Élaboration en cours de la déclaration ministérielle
Le Cabinet obtiendrait 66 à 68 voix
Par Nadim El-HACHEM

Après la formation du Cabinet, au terme de près de cinq mois de concertations, l’intérêt se porte sur la déclaration ministérielle qu’élaborera la commission constituée, mercredi au cours de la première séance du Conseil des ministres, précédée de la photo traditionnelle. Dans le même temps, un climat d’apaisement a plané sur l’hémicyle où la séance plénière convoquée par le chef du Législatif a été annulée, le dossier relatif à la reconduction du mandat du gouverneur de la Banque du Liban, M. Riad Salamé ayant été pris en charge par le nouveau Cabinet. Sur le plan du vote de confiance, on sait, déjà, que les députés du 14 mars, ne l’accorderont pas - ils en ont confirmé la décision la veille - au cours d’une réunion extraordinaire, partant du fait “qu’il s’agit d’un gouvernement monochrome et de confrontation”.

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Sleiman: la Syrie n’est pas intervenue dans la formation du Cabinet.

Le président de la République a ouvert le Conseil des ministres. Après avoir félicité les nouveaux ministres, le chef de l’Etat, leur a donné ses directives pour l’étape future. En souhaitant que “le Cabinet constitue une équipe de travail solidaire et homogène, à l’effet de traiter tous les problèmes intéressant les citoyens dans leur vie quotidienne”. Le président Najib Mikati a, également, prononcé un mot de circonstance, inspiré de celui de la veille où il avait exposé son programme de travail. L’attention est donc actuellement retenue par la déclaration ministérielle qui sera élaborée par des ministres proches du président du Conseil, à qui M. Mikati a fait part de son souhait que “cette déclaration soit mise au point le plus rapidement possible”. Par ailleurs, le cas de l’émir Talal Arslan n’a pas encore été tranché, le président de la République et le chef du gouvernement s’employant à lui trouver une solution, aidés par le général Michel Aoun. La déclaration ministérielle devra être mise au point d’ici à quinze jours au plus tard, afin que le gouvernement puisse se présenter à la Chambre pour le vote de confiance. Selon les premiers pronostics, le Cabinet Mikati obtiendrait 66 à 68 voix, si l’émir Arslan n’aura pas réintégré le Cabinet.
Sur un autre plan, le général Michel Aoun, en présidant la réunion des ministres du CPL, a remercié le président Nabih Berri “pour avoir renoncé à un portefeuille afin de faciliter la tâche du président Mikati”. Puis, s’adressant aux membres du gouvernement, il leur a tenu ce langage: “Vous devez assumer une lourde responsabilité portant sur vingt-et-un ans au moins d’un pouvoir qui s’est signalé par un chaos dans tous les domaines. Votre action ne sera pas facile, car nous traitons, une sorte de déviationnisme dans la pratique de l’autorité, toléré par les Libanais qui admettent la corruption et en tirent profit.”
Puis, le général Aoun a répliqué au président Amine Gemayel et au Dr Samir Geagea qui ont critiqué la nouvelle équipe gouvernementale et a pris à partie les Américains “qui défendent des gens du précédent régime ayant accompli des infractions”. De plus, le chef du CPL s’est engagé à poursuivre l’étude du dossier financier: “Nous avons entendu dire qu’après la constitution du nouveau gouvernement, la ministre des Finances quittera le ministère et on ne parlera plus des sujets objet d’enquête. Cela ne se passera pas ainsi; nous poursuivrons les anciens et les nouveaux dossiers et veillerons à ce que les erreurs ne se réitèrent pas”. Le chef du CPL a proclamé, d’autre part, son respect de la légalité internationale. “Nous sommes soucieux de nous en tenir à cette légalité et aux résolutions internationales. En ce qui concerne le Tribunal spécial pour le Liban, nous n’avons pas l’intention d’affronter le Tribunal international, car nous sommes avec la justice”.

GEMAYEL: UN CABINET MONOCHROME
De son côté, le président Amine Gemayel a dit: “Un gouvernement monochrome, ne peut résoudre les crises dans lesquelles le Liban se débat et celles qui le menacent à l’avenir... Il est donc nécessaire que le pays s’attache au Tribunal spécial et aux résolutions internationales, notamment la 1701”.
Dans une interview télévisée, il aurait souhaité que “la Syrie n’intervienne pas dans la formation du gouvernement”, disant “qu’elle en tirera profit pour consolider sa scène intérieure... Le parti Kataëb aura une prise de position claire à ce sujet, en coordination avec ses alliés”.

LE GOUVERNEMENT DU HEZB ET DE LA REVANCHE...
Quant au Courant du futur, il a diffusé un communiqué à l’issue de sa réunion hebdomadaire, où il est dit: “Le gouvernement du président Najib Mikati est celui du 8 mars et du Hezbollah, celui de la revanche”.
“La position centriste a été sciemment éliminée pour faire apparaître le nouveau gouvernement en tant qu’entité politique monochrome”.
Le Courant du futur a dit encore qu’il adoptera une position d’opposition démocratique saine et responsable, afin de protéger le Liban, sa Constitution et ses citoyens. De plus, il a mis en garde le nouveau Cabinet contre toute pratique revancharde, se disant prêt à tenir tête à toute tentative de transformer l’Administration en cellules partisanes pour servir des desseins déterminés... “Les expériences du passé sont une preuve de cette tendance” et a demandé aux autorités d’adopter une position franche envers les résolutions internationales et les engagements du Liban envers le TSL et la résolution 1701.
M. Ali Abdel-Karim Ali, ambassadeur de Syrie, à l’issue d’une visite au président Emile Lahoud, s’est réjoui de la formation du nouveau gouvernement, considérant que “l’immunité du Liban concerne également la Syrie”.
Interrogé sur le point de savoir si le Cabinet a été constitué à la demande du président Bachar Assad, M. Ali a répondu: “Je crois que la formation du Cabinet répond à une demande libanaise, en tout premier lieu et répond à un besoin des Libanais. Cependant, ce besoin est lié, fraternellement, à celui de la Syrie et par le fait même, tout ce qui intéresse le Liban se répercute positivement, sur la Syrie... Si le Liban est fort et stable, cela sert l’intérêt syrien”.
De la situation en Syrie, M. Ali assure que son pays “s’oriente vers le règlement de sa crise, dont les lignes extérieures ne cessent de s’éclaircir chaque jour davantage”. Enfin, cheikh Ahmed Kabalan, mufti jaafarite, a rendu hommage au président Nabih Berri, pour son initiative qui a facilité la tâche du chef du gouvernement, en cédant un portefeuille revenant à la communauté chiite à un candidat sunnite.
“Le président Berri a prouvé, une fois de plus, qu’il œuvre en faveur du Liban et de ses intérêts supérieurs qu’il place au-dessus de toutes les considérations. “Les Libanais devraient suivre son exemple, surtout dans les temps d’épreuves et l’inscrire en tête de la politique nationale”.
Puis, cheikh Kabalan a formulé des vœux de succès à la nouvelle équipe gouvernementale, espérant “qu’elle parviendra à assumer les responsabilités au double plan intérieur et extérieur. Et ce, en s’acquittant de ses charges et en se signalant davantage par l’action que par les paroles, ce qui redonnera confiance aux Libanais dans leur pays et son avenir, tout en leur permettant de relever les défis auxquels ils sont confrontés”.
Parmi les réactions étrangères, signalons celle d’un porte-parole de l’Administration américaine qui n’a pas voulu révéler son nom et a qualifié le Cabinet Mikati de “décevant, parce qu’il est placé sous la coupe du Hezbollah”.
De plus, des voix se font entendre au Capitole, réclamant la suspension des aides fournies au Liban dans les divers domaines, y compris l’Armée.

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