t-il impliqué les partis qui ont une vision claire à ce sujet.
Le ministre des Affaires sociales est revenu sur la relation étroite qu’entretiennent les municipalités avec leur ministère, en raison de la présence de centres sociaux dans les zones rurales. Il a, également, souhaité l’implication des partis.
Le ministre de l’Environnement a révélé avoir obtenu l’approbation du Conseil de la fonction publique pour ouvrir des bureaux dans la région, afin de faciliter la coopération des habitants avec ce département qui avait initié maints projets avec les municipalités sur le reboisement en vue de contrer l’avancée du béton.
Ce congrès des Kataëb mérite d’être soutenu et encouragé, d’autant que la déforestation gagne du terrain, à tel point que le pays risque de devenir désertique, au moment où les Etats du Golfe arborisent et fleurissent les superficies arides.
Pour en revenir à la visite du président Ahmadinejad, le président Hariri l’a qualifiée de positive et franche, disant que le président iranien l’a invité à Téhéran à une date qui reste à fixer.
Cependant, il a nié que le chef de l’Etat iranien ait soumis une initiative politique, se contentant de conseiller d’opter sur le dialogue pour régler les conflits. Tout en insistant sur l’importance de la stabilité des relations arabo-iraniennes, seul Israël bénéficiant de leur tension.
ARIDY À Bnechay
Par ailleurs, en recevant M. Ghazi Aridy, ministre des Travaux publics, M. Sleiman Frangié, chef des Marada et député de Zghorta, s’est prononcé en faveur du dialogue pour sortir de la crise actuelle. Il a dit encore que le président iranien insiste sur la nécessité de sauvegarder l’unité du Liban et de soutenir la Résistance.
De son côté, M. Aridy a jugé inadéquat tout le tapage entretenu autour de la visite de M. Ahmadinejad, rappelant que le Liban est le pays des compromis. De plus, il s’est réjoui du fait que les portes restent ouvertes et que les efforts saoudo-syriens persistent, en insistant sur l’action que doivent entreprendre les forces intérieures libanaises.
Mme Catherine Ashton, représentante de l’Union européenne pour la politique extérieure, a souhaité ne pas voir des émissaires étrangers interférer dans la politique libanaise et proposer des idées ou prendre des initiatives susceptibles de perturber la stabilité du pays. “L’Union européenne respecte l’indépendance du Liban et sa souveraineté et partant de là, son droit de recevoir les personnalités qu’il désire”, en allusion de la visite du président de la République islamique.
Par ailleurs, le bureau médiatique de la présidence de la République a fait paraître un communiqué annonçant que la conférence nationale du dialogue tiendra son prochain round le 4 novembre 2010 à 11 heures au palais de Baabda.
Au lendemain de la visite du président iranien, des rumeurs ont été propagées faisant état d’éventuels pactes régionaux pouvant avoir des répercussions sur la scène libanaise notamment le pacte syro-irano-turc devant coopérer avec le bloc arabe et du Golfe, en plus de l’Arabie saoudite et de la Jordanie.
Cette tendance est à l’origine de la visite express de M. Jeffrey Feltman, qui a entrepris une tournée dans la région dès le départ du président Ahmadinejad. |