La tempête qui s’est abattue sur le Liban cette semaine, a, comme à l’accoutumée, pris le pays en otage. apportant des scènes de désastre dans les différentes régions du pays: routes bouchées et noyées, maisons inondées, plantations abîmées et neige sur les cimes... Des scènes difficiles à croire, alors qu’il y a à peine une semaine, le pays brûlait et que les citoyens attendaient les premières pluies d’un hiver qui n’arrivait pas.

Des vagues de plus de dix mètres ont frappé le littoral.
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Heureux de voir les premières rafales mettre fin à une longue période de sécheresse, les Libanais ont vite déchanté en raison de l’ampleur des dégâts que les intempéries ont provoqués sur l’ensemble du territoire. En effet, bien que la tempête a ramené la pluviométrie de cette année à la moyenne de l’année précédente et que les chutes de neige ont été favorablement accueillies tant par les montagnards que les stations de ski, il n’empêche que les vents puissants, vagues et précipitations diluviennes ont causé d’énormes ravages matériels, sachant qu’à Tripoli, une femme de 45 ans est décédée, samedi soir, lorsqu’un palmier déraciné s’est abattu sur sa voiture, alors qu’elle circulait sur l’autoroute principale. Par ailleurs, si jusqu’à présent, il est toujours impossible de chiffrer les pertes enregistrées, il n’y a aucun doute quant au fait que ce sont les pêcheurs et les agriculteurs qui ont payé un lourd tribut. En effet, du port de Abdé au Nord en passant par Tripoli, Kfarabida à Batroun, le port de Jbeil, de Maameltein, de Dbayeh, celui de Dalié à Beyrouth jusqu’à Jiyeh, Saïda et Naqoura, c’est tout le littoral qui a ployé sous l’emprise de vents forts d’une vitesse de 100 km/h, alors que des vagues d’environ 10 mètres s’écrasaient contre les côtes, détachaient les barques amarrées aux ports et détruisaient une grande partie des maisons, stations balnéaires et plages sur leur passage.
A Jbeil, les pêcheurs ont lutté contre vents et marées, pour maintenir leurs bateaux amarrés à l’heure où les propriétaires et le personnel des restaurants du bord de mer tentaient de récupérer tables et chaises sur les terrasses inondées.
A Dbayeh, une vingtaine de barques ont été soit noyées, soit détruites, alors qu’au port de Dalié à Raouché, 80 bateaux de pêche se sont échoués.
Saïda a été, elle, dévastée par la tempête. Le mur du port de la ville s’est effondré à cause de la force des vagues et la vitesse des vents. Du coup, l’autoroute maritime ouest de la cité a été bloquée. Pire, la montagne de détritus et déchets dont une partie s’est déversée dans l’eau, a envahi l’autoroute inaugurant une nouvelle catastrophe écologique.

Des panneaux publicitaires renversés à Jnah.
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A Tyr, les vagues ont ravagé environ 30 habitations du camp de Jal el-Bahr. Du côté des agriculteurs, c’est une vraie catastrophe d’autant que ces derniers comptaient sur les prochaines récoltes pour joindre les deux bouts. Les eaux ont dévasté les serres et les fermes détruisant les plantations et tuant le bétail.
Sur le littoral notamment à Jiyeh et les régions sudistes, les orangeraies et bananeraies, inondées, ont cruellement souffert, les vents forts ont non seulement arraché les serres en plastique, mais déraciné les bananiers.
Idem dans la Békaa, notamment à Zahlé, à Ablah et ses environs où des milliers de dounoms de vignobles ont ployé sous la neige, alors que les champs agricoles ont été complètement inondés par les eaux. Selon les experts, les agriculteurs ne peuvent pour l’instant mesurer l’ampleur des pertes. Ils doivent, en effet, patienter encore quinze jours pour que la terre s’assèche avant d’inspecter leurs récoltes.
Cela dit, à l’Aéroport international de Beyrouth (AIB) où l’activité s’est poursuivie en dépit des mauvaises conditions météorologiques, quatre avions d’entraînements de type Cessna appartenant à une association de pilotage privée, ont été détruits au deuxième jour de la tempête, en raison de vents forts de 120 km/h. Des conteneurs servant au transport des bagages ont été également ballotés par les vents, alors que le parking où les panneaux publicitaires ont été arrachés, a été fermé au public. Si plusieurs départs avaient été retardés ou suspendus, seul un avion en provenance du Koweït a dû être détourné vers Damas.
Au niveau de la vie quotidienne, la puissante tempête de cette semaine a, une fois de plus, braqué les feux sur la précarité des mesures prises pour faire face à la saison froide et le peu de sérieux, sinon la légèreté avec laquelle les dirigeants traitent les dossiers liés au quotidien et au bien-être socio-économique des citoyens. D’ailleurs, les derniers jours que viennent de vivre les Libanais n’ont rien apporté de nouveau au regard de beaucoup d’entre eux, excepté un surplus de dettes et de nouvelles sommes à débourser pour réparer les dégâts.
Comme chaque année, les mêmes scènes se sont répétées dans les différentes régions du pays avec des gens sinistrés qui essaient de vider l’eau de leur habitation ou magasin, des routes noyées par les pluies, des canalisations bouchées, des conducteurs qui s’évertuent à réparer les dégâts causés à leurs véhicules, ou encore des murs qui s’écroulent, des routes transformées en marées.

La neige a recouvert
de son manteau blanc les montagnes libanaises.
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Ainsi, à Dora, l’autoroute (reliant la Quarantaine à Baabda), s’est transformée en un lac. De nombreuses voitures se sont noyées ou abîmées dans les grandes flaques d’eau qui se sont formées à cause de la saturation des conduites d’eau.
Idem à Jisr el-Bacha où le pont enjambant le fleuve de Beyrouth a été recouvert d’eau. D’une pluie à une autre, ce sinistre tableau se renouvelle avec en prime cette année, des arbres déracinés un peu partout et des affiches publicitaires abîmées le long des autoroutes et des poteaux courbés.
A Beyrouth comme dans toutes les régions, notamment le long de l’autoroute reliant Khaldé à Rmeilé, plusieurs poteaux et panneaux se sont renversés sur les voitures stationnées dans les rues. A Achrafieh, place Sassine, le relais de la centrale s’est renversé. Et comme un malheur n’arrive jamais seul, les orages et les éclairs ont apporté leur lot de dommage sausant, dans plusieurs régions, la coupure du courant électrique, ainsi que le réseau de téléphonie mobile et Internet, notamment au Chouf où plusieurs villes et villages ont été privés de courant du fait de la coupure de la ligne haute tension entre Beiteddine, Deir el-Qamar et al-Manassef.
Cela dit, les chutes de neige ont paralysé les régions montagnardes et les hauteurs. Plusieurs routes ont été bloquées par la neige dont l’autoroute principale du Chouf et de Dahr el-Baïdar où la circulation a été interdite aux véhicules non équipés de chaînes. Mobilisés, les éléments de la Défense civile se sont activés à déblayer la neige et à ouvrir les routes.
Au Akkar, la neige a recouvert les collines de la région de Kamoua, à 2.400 mètres d’altitude, pour la première fois cette année et toutes les routes qui mènent au Hermel ont été bloquées.
Plusieurs villages du Sud ont été complètement isolés à cause des neiges, comme les fermes de Chebaa, Chouaya, les hauteurs de Kfarchouba, Kfarhamam et Rachaya el-Fakhar.
Rappelons que le chef de l’Etat a donné ses directives aux responsables concernés, leur demandant de rester en état d’alerte et d’aider les citoyens, quel que soit le problème posé par les conditions météorologiques.
TOUT LE M.-O. FRAPPÉ
Noyé sous les eaux, avec un taux de précipitations avoisinant les 200 millimètres à Beyrouth, selon le service météorologique de l’AIB, le Liban n’est pas le seul pays à avoir souffert des intempéries. En effet, la vague de froid, en provenance de l’Europe, a frappé toute la région du Moyen-Orient. La neige a ainsi paralysé l’activité à Damas et ses environs, alors qu’une tempête remarquablement puissante a balayé la région côtière de Tartous, dont le port et la raffinerie ont été fermés durant deux jours.
Idem aux territoires occupés où les intempéries ont causé d’énormes dégâts. Des vagues de plus de 8 mètres ont frappé le littoral de la région de Safad et de Gaza, alors que les températures ont chuté. Selon les autorités israéliennes, un navire s’est échoué au large des côtes israéliennes en raison de la tempête. Cependant, son équipe composée de 11 personnes, a été sauvée de justesse.
En Jordanie, deux navires transportant 850 passagers, alors qu’un avion a dû être détourné vers Damas, en raison des vents violents.
En Egypte, des vents violents conjugués à des tempêtes de sable, ont perturbé le transport aérien, ainsi que l’activité maritime dans le canal Suez et poussé à fermer les ports égyptiens. 26 navires en provenance de la Méditerranée et 29 autres venant de la Mer Rouge, ont dû patienter environ trois heures avant de pouvoir pénétrer dans le canal. |