Au Conseil de sécurité
Sleiman et Mikati s’engagent à respecter les résolutions
de l’ONU dont celle relative au financement du TSL
Par Nadim El-HACHEM

Cette semaine a été marquée par le sommet spirituel islamo-chrétien qui s’est tenu à Dar el-Fatwa. Le chef du gouvernement, Najib Mikati a succédé au président Michel Sleiman au Palais de Verre à New York, alors que S.B. Mgr Béchara Raï, patriarche maronite poursuivait ses tournées pastorales au Liban-Sud, où il a été l’hôte à déjeuner à Msaileh du président Nabih Berri, en même temps que le chef de l’Etat et de nombreuses personnalités sudistes.

Fait à signaler: alors que les Forces libanaises accueillaient au complexe Fouad Chéhab, à Jounieh, S.Em. le cardinal Nasrallah Sfeir qui présidait la messe annuelle à l’intention de leurs martyrs, le Hezbollah et Amal réservaient un accueil chaleureux au patriarche Raï au Sud.
Avant de présider la réunion du Conseil de sécurité, le Liban en étant le président durant le mois de septembre, le Premier ministre a eu un entretien avec M. Ban Ki-moon, secrétaire général de l’ONU, avant de conférer avec les ministres des Affaires étrangères des Etats-Unis, de la Russie et de la Chine.
A propos du Tribunal spécial pour le Liban, le président du Conseil a réitéré son respect des résolutions internationales, celle relative au TSL en tête. Il a déclaré que le Liban soumettra aux Nations unies, les cartes nécessaires à la délimitation de la zone maritime dont il réclamera la prospection par les forces de l’ONU.
De plus, M. Mikati s’est entretenu avec M. Mahmoud Jibril, président du CNT libyen et la délégation de “Task Force for Lebanon”.
De son côté, M. Mohamed Safadi, ministre des Finances, s’est entretenu avec M. Charles Collins, sous-secrétaire d’Etat US pour les affaires financières. Il devait être rejoint par M. Riad Salamé, gouverneur de la Banque du Liban.
M. Salamé avait eu un long tête-à-tête avec Mme Christine Lagarde, directrice du FMI et Robert Zolick, président de la Banque Mondiale, en présence de M. Ibrahim el-Assaf, ministre saoudien des Finances.

SAFADI: LE CABINET N’EST PAS CELUI DU HEZBOLLAH
Au cours d’un point de presse, M. Safadi a assuré que “le gouvernement Mikati n’est pas et ne sera pas celui du Hezbollah”. Il a dit encore qu’il avait obtenu un soutien de la part du FMI et de la Banque mondiale, dont les responsables ont manifesté leur satisfaction de la ratification, par la Chambre des députés, du projet de loi sur l’électricité.
Par ailleurs, les milieux officiels proches du gouvernement américain, ont indiqué que la visite, le mois prochain du patriarche Raï aux Etats-Unis, n’englobera pas la capitale fédérale. Ce sera une visite “pastorale” et se limitera aux villes où résident des émigrés libanais.
Le chef de l’Eglise maronite se rendra aux USA le 4 octobre, au lieu du 30 septembre, après l’annulation de l’escale de Washington. Il sera reçu par M. Ban Ki-moon au siège de l’ONU et sa visite prendra fin le 23 octobre.
Le président Mikati a contacté, téléphoniquement, le président Sleiman et l’a informé de la teneur des entretiens qu’il a eus à New York depuis son arrivée.
D’autre part, un diplomate libanais en poste à Washington, a révélé que Mme Hillary Clinton a exprimé sa compréhension quant à l’embarras que ressent la partie libanaise vis-à-vis de certaines questions en rapport avec la Syrie et la situation régionale. Elle a fait état de l’engagement par les milieux officiels US de poursuivre leur aide à l’Armée libanaise et aux FSI.
En ce qui a trait au financement du TSL, le sujet n’a pas encore été soulevé sur le plan officiel, bien que les Américains aient conscience des difficultés qu’éprouve le gouvernement libanais à faire adopter, officiellement, un accord relatif au Tribunal international. Mais ils sont sûrs que la solution sera trouvée dès le retour du président Mikati à Beyrouth.

Moratinos succèdera-t-il à Williams?
Cela dit, M. Michaël Williams, représentant personnel du secrétaire général de l’ONU, a entamé ses visites d’adieux, sa mission au Liban ayant pris fin. Son successeur à Beyrouth fait l’objet de concertations et il semble que M. Moratinos, ancien ministre espagnol des Affaires étrangères, aurait le plus de chance de lui succéder.
Cependant, des pays européens avancent d’autres candidatures, telles celles de Mme Bourhein, ancienne ambassadrice de Norvège à Beyrouth; Daniel Roch, ancien émissaire de Suisse au Moyen-Orient.
Sur un autre plan, le TSL a mis au point un programme sur base duquel il recueillira les dépositions de MM. Marwan Hamadé, Elias Murr et des proches du regretté Georges Hawi, dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat du président Rafic Hariri. M. Murr a été interrogé par des enquêteurs du TSL lors de sa présence, dernièrement à Paris. Ceux-ci s’apprêtent à recevoir M. Hamadé, ainsi que Mme Suzie Madayan, veuve de Hawi et sa fille Nara, un lien existant entre l’attentat du 14 février et ceux ayant visé MM. Murr, Hamadé et Hawi.

Raï s’explique...
Il y a lieu, ici, de faire état des explications fournies par S.B. Mgr Raï, au cours de la commission chargée d’élaborer le nouveau projet de loi électorale, en réponse à une question posée par M. Nadim Gemayel, député de Beyrouth, à propos de ses déclarations à Paris qui ont suscité des réactions, certaines hostiles, dans les milieux chrétiens.
Sa Béatitude a fourni les précisions suivantes: “Je ne m’adonne pas à la politique et ne vous attendez pas à ce que je vous en entretienne. C’est à vous d’en parler. Quant à moi, je traite de principes généraux. Permettez-moi de vous exposer la vérité sur ma position, telle que je l’ai expliquée au président Sarkozy. Ce que je lui ai dit, littéralement, c’est que je suis contre le fait pour le Hezbollah d’être représenté à la Chambre et au gouvernement, tout en disposant des armes. Mais en même temps, j’ai dit que la communauté internationale devait nous aider à éliminer tous les prétextes qu’invoque ce parti pour conserver les armes, notamment la libération du territoire libanais des fermes de Chebaa et désarmer les Palestiniens qui constituent un danger pour le pays. Nous nous réunirons tous et dirons au Hezbollah: livrez vos armes aujourd’hui avant demain.
“En ce qui a trait au régime syrien, moi Béchara Raï suis-je devenu un partisan de Bachar Assad? En tant que patriarche d’Antioche et de tout l’Orient, je dois prendre conscience des obsessions des chrétiens dans toutes ces régions du globe.
“J’ai encore dit au président Sarkozy: “Voyons ce qui s’est passé en Egypte et en Irak à la suite de la chute du régime. Ne sont-ils pas tombés dans le chaos, ce qui a amené les chrétiens à en payer le prix? Si votre souci est de vous débarrasser de Bachar Assad, cela ne nous regarde pas et nous nous interdisons de nous y immiscer. Mais nous craignons un conflit sunnito-alaouite en Syrie dont paieront le prix les chrétiens, ce qui se répercutera sur le Liban et sa stabilité. A part cela, ce ne sont que des interprétations et des déductions erronées”.

Aoun à Mikati: “Payez de votre poche au TSL”
Mais revenons aux Nations unies, où le président Najib Mikati a présidé, mardi, une réunion du Conseil de sécurité, au cours de laquelle il a fait une intervention, réaffirmant sa détermination à respecter les résolutions internationales, à commencer par celle relative au Tribunal spécial pour le Liban (TSL).
Le général Michel Aoun a rétorqué au chef du gouvernement, lui recommandant “de prélever sur sa fortune ou celle de son frère, les 35 millions représentant la part du Liban au budget du TSL... Ceci n’est rien comparé à leur richesse personnelle”.
De son côté, le Bloc du futur a exprimé sa méfiance à l’égard des engagements pris par le président Mikati quant au financement du TSL.
“L’engagement verbal est une chose, dit-il et l’engagement réel en est une autre... Le gouvernement dont le chef affirme vouloir respecter les engagements internationaux du Liban, comprend des éléments qui défient ouvertement le TSL et flétrissent toute coopération avec cette instance. De plus, certaines de ses composantes continuent à protéger les suspects impliqués dans l’assassinat du président Rafic Hariri”.
Par ailleurs, le Bloc du futur dénonce les tentatives du Hezbollah d’étendre, progressivement, la force dissuasive de ses armes à de nouveaux espaces qui sont du ressort de l’Etat et de leur octroyer de nouvelles fonctions.
“Après les richesses pétrolières du Liban, ajoute le courant du Futur, le Hezbollah prétend vouloir protéger la coexistence et le soupçonne de vouloir se substituer, progressivement à l’Etat libanais”.
Le Courant du futur dénonce ce qu’il appelle un “scandale”, allusion à l’entrée par effraction du ministre des Télécommunications, Nicolas Sehnaoui au deuxième étage des télécommunications. “Il s’agit là d’une offense à l’Etat et aux institutions”, constate de bloc parlementaire haririen.
Enfin, il a exprimé sa solidarité et son soutien à la démarche de M. Mahmoud Abbas, chef de l’Autorité palestinienne, visant à obtenir l’adhésion de la Palestine aux Nations unies.

MIKATI: LE TSL RESTE UNE RÉALITÉ
“Le TSL est une réalité et le Liban serait le plus grand perdant s’il cessait sa contribution financière”, a déclaré le président Najib Mikati dans son intervention devant le Conseil de sécurité... “Je ne prendrai pas la place du juge pour dire si l’acte d’accusation est pertinent ou pas”.
Le chef du gouvernement a proclamé le respect par l’Etat libanais, de ses engagements à l’égard des résolutions internationales, dont celle relative au Tribunal spécial pour le Liban, en ce qui concerne son financement.
Il avait, auparavant, présidé une réunion du Conseil de sécurité consacrée, essentiellement, au dossier palestinien; puis, rencontré M. Ban Ki-moon, secrétaire général des Nations unies... Indiquant que le versement de la part du Liban au financement du Tribunal international allait être examinée dans les prochaines semaines.
“Si la contribution libanaise n’était pas versée, le Liban serait le plus grand perdant. Nul parmi les Libanais ne peut être contre l’intérêt de son pays. C’est Israël qui, le cas échéant, en serait le premier bénéficiaire et nous lui aurions donné ainsi ce qu’il n’aurait pu obtenir par la guerre, alors qu’il attend un prétexte, afin de ne pas appliquer la résolution 1701. Le Liban ne peut s’exclure de la volonté internationale”.
Puis, au cours d’un point de presse, M. Mikati a répondu aux questions qui ont été posées. Interrogé sur le point de savoir si Mme Hillary Clinton, secrétaire d’Etat US qu’il avait rencontrée la veille, lui avait remis un message au président syrien Bachar Assad, il a émis cette réflexion: “Ce n’est pas mon rôle de transmettre des messages”.
Il a précisé qu’il se rendrait en Syrie quand il entamerait ses visites à l’étranger et qu’il discuterait avec les responsables syriens du tracé des frontières communes. Il a ajouté que “les allégations selon lesquelles il aurait des intérêts dans le pays voisin font partie de la campagne menée contre lui”.

PAS DE MENACES CONTRE NOS BANQUES
Prié d’expliquer la question des banques libanaises, le Premier ministre a déclaré que le secteur bancaire constitue la colonne vertébrale du Liban, le gouvernement libanais étant déterminé à le protéger. “Aucune banque ne saurait se livrer à un acte quelconque qui pourrait provoquer la communauté internationale ou lui porter atteinte... J’en ai parlé hier à Mme Clinton et dès mon retour à Beyrouth, je m’entretiendrai de ce sujet avec le gouverneur de la Banque centrale et le président de l’Association des banques.
“Le gouverneur de la BDL m’a affirmé ainsi qu’à Mme Clinton, qu’il n’avait aucun reproche à l’égard de nos établissements bancaires”.
Le président Mikati a qualifié son entretien avec Mme Clinton de “cordial et d’amical”. Et de poursuivre: “Elle m’a dit qu’elle comprenait très bien la position du Liban à l’égard de la Syrie”, tout en précisant, une fois de plus, que “Beyrouth ne votera pas en faveur d’une résolution imposant des sanctions contre la République syrienne”.
Le chef du gouvernement avait eu, au préalable, un entretien avec M. Ban Ki-moon, en présence de la délégation libanaise et de M. Terje Roed Larsen, en charge du suivi de l’application de la résolution 1559. Plusieurs dossiers ont été évoqués au cours de cette réunion processus de paix, résolution 1701, démarcation des frontières terrestres et maritimes, ressources en hydrocarbures, rapports entre l’Armée et la Finul, problèmes des réfugiés palestiniens au Liban.
Le secrétaire général a réitéré son appui aux travaux du TSL et appelé le Liban à mettre en œuvre ses obligations à son égard.
M. Mikati devait avoir un tête-à-tête avec M. Davutoglu, ministre turc des Affaires étrangères sur la situation en Syrie, l’exploitation des ressources en hydrocarbures et le litige turco-chypriote à ce sujet. Il devait s’entretenir, enfin, avec les chefs de la diplomatie jordanienne et émiratie.